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« C’est pas possible d’enlever la vie à un enfant de 20 ans »

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©PHOTOPQR/LE PARISIEN/Olivier Lejeune ; Paris ; 22/09/2020 ; PROCES DE L HYPER CACHER DU 9 JANVIER 2015 SORTIE DU TRIBUNAL 12H ERIC COHEN (yohan cohen) avec l une des deux caissières de l hyper cacher,Zarie Sibonie - Paris terror attacks trial recalls ?terror? and ?cruelty? of kosher store rampage sept 22 2020 (MaxPPP TagID: maxnewsspecial481469.jpg) [Photo via MaxPPP]

Eric Cohen à la sortie du tribunal, le 22 septembre, avec l’une des deux caissières de l’Hyper Cacher.OLIVIER LEJEUNE/LE PARISIEN/MAXPPP

Procès des attentats de janvier 2015 : « C’est pas possible d’enlever la vie à un enfant de 20 ans »

La cour d’assises spéciale de Paris a entendu mardi 22 septembre des proches des quatre otages tués dans l’Hyper Cacher. Un père, des épouses, des sœurs, à jamais brisés par le chagrin. Avec toujours une même obsédante question : « Pourquoi cette haine des juifs ? »

Pierre Bienvault,  

Que peut dire devant une cour d’assises un père dont le fils de 20 ans a été assassiné de sang-froid dans un attentat terroriste ? Comment garder la maîtrise de ses mots ? Comment ne pas hurler ? Ce mardi 22 septembre, on sent bien qu’Éric Cohen, à la barre, fait d’immenses efforts pour ne pas se laisser déborder. « C’est très difficile de se contenir », reconnaît le père de Yohan Cohen, employé du magasin Hyper Cacher. La toute première victime d’Amedy Coulibaly, le 9 janvier 2015.

« J’ai frappé partout, j’étais incontrôlable »

Cet après-midi-là, l’assaut contre l’épicerie juive est donné vers 17 heures. Mais pendant encore trois longues heures, Éric Cohen, son épouse et son beau-frère restent sans nouvelle.

Vers 20 heures, une commissaire explique aux familles des ex-otages que celles dont elle va prononcer le nom devront la suivre. « Le premier nom, c’était «Cohen» alors, on s’est levé et on l’a suivie », raconte le père de Yoan, qui apprendra sa mort quelques minutes plus tard. « Ma réaction a été très violente. J’ai frappé partout, j’étais incontrôlable. »

Plus de cinq ans après, c’est comme si rien n’avait changé. La rage, le désespoir, l’incompréhension sont toujours là. Comme si aucune plaie, ouverte ce 9 janvier, n’avait pu se cicatriser. À aucun moment. « C’est pas possible d’enlever la vie à un enfant de 20 ans. C’est pas possible (…) Pourquoi cette méchanceté gratuite, cette haine des juifs ? », se demande Éric Cohen, tout en donnant le sentiment qu’il ne réussira jamais à trouver des réponses à ses questions.

Sa famille apparaît comme figée dans le chagrin et le silence, incapable de parler de ce 9 janvier 2015. « Personne ne veut voir les autres pleurer. Alors tout notre ressenti, on le garde à l’intérieur », dit Éric Cohen, en évoquant en quelques mots la mère de Yoan : « Son quotidien est inexistant. Elle est dans le déni. Elle ne veut rien voir, rien entendre. Elle veut garder l’image de son fils tel qu’il était. »

Le douloureux souvenir de la liste de courses

Puis, Valérie Braham arrive à la barre. « Mon mari, c’était mon pilier. Je suis morte avec lui », murmure l’épouse de Philippe Braham, 45 ans, deuxième personne assassinée par Amedy Coulibaly. Ce jour-là, il était passé à l’épicerie pour des achats de dernière minute, juste avant Shabbat. « La veille, je lui avais fait une liste de courses. Et il était revenu en oubliant des choses. Alors je l’ai un peu engueulé. Et il m’a dit : «C’est pas grave, demain j’y retourne.» Il l’a fait pour ne pas me contrarier », dit Valérie Braham qui se met en pleurer.

Une femme « devenue veuve à 39 ans » avec trois enfants alors âgés de 20 mois, 2 ans et demi et huit ans. « J’ai peur qu’ils oublient leur père alors j’essaie de perpétuer le souvenir. J’essaie qu’il continue d’être très présent à la maison », murmure Valérie Braham, en ajoutant que son fils « lui ressemble comme deux gouttes d’eau ».

Une mère qui dit ne pas savoir ce qu’elle racontera à ses enfants, plus tard, de ce 9 janvier 2015. « Ils savent que leur papa est parti. Ils savent que c’est un méchant monsieur qui l’a tué mais ils ne comprennent pas pourquoi. Parce que leur papa, c’est le plus gentil du monde. »

Valérie Braham dit enfin qu’avant de rencontrer son mari, elle n’était pas pratiquante. « D’habitude, dans les fêtes juives, c’est l’homme qui fait la prière. Mais depuis cinq ans, j’ai appris à la faire moi-même, en attendant que mon fils ait 13 ans et puisse la faire à son tour », confie-t-elle. Comme Éric Cohen, Valérie Braham n’a jamais été capable de reprendre son travail. « Aujourd’hui, les gens savent ce que cela fait d’être confiné. Moi, cela fait presque six ans que je suis confinée à la maison », dit-elle.

« Dans la famille, tout le monde l’appelait Michel »

À l’Hyper Cacher, la troisième victime d’Amedy Coulibaly était François-Michel Saada, 64 ans. « François, c’était pour l’état civil. Dans la famille, tout le monde l’appelait Michel », explique à la barre son frère, Bruno, venu lire à la cour d’assises une lettre de son épouse qui n’a pas eu la force de venir.

Dans ce courrier, Madame Saada, qui vit désormais en Israël, parle du « pull gris » qu’elle avait acheté à son mari quelques jours plus tôt et qu’il portait ce 9 janvier. « Il sera parfait pour cet hiver », lui avait dit Michel, juste avant de partir acheter du pain pour Shabbat. « Depuis cinq ans, ma fille fait elle-même le pain de Shabbat, en mémoire de son père », écrit cette veuve, en ajoutant qu’elle a passé les 297 shabbats sans son mari à se repasser le « film de cette journée ».

Puis sur l’écran de la cour d’assises, on voit le beau visage d’un jeune homme souriant à la vie. Ce vendredi-là, Yoav Hattab était allé à l’Hyper Cacher pour acheter une bouteille de vin pour Shabbat.

À la barre, une de ses sœurs raconte que, caché au sous-sol, il lui avait rédigé un SMS. « Il me disait «je t’aime», mais il n’a pas eu le temps de me l’envoyer », explique cette jeune femme, en parlant du courage de ce frère qui, après être remonté du sous-sol, s’est emparé d’une kalachnikov laissée sur un carton par Amedy Coulibaly.

Mais l’arme n’a pas fonctionné et Yoav Hattab a été assassiné. « C’était dans sa nature, il voulait toujours aider les autres. Il est allé au front, uniquement armé de son courage. C’était un héros sans bouclier. Et je pense que son acte de bravoure devrait être salué » par le monde entier, dit-elle. « Et pas uniquement par les juifs de France. »

https://www.la-croix.com/France/Proces-attentats-janvier-2015-Cest-pas-possible-denlever-vie-enfant-20-ans-2020-09-22-1201115496

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Filouthai

Nous n’oublions pas ces héros de la vie quotidienne, jeune dame.
Quant aux pourritures islamistes qui les ont tué et aux raclures de goooche qui les soutiennent, nous vous adressons notre haine éternelle !

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