Un point de vue israélien (ex-Tsahal) : après le Bataclan, «il faut revoir le mode opératoire» du contre-terrorisme. 

Cet article est sorti dans nos colonnes le 22 novembre 2015, moins de 9 jours après les événements tragiques du 13, faisant 130 morts. 

Une tribune de Noam Ohana, réserviste dans une unité d’élite de Tsahal. 

Les conditions de l’intervention de la police, vendredi soir, lors de l’attaque terroriste au Bataclan commencent à susciter des questions, en particulier quant au délai d’intervention de la BRI et du RAID. Nous publions une contribution de Noam Ohana, franco-israélien, réserviste dans une unité d’élite de l’armée israélienne. Au début des années 2000, il a pris part à des dizaines d’opérations anti-terroristes pendant la deuxième intifada. Il continue de s’intéresser de très près au contre-terrorisme.

Les lendemains de tragédies sont rarement des moments opportuns pour poser des questions difficiles, mais certaines doivent d’ores et déjà l’être, même s’il faudra attendre les résultats de l’enquête pour pouvoir rentrer dans les détails.

Au vu de ce qu’il s’est récemment déroulé, il semble en effet que l’un des éléments de la doctrine anti-terroriste française est que lorsqu’il y a une prise d’otages et même lorsqu’il y a un tireur «actif» (qui a déjà commencé à ouvrir le feu sur les civils), les ordres donnés aux premières forces de l’ordre qui arrivent sur place sont de ne pas intervenir directement. A l’Hyper Casher comme au Bataclan, on a pu voir des policiers établir un périmètre de sécurité et attendre l’arrivée des groupes spécialisés du RAID et de la BRI.

Dans le cas de l’Hyper Casher, cette approche a pu fonctionner uniquement grâce à Coulibaly qui aurait très bien pu tuer tous les otages un par un, mais avait décidé de faire durer les choses après en avoir abattu quatre. Il n’y a aucun doute pourtant sur le fait que si Coulibaly avait continué à faire feu et vidé ses chargeurs sur les otages, le nombre de victimes aurait été très élevé, étant donné le temps qu’il a fallu au RAID pour passer a l’action.

Dans le cas du Bataclan c’est exactement ce qui s’est passé. Les terroristes n’avaient nullement l’intention de négocier quoi que ce soit. Ils ont commencé leur carnage immédiatement et ont tout fait pour maximiser le nombre de victimes tout au long de ces deux heures d’un huis-clos atroce.

Il est urgent de changer d’approche et de reconsidérer ce mode opératoire. Il n’y a pas  dans la  nouvelle forme de terrorisme suicidaire et apocalyptique auquel nous sommes confrontés beaucoup de place pour « l’attente ». L’attente c’est la mort certaine. Il faut accepter que dans certains cas une intervention immédiate de forces de l’ordre déjà présentes et bien moins bien formées que le RAID et le GIGN peut être la moins mauvaise des solutions. Et le RAID et le GIGN pourraient tout à fait être impliqués dans ce processus de décision (faut-il les attendre ou bien commencer l’intervention ?). Lorsque le commissaire de la BAC arrivé le premier sur les lieux au Bataclan a été au contact des terroristes, et qu’il en a abattu un sans attendre les renforts, il a fait exactement ce que l’on attend des forces de l’ordre dans une telle situation.

Cela veut dire qu’il faudra former certaines forces de police.  Il n’y a pas de raison de penser que la BAC par exemple, ne puisse pas recevoir une formation spécifique pour intervenir de manière systématique en cas d’urgence absolue. Il faut rappeler ici que beaucoup de ces terroristes ont été des criminels avant d’être des terroristes et que les forces de police sont déjà parfois confrontées à l’hyper-violence de certains criminels qui n’hésitent pas à leur tirer dessus à l’arme de guerre.

Il faut également poser la question de la formation des unités militaires déployées dans le cadre du plan Vigipirate. S’il n’y a pas lieu de douter de la qualité de leur formation militaire, il faut s’assurer qu’elles reçoivent un entraînement anti-terroriste spécifique pour qu’elles puissent elles aussi intervenir en cas d’urgence. La particularité de cette formation est d’apprendre à intervenir dans un environnement où les terroristes sont au milieu de nombreux civils.

Enfin, à l’heure où les autorités parlent de l’importance de la résilience de la population civile, il faut poser la question de l’éducation de cette population civile. Vivre avec le terrorisme s’apprend et c’est un travail de longue haleine. Il faut enseigner la vigilance et les gestes qui sauvent très tôt – probablement à partir du collège et certainement à partir du Lycée. Il ne s’agit bien sûr pas de former des petits soldats mais tout simplement de bons citoyens. Il faut rappeler ici que l’écrasante majorité des victimes de ce type d’attentat meurent d’hémorragie. Il y a bien sûr toujours des blessés qu’on ne peut pas sauver mais il y en a beaucoup d’autres qu’un simple garrot appliqué correctement et immédiatement peut sauver.

On ne transformera pas de simples gardiens de la paix en super-gendarmes du GIGN, ni de jeunes étudiants en urgentistes mais on peut et on se doit de commencer à changer les mentalités quand il s’agit du terrorisme. La crème de la crème de l’antiterrorisme ne sera pas toujours là au bon endroit au bon moment. En les attendant, ce seront les Français du quotidien qui seront les véritables remparts contre ce terrorisme. Des civils vigilants, des gardiens de la paix, des serveurs de cafés et des jeunes gens qui choisissent de se dresser contre cette nouvelle barbarie.

17 novembre 2015 à 19h41

Noam Ohana

lopinion.fr

——————————

Attaque terroriste fictive à Montparnasse : BRI, Raid et GIGN s’entraînent ensemble


Exercice antiterrorisme

Les forces d'élite françaises à la gare Montparnasse pour un exercice géant. Les forces d’élite françaises à la gare Montparnasse pour un exercice géant. (LP/Jean Nicholas GUILLO.)
4f6614c1a354a836673a6aa9b6ff57ab0b2d7791[1]

Les unités d’élite, Raid, BRI et GIGN, ont mis en application dans la nuit de mardi à ce mercredi les nouvelles consignes en cas d’attentat de masse lors d’un exercice grandeur nature à la gare Montparnasse à Paris.

Il était plus d’une heure du matin lorsque le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuveest arrivé à la gare Montparnasse accompagné du préfet de police de Paris, Michel Cadot.

 Un PC de sécurité était installé dans la gare regroupant policiers de la BRI et du Raid et gendarmes du GIGN. Caméras, plans, radios…les trois unités ont travaillé de concert, sous un commandement unique.

Selon le scénario, neuf «terroristes» ont fait irruption dans la gare, tuant plusieurs voyageurs. Trois d’entre eux se sont dirigés vers le hall des billets et six autres vers les quais. Les figurants étaient incarnés par des policiers en formation.

Arrivée sur les lieux, la force d’intervention rapide (FIR) de la BRI a abattu un des «terroristes», deux se sont enfermés dans une pièce avec des otages et les six autres se sont dirigés vers deux rames de TGV. Il est alors décidé d’engager également le GIGN et le Raid sous le commandement de Jean-Michel Fauvergue, chef du Raid. Ce sont quelque 150 hommes qui, mardi soir, ont donné l’assaut à deux rames de TGV (Raid et GIGN) et la pièce pleine d’otages (BRI).

Le «top assaut» a été donné. Quelques explosions ont retentis dans la gare. Les radios ont crépité. On a annoncé «GIGN un terroriste abattu», «BRI deux terroristes abattus, évacuation des otages», «GIGN dépiégeage en cours», «Raid deux terroristes abattus»… En dix minutes, l’assaut était terminé, les otages libérés sans blessés. L’exercice fini.

 –
Bernard Cazeneuve à la gare Montparnasse avec les forces d’élite françaises. (LP/Jean Nicholas GUILLO.)

Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a dévoilé mardi après-midi le «schéma d’intervention» censé mettre les unités d’élite en ordre de bataille en cas d’attaque d’envergure. L’idée générale est d’améliorer la coopération entre unités et de permettre leur arrivée rapide lors d’une attaque «multisites» comme celle qui a fait 130 morts le 13 novembre à Paris, en faisant fi des rivalités et des compétences territoriales. «Ce nouveau schéma d’intervention n’est pas une rupture par rapport à ce qui se produisait au cours des années précédentes mais un rehaussement, un perfectionnement», a assuré à la presse Bernard Cazeneuve, à l’issue de la simulation.

«La difficulté est qu’au top assaut, les trois forces puissent intervenir en même temps», a expliqué Jean-Marc Falcone, directeur général de la police nationale, pour qui cette mutualisation des forces peut-être considérée comme «un grand pas». «On a franchi un cap incontestablement dans la coordination», approuve son homologue Denis Favier, le patron de la gendarmerie, évoquant «des avancées considérables».


| MAJ :

leparisien.fr

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

1 Commentaire
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Fab

C’est du bon sens, comme pour un incendie. L’utilisation d’un extincteur dans le 5 min fait moins de dégâts que les pompiers aux bout de 20 min.
Dans ce sens il serait judicieux de fournir a la BAC un arsenal plus adapter a ce genre de situation.
Et ainsi de faire passer les terroristes en mode défensif. Permettant ainsi a plus de personne de sortir du piège.
En attendant les spécialistes du RAID et le GIGN. Pour au final faire moins de victimes.
L’idéal serait d’être plus sévère sur la détention d’arme de guerre, et ceux qui en font le trafic.