Le 27 mai est devenue la journée nationale de la Résistance, pourquoi ? Pour transmettre les valeurs de la Résistance et éclairer le présent.

Ainsi une des cérémonies prévues dans tout le territoire français,  se tient à 15h au Wagon du Souvenir du Camp des Milles, Chemin des Déportés, Les Milles.

Le camp des Milles pendant la Guerre, archive Mémorial du Camp des Milles

 

Ce souvenir est particulièrement nécessaire lorsque l’on voit aujourd’hui nos sociétés démocratiques prises en tenaille entre des extrémismes identitaires religieux et nationalistes, qui ont toujours été dans l’histoire le moteur ayant conduit à la guerre et aux génocides.

Cette cérémonie marque cette année le 75ème anniversaire de la création du Conseil National de la Résistance par Jean Moulin.

« Chacun peut résister, chacun peut réagir, chacun à sa manière. »

 

La première réunion du Conseil de la Résistance a lieu à Paris, au premier étage du n° 48 de la rue du Four (6e), dans la salle à manger de René Corbin, ancien membre comme Jean Moulin du cabinet de Pierre Cot, ministre de l’air, puis du commerce sous le Front populaire.

Elle est présidée par Jean Moulin dit « Rex », suivant les instructions du général de Gaulle qui lui a transmis un long message manuscrit à lire aux participants après son intervention liminaire. Le Conseil vote à l’unanimité, après un vif débat, une motion lue par Georges Bidault et préparée avec Jean Moulin. La réunion a duré environ deux heures.

« Conseil de la Résistance […,] c’est le nom que Jean Moulin a choisi après quelques hésitations, comité politique, conseil politique, Conseil politique de la Résistance et finalement il a choisi le nom de Conseil de la Résistance. Ce n’est que plusieurs mois après sa mort dans l’automne et l’hiver 43/44 que par une espèce de convergence d’usage le nom de Conseil national de la Résistance s’est définitivement établi et a été enregistré par l’histoire. » (Daniel Cordier, intervention au colloque du 23 mai 2008 à l’Assemblée nationale, commémorant le 65e anniversaire de la première réunion du CNR).

Robert Chambeiron « Champion », Daniel Cordier « Alain », secrétaire de Jean Moulin, et Pierre Meunier « Morlaix » sont allés « chercher les arrivants aux différentes stations de métro pour les conduire devant la porte d’entrée de l’immeuble, sans leur annoncer le numéro de la rue » et en ne « leur révél[ant] l’étage qu’au dernier moment ».

« Rex » a en effet « prévu des rendez-vous à la sortie des stations de métro les plus proches, soit avec un représentant isolé, soit par groupes de deux. […] Je me poste ensuite à la sortie de la station Croix-Rouge fermée afin d’observer tout mouvement suspect dans la rue du Four et prévenir “Rex” par téléphone en cas de danger. J’aperçois au loin “Morlaix” et “Champion” qui montent la garde au coin de la rue de Rennes, à côté du métro Saint-Sulpice. » (Daniel Cordier, Alias Caracalla, Gallimard, coll. « Témoins », 2009, p. 841-842).

Étaient présents, outre Jean Moulin et au-dehors, pour l’organisation, Robert Chambeiron, Daniel Cordier et Pierre Meunier :

  • huit membres des principaux mouvements de résistance des deux zones :
  • Roger Coquoin « Lenormand » (Ceux de la Libération, zone nord)
  • Charles Laurent (Libération-Nord)
  • Jacques Lecompte-Boinet « Lefort » (Ceux de la Résistance, zone nord)
  • Jacques-Henri Simon « Sermois » (Organisation civile et militaire, zone nord)
  • Pierre Villon « Colbert » (Front national)
  • Claude Bourdet « Lorrain » (Combat, zone sud)
  • Eugène Claudius-Petit « Claudius » (Franc-Tireur, zone sud)
  • Pascal Copeau « Salard » (Libération-Sud)
  • six délégués de partis politiques d’avant-guerre :
  • Georges Bidault « Bip » (Parti démocrate populaire, démocrate-chrétien)
  • Jacques Debû-Bridel « Argonne » (représentant la Fédération républicaine, droite)
  • Joseph Laniel (Alliance démocratique, centre droit)
  • André Le Troquer (SFIO, socialiste)
  • André Mercier (Parti communiste)
  • Marc Rucart (Parti radical-socialiste)
  • et deux syndicalistes :
  • Louis Saillant (CGT)
  • Gaston Tessier (CFTC).

Le CNR représente la consécration de l’unité de la Résistance puisque la tenue de sa réunion inaugurale écarte tout risque de scission.

De plus, il convient de souligner le retentissement de la première réunion dans les capitales alliées : le souvenir de la désastreuse Campagne de France y est effacé au profit d’un vent nouveau et impertinent de courage soufflant sur les patriotes de tous les pays occupés. A n’en pas douter non plus, elle signera le renforcement du prestige du général de Gaulle, reléguant les échecs des premiers combats des troupes de la France libre, sévèrement réprimées par l’armée de Vichy, aux oubliettes d’un temps révolu.

Ce qui se joue lors de cette première réunion capitale, c’est la reconnaissance unanime et au nom de la France résistante par les membres du CNR de Charles de Gaulle comme mandataire des intérêts de la nation. L’édifice demeure fragile à plusieurs titres.

D’abord, le général de Gaulle se trouve dans une position difficile et quelque peu marginale vis-à-vis du haut commandement allié. Le caractère clandestin du CNR, ensuite, pose la question de savoir comment suppléer une consultation électorale impossible, et par là même, comment assurer une représentativité suffisante à chacun de ses membres ?

En pratique, chaque groupement a adopté pour désigner son délégué le procédé de son choix. Dans la majorité des cas, le chef de mouvement ou de l’organisation a procédé à la nomination ou alors à la nomination par le comité directeur du mouvement.

De même d’ailleurs, en cas de départ pour Alger ou d’arrestation du représentant du mouvement, son remplaçant est désigné de la même façon. Le procédé retenu s’apparente à celui d’une élection sur proposition.

Le succès de la tenue de la première réunion du CNR, le 27 mai 1943, va renverser la donne politique française et alliée : Plébiscité à l’unanimité par les représentants de la Résistance intérieure, le général de Gaulle sera en mesure de quitter Londres pour établir le Gouvernement Provisoire de la République Française à Alger, le 3 juin 1943, soit exactement une semaine plus tard. Il sera dorénavant l’interlocuteur obligé des Alliés.

Le CNR sous Jean Moulin

Son premier président fut Jean Moulin, délégué du général de Gaulle, lequel voulait instaurer ce conseil afin d’unifier les différents mouvements de Résistance qui s’étaient spontanément constitués depuis la défaite et son appel du 18 juin 1940, au lendemain de la demande d’armistice par le maréchal Pétain.

Selon les dirigeants de la France libre (FFL), en effet, les mouvements de Résistance, hormis les Francs-tireurs et partisans (FTP) et autres résistants d’obédience communiste, étaient le plus souvent inorganisés et n’étaient pas suffisamment coordonnés.

Aussi, nombre de maquis n’entretenaient pas de relations entre eux et ce cloisonnement des mouvements de Résistance empêchait toute action commune organisée, et donc efficace.

Le , Jean Moulin devient ainsi le représentant du général afin d’unifier l’ensemble des mouvements de Résistance. En juin, il met en place un « Comité des experts » chargé de penser la synthèse des projets politiques pour l’après guerre.

Le tour de force qu’est l’unification se produit un an plus tard, le , lors de la première réunion du CNR qui se tient à Paris.

Cette réunion aura une importance politique considérable, ainsi que l’expose Robert Chambeiron :

« Après le 27 juin, les Américains ne peuvent plus douter de la légitimité de De Gaulle. La France devient un pays allié à part entière et, à ce titre, sera présente lors de la capitulation des armées nazies, le . D’autre part, les Alliés doivent abandonner leur projet d’administrer eux-mêmes la France au fur et à mesure de sa libération. Et, parce qu’il y a eu le CNR et de Gaulle, la France sera, lors de la création de l’Organisation des Nations unies, l’une des cinq grandes puissances à occuper un siège permanent au sein du Conseil de sécurité. »

source www.museedelaresistanceenlignr.org

Les juifs sont nombreux dans les réseaux de résistance française, leur combat est précoce et ils ont joué un rôle majeur dans la libération du pays.

Nombre d’entre eux sont engagés dans la lutte contre l’occupant. Patriotes, socialistes, gaullistes, communistes, trotskistes, ils participent aux différents mouvements de Résistance. De Gaulle a rendu hommage à leur combat précoce engagé contre l’occupant nazi.

Le sauvetage des enfants constitue la première forme d’action entamée par les organisations juives. Grâce à l’Oeuvre de secours aux enfants (OSE) plusieurs milliers d’enfants sont sauvés  grâce à leur  déplacement en zone sud.

 Les principaux centres d’hébergement se trouvent en zone sud tels celui de  Montpellier. Au sein du « Comité de Nîmes », l’OSE  réussit à  faire partir trois cents enfants vers les Etats-Unis.

L’OSE disperse les enfants dans les oeuvres, familles chrétiennes et laïques. A Lyon, le réseau Georges Garel, créé en août 1942, permet de sauver plus de mille six cents enfants. Garel demande l’aide de Monseigneur Salièges.


Le circuit Garel  est souple : chaque maille est séparée, si l’une d’elles est repérée par la police, les autres ne sont pas menacées. Garel se préoccupe aussi de mettre au point un système qui permettrait, une fois la guerre terminée, d’établir la véritable identité des enfants.

Le 1er juin 1941, au vingt cinq de la rue d’Italie,  le centre marseillais de l’OSE ouvre ses portes grâce à  l’aide de l’organisation américaine humanitaire l’Unitarian Service Commited (USC) qui apporte des fonds importants.

Huguette WAHL

Dans l’équipe de direction on compte un délégué américain, un catholique, le docteur Zimon, le représentant de la Jeunesse juive de France à Marseille, Julien Samuel. Les priorités concernent avant tout  l’assistance médico-sociale aux enfants et aux adultes. Lorsqu’en juin 1943, sonne l’heure de la clandestinité, l’OSE concentre ses forces dans le sauvetage des enfants en les « plaçant » avant de les envoyer hors des frontières.

Mouvement scout, les Eclaireurs Israélites de France (EIF), tout comme l’OSE, ont pour préoccupation majeure le sauvetage des enfants.

Grâce à leur aide, plusieurs centaines d’enfants réussissent à passer en Suisse. En 1943, les EIF passent dans la clandestinité. Les rafles se multiplient.
Un Organisme de sauvetage clandestin « la Sixième » est mis en place. Il s’agit de placer des jeunes munis de faux papiers dans des internats, et des familles.

L’action concerne aussi le sauvetage des adultes. Les formes d’action se diversifient. La répression s’abat sur les responsables de la « Sixième » : Mila Racine, convoyeuse d’enfants est prise à la frontière suisse, meurt en déportation (1943). Arrêtée avec les enfants qu’elle veut faire passer en Suisse,  Marianne Cohn  est assassinée en 1944.

 

Selon Annette Wieworka, le rôle de toutes les associations est fondamental, on estime que près de dix mille enfants ont été ainsi sauvés. En effet, les déportations ont touché deux fois plus les adultes que les enfants.

Dès le 15 juin 1940, le jour même où la Gestapo s’installe à Paris, quelques jeunes rompus au travail social s’interrogent : comment aider tant de Juifs nécessiteux, à qui les moyens ont manqué pour se joindre à ceux qui ont fui devant l’invasion allemande ? Comment leur porter secours,  alors qu’à Paris aucune œuvre juive de bienfaisance ne fonctionne plus ?

Ils décident de créer le Comité de la rue Amelot  qui I regroupe cinq oeuvres parmi lesquelles la « colonie scolaire » avec son dispensaire, « La Mère et l’enfant », les services de la « Fédération des Sociétés Juives ». L’âme de l’insoumission est David Rappoport. Exilé russe à Paris, il incarne la fraternité et la générosité « rêve d’Abraham ».

 


Dès les premières persécutions, Rappoport va lancer la Résistance, dans l’action de camouflage, de fabrication de faux papiers, de planquages d’enfants. Henri Bulawko s’occupe du réseau des faux papiers.

La résistance sioniste, elle aussi s’affirme tôt. Dès juillet 1940, à Toulouse,  Abraham Polonski surnommé « Maurice Ferrer », et son épouse Génia (« Bat Mattahiaou »), David et Ariane Knout constituent la Main Forte (M.F). C’est le premier noyau de la Résistance sioniste. En octobre 1940, Lucien Lublin (« Lucien »), et les fondateurs de la Main Forte (M.F) créent l’Armée juive (A.J) afin d’élargir le nombre des militants et de développer l’action de la MF sur le terrain militaire.

 

     En décembre 1941, les deux piliers de l’Armée juive, Lev Zupraner dit « Léonard » et Albert Cohen  surnommé« bébé », reçoivent pour mission de constituer un premier corps-franc de l’Armée juive à Toulouse. En 1942, d’autres corps-francs sont créés.

Ces unités se spécialisent dans les coups de main : les traîtres et les installations militaires allemands sont visés. A l’automne 1943, les EIF et le Mouvement des  Jeunesses Sionistes (MJS créé en 1942 à Montpellier), vont se fondre dans l’Organisation Juive de Combat qui choisit la Résistance armée et se consacre au rassemblement des jeunes dans les maquis.

 


Des maquis juifs se forment dans la région du Tarn, et de la Haute Loire. L’OJC organise une série de corps-francs dans différentes villes : à Lyon, à Grenoble, à Nice, à Paris….

Le maquis du Tarn est le plus célèbre, les EIF occupent une grande place en s’associant à la Résistance intérieure. Robert Gamzon surnommé Castor, chef des EIF organise les premiers noyaux tels celui de la Malquière, en novembre 1943. La région est, en grande partie protestante, ce qui facilite les rapports avec la population.

 

Edmond Fleg et Robert Gamzon en 1941 à Beauvallon

  Pour exprimer leur identité sioniste, à l’intérieur du corps franc de la Montagne Noire, le maquis d’Espinassier commandé par le capitaine Jacquel, prend le nom de Trumpeldor, un héros national sioniste. Sous l’appellation « compagnie Marc Haguenau » le corps-franc n° 10 prend part à la libération de Castres et de Mazamet (18-22 août 1944).

Les sionistes ont ainsi participé au combat général pour la survie des Juifs en France et ont permis d’intégrer  le sionisme dans le paysage communautaire de France.
Les Juifs dans les Francs Tireurs Partisans-Main d’Oeuvre Immigrée, constituent une autre composante de la résistance. Parmi les réfugiés politiques, de nombreux juifs ont adopté les idéaux de la gauche : socialiste, communiste et trotskyste.
Nombre d’entre eux, les ouvriers étrangers ont adhéré à la structure rattachée à l’appareil dirigeant du parti communiste français : la Main d’Oeuvre Immigrée (MOI). Ils correspondent à la première génération d’immigrés, nés en Pologne, qui a reçu le communisme comme une révélation.

En 1940-1941, la MOI se reconstitue dans la clandestinité. Parmi les groupes de langue, le groupe yiddish est composé essentiellement de juifs polonais. A Paris, depuis le premier internement des juifs polonais étrangers à Beaune et à Pithiviers, la clandestinité s’amplifie. Abraham Rayski est l’un des organisateurs du Centre Communiste Juif. « Solidarité » devient la première organisation de Résistance juive à caractère social.

Parmi les dirigeants de ces groupes de Résistance, on trouve souvent des Juifs ayant appartenu aux Brigades internationales d’Espagne, où ils se sont habitués à la lutte armée et la clandestinité. Marc Chagall a adressé à l’un des combattants Abraham Lissner une lettre dans laquelle il dit : « j’ai conscience que notre Résistance juive à nos ennemis prend déjà des aspects bibliques. »

Le Centre Communiste juif coiffe les premiers noyaux de la Résistance juive comme Solidarité, plus tard le groupe des Francs-tireurs et Partisans. On y pratique le système du « triangle » c’est-à-dire qu’à la tête de chaque secteur se trouvent toujours les dirigeants.

  Très tôt, en zone nord, les Résistants juifs ont établi des laboratoires de faux papiers. En zone sud, Adam devient le responsable pour les relations entre organisations juives et les mouvements de la résistance communiste.

Les « Bataillons de la Jeunesse », formation de combat créée par les jeunesses communistes réunissent une forte proportion de jeunes Juifs. Dès l’été 1941, les attentats anti-allemands se multiplient. Au début de 1942, se constituent à Paris quatre unités combattantes FTP-MOI, composées en grande majorité d’étrangers.

L’unité juive connue sous le nom du « deuxième détachement » juif ainsi que la formation roumaine comptant près de 90% de Juifs sont particulièrement efficaces dans de très nombreuses opérations militaires menées en plein Paris.

Selon Abraham Lissner, les actions militaires ont débuté en mars 1942 :« Nous avons commencé par déposer des bombes à retardement dans tout Paris, là où il y avait des objectifs militaires. »

Le service de renseignements du détachement juif est perfectionné. Si les résistants sont filés par les policiers, ils peuvent grâce à ce service, filer à leur tour l’ennemi.

De nombreux jeunes Juifs, après la rafle du Vélodrome d’Hiver, en juillet 1942, rejoignent la résistance communiste. C’est une génération de jeunes, désespérés par ce qu’ils ont vu, par leur milieu d’origine, par leur environnement. Ils ont trouvé une nouvelle famille.

La plupart de cette génération devient communiste dans et par la Résistance.

Le 28 juillet 1943, une unité spéciale formée de combattants des quatre unités FTP-MOI,  ayant à sa tête le jeune Marcel Rayman s’attaque  au Général Schaumburg, commandant du grand Paris. Deux mois plus tard, elle exécute le gauleiter Julius Ritter, délégué aux réquisitions de la main d’oeuvre en Espagne.

A Lyon, Gilbert Weissberg continue son travail d’instruction militaire. De nombreux attentats anti-allemands sont organisés par des Juifs en particulier, le groupe Carmagnole. A Toulouse la jeunesse communiste se regroupe autour du comité d’action pour la Défense de la Jeunesse Juive, à la tête on y trouve Raph Feigelsohn.
En novembre 1943, Marcel Rayman ainsi que la plupart de ses compagnons juifs sont arrêtés. Le 15 février 1944, s’ouvre devant le tribunal militaire allemand, le procès des « vingt-trois ». La fameuse Affiche  Rouge est placardée dans toute la France, elle porte en grandes lettres l’inscription : « l’armée du crime » et des photos de dix « criminels ». Le chef Missak Manouchian est traité d’Arménien, « chef de bande ». Vingt trois partisans dont onze Juifs sont exécutés par la gestapo.


Le poète Aragon les a chantés :
« Vingt-trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt-trois qui criaient la France en s’abattant. »
Rapidement les affiches sont barbouillées par les résistants. Partout on les voit couvertes d’inscriptions : « Morts pour la France. »

Après des arrestations successives, les rescapés de la MOI juive se replient en zone sud. A Lyon durant le mois de mai 1943, le rapprochement de la MOI et des autres organisations juives de Résistance donne naissance à l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE).

A Marseille la résistance armée juive est le fait des FTP-MOI et des groupes de combat juifs. On peut résumer leur histoire en quatre temps. En premier lieu, dès l’automne 1940 se constitue un groupe de Juifs venant de Paris autour des militants tels que Abraham Hacham et Hélène Faich et le rabbin  Shneerson. L’un des rôles de ce noyau est développer les contacts avec les réfugiés internés dans les camps de la zone sud. Puis en 1941 l’activité de la MOI va se structurer. Adam Rayski venu de Paris, cette année-là fonde le groupe Solidarité. Mila Diameat organise le groupe de sabotage FTP-MOI de la mine de Biver.

Ensuite, en 1942 il y a le passage à l’action du groupe FTP-MOI, c’est le détachement Marat. Le second groupe, formé en juin 1942, comprend exclusivement des immigrés juifs tel Boris Stserban, alias Jeannot, Lev Tchernine, Fernand et Anna Gothenberg.

 


Ce groupe organise l’attentat du 3 janvier 1943 contre l’hôtel Splendid où siège la commission mixte germano-italienne. Au printemps 1943, ce même groupe exécute deux personnalités importantes de la milice marseillaise : Paul de Gassowski et Jean-François Bovysson.

Enfin, durant l’année 1943, la réorganisation de la MOI aboutit à la création de l’UJRE (Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide) et à la mise en place du groupe des combats juifs. La stratégie de l’UJRE est de se lier à la résistance générale. L’une des actions les plus éclatantes de ce groupe est l’attaque lancée, le 31 décembre 1943, contre les locaux de l’UGIF : tous les fichiers et le matériel d’impression sont détruits.

Parmi les organisations qui s’occupent des internés aux Milles il y a Emergency Rescue Committee (E.R.C) dont le but est de faciliter la sortie des camps et l’émigration des intellectuels européens. Son responsable  à Marseille a pu faire libérer Léon Feuchwanger, Golo Mann, ou Max Ernst.

Toutes ces organisations en liaison avec le Consistoire sont à l’origine de la création du CRIF, le Conseil Représentatif des Israélites de France, à Lyon en janvier 1944. Il lui appartient d’unifier les actions de sauvetage face à l’occupant et à la police obéissant aux ordres nazis. L’unité d’action et de coordination s’impose.

Les Juifs dans la Résistance Nationale ont joué, eux aussi, un rôle important. Dans l’organisation « Libération », il y avait trois personnalités juives parmi les six membres fondateurs. Dans le Conseil National qui se constitue plus tard, et qui représente la haute autorité dans la résistance française, il y avait trois Juifs parmi les seize membres.

Les Juifs sont présents également dans un détachement qui manoeuvrait aux côtés de Charles De Gaulle, et dans d’autres groupes français. Parmi les membres de la résistance se trouvent également des personnalités telles Pierre Mendès-France, Marc Bloch, René Cassin, Raymond Aron.

Jean-Pierre Lévy fonde l’un des groupes principaux de la résistance française. Le commandant d’une des annexes d’une grande organisation communiste est le « Colonel Gilles » dont le nom véritable était Josef Epstein, et qui est originaire de Pologne. Marcel Deimann, un Juif de 19 ans qui anime plusieurs actions de combat courageuses à Paris, est pris par les allemands vers le début de la guerre et est condamné à mort. Il devient l’un des exemples, des modèles, dans la résistance française.

 

Fausse carte d’identité remise à Jean-Pierre Levy à Londres (Doc.

Le résistant Jacques Bingen quitte la France en 1940, et se joint aux forces de De Gaulle en 1943. Il revient clandestinement en France, il est mis à la tête des Forces de la France Libre dans le nord du pays. En souvenir de son action dans la libération du pays, un timbre est mis en circulation en France.

Si les juifs participent massivement à la résistance en métropole, la résistance juive en Algérie n’est pas en reste. Les mesures antisémites commencent dès août 1940. Les Juifs au nombre de cent vingt mille, sont tenus pour responsables de la défaite de la France, la mère patrie.

En octobre, c’est l’abrogation du décret Crémieux : de citoyens français, les Juifs algériens deviennent des indigènes sujets français. Cette abrogation est accueillie dans une immense joie par les Européens d’Algérie. De nombreuses émeutes anti-juives éclatent, la masse musulmane est indifférente.

La législation antisémite de Vichy s’applique complètement à l’Algérie. En particulier le 14 février 1942 est créée une « Union Générale des Israélites d’Algérie » (UGIA) pour assurer la représentation des Juifs auprès des pouvoirs publics. Les juifs d’Afrique du Nord (Algérie, Maroc et Tunisie) font partie du plan d’extermination décidée à la conférence de Wannsee.


Des jeunes juifs qui reviennent du front européen ne sont pas prêts à se résigner à l’antisémitisme croissant, aux lois discriminatoires et à la perte des droits civiques. Beaucoup d’entre eux cherchent le moyen de s’évader et de rejoindre les Forces de la France Combattante en Angleterre pour continuer la lutte contre l’Allemagne nazie, mais il est impossible de quitter l’Algérie. Les juifs d’Algérie ont compris qu’ils doivent s’organiser systématiquement et se préparer à l’autodéfense.

Le berceau de la résistance est parti d’une salle de culture physique au centre d’Alger, servant de camouflage aux premières réunions, la salle Geo Gros. Un autre lieu de rencontre important, pour les membres du groupe clandestin juif, est la maison de mode des deux frères Guy et Elie Calvet (Cohen). Les résistants essaient aussi de créer un contact avec la  France Libre à Londres.
La Résistance juive, connue sous le nom de la salle « Géo Gros », est devenue un groupe bien consolidé comptant près de deux cent cinquante membres. Le docteur Raphaël Aboulker, fils d’une vieille famille juive, donne tout son appui à cette organisation clandestine. Durant l’été 1942 un groupe de choc est constitué sous le commandement du capitaine Pilafort arrivé.
A Oran aussi, grâce à un groupe d’universitaires, la résistance juive s’organise. A la tête de cette formation clandestine se trouvent les frères Roger et Pierre Carcassonne. L’arrivée à Oran d’Henri d’Astier de la Vigerie renforce ce groupe. L’unification des mouvements algérois et oranais s’impose. La résistance unie est dirigée par José Aboulker, le colonel Jousse et le « Comité des cinq ».

Elle compte plusieurs composantes : gaullistes, républicains, démocrates, des personnalités d’extrême droite (Jean Rigault) et des monarchistes. L’effectif est entrainé et discipliné. Ce groupe juif se révèle comme un facteur décisif le jour du débarquement allié, en Afrique du Nord, le 8 novembre 1942.

Grâce à leur contrôle de certains endroits stratégiques d’Alger, les résistants juifs ont évité l’échec du débarquement (selon l’avis de plusieurs officiers de l’armée française).


Dans une note du 27 mars 1943, le chef nazi de la section des affaires juives à Paris déclare pour justifier sa politique de concentration et de déportation des Juifs français :
«  Éviter toute possibilité que les Juifs de la province puissent jouer un rôle infâme similaire à celui lors du débarquement des troupes américaines et britanniques en Afrique du Nord. »

JG

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