Dans une courte déclaration à la presse, ce lundi à 10h30, le président de la République a confirmé le décès de Michel Germaneau, l’otage français retenu au Niger puis Mali, au lendemain de la revendication par Al-Quaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Dénonçant un «acte barbare, odieux», Nicolas Sarkozy a parlé «d’un assassinat», et conclu que «le crime commis contre Michel Germaneau ne (resterait) pas impuni».

Nicolas Sarkozy quittait le «conseil restreint de défense et de sécurité» réuni en urgence à l’Elysée pour faire le point sur l’affaire. Pendant cette réunion, un élu malien, sous couvert d’anonymat, affirmait à l’AFP que Michel Germaneau avait été «décapité sous les yeux du chef de l’unité de l’Aqmi qui le détenait». «Il était bien vivant lors du raid, mais caché dans une zone montagneuse dans la région de Kidal, vers la frontière avec l’Algérie».

La France a authentifié la revendication de l’exécution de l’otage faite dimanche par le chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique, ce qui a contribué à établir sa mort, a affirmé dans l’après-midi une source au ministère de la Défense.

Les ravisseurs refusaient tout dialogue

En déplacement au Vietnam, le ministre de la Défense Hervé Morin a indiqué ensuite que la France n’avait pas pu négocier avec les ravisseurs de Michel Germaneau. «Nous n’avons jamais eu de revendications précises. Ils ont même refusé toute discussion pour permettre l’acheminement de médicaments dont Michel Germaneau avait besoin pour ses problèmes cardiaques», a déclaré le ministre sur France Inter.

Revenant sur les conditions du raid mené jeudi – la France avait le «devoir» de le mener pour tenter de sauver Germaneau, a affirmé ce matin le chef de l’Etat – Hervé Morin a semblé catégorique : «Nous sommes face à un groupe totalement déterminé, menant une guerre sainte et qui avait refusé par des moyens directs ou indirects d’engager tout dialogue avec nous».

Michel Germaneau aurait été décapité

Hier, dimanche, le chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) avait annoncé l’exécution de l’otage français, âgé de 78 ans, dans un enregistrement sonore diffusé dimanche soir par la chaîne Al-Jazira. Une réponse, expliquait-il, à la mort de six de ses membres lors d’un raid mauritanien mené jeudi avec le «soutien technique» de la France.

«Nous annonçons avoir exécuté l’otage français dénommé Michel Germaneau samedi 24 juillet pour venger nos six frères tués dans la lâche opération de la France», aux côtés des forces mauritaniennes, a déclaré le chef de l’Aqmi, Abou Moussab Abdelwadoud, dans cet enregistrement.

«Aucune preuve de vie de l’otage» depuis mai

Samedi, une source au ministère français de la Défense avait reconnu n’avoir «aucune preuve de vie» de l’otage, capturé en avril dans le nord du Niger, et avait confirmé que le raid mauritanien mené jeudi contre une unité d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) visait bien à libérer Michel Germaneau.

Dimanche, au Mali, des sources au sein de services de sécurité et de renseignement avaient assuré que l’inquiétude était à son comble sur le sort du Français, impliqué dans l’action humanitaire. «Les nouvelles de Germaneau ne sont pas bonnes», disait l’une d’elles. «On est très inquiet au moment où de folles rumeurs et des informations lugubres circulent sur son sort».

Originaire de Marcoussis (Essonne), cet ingénieur à la retraite, passionné d’Afrique, multipliait les voyages depuis 2006 au nord du Niger pour construire une école dans le village de In-Abangharet, en collaboration avec deux petites associations baptisées Enmilal et Tanemert. Jeudi, des militaires maliens et français ont tenté de le libérer mais il ne se trouvait pas sur le lieu du raid.

Les réactions en France au décès de Michel Germaneau

PARIS (AP) — Voici les principales réactions en France au décès de Michel Germaneau:

– le président de la République Nicolas Sarkozy:

« Je condamne cet acte barbare, cet acte odieux, qui vient de faire une victime innocente qui consacrait son temps à aider les populations locales ». « Ils ont assassiné de sang froid une personne de 78 ans, malade, à qui ils avaient refusé de faire parvenir les médicaments dont elle avait besoin ».

« Depuis le 12 juillet, Michel Germaneau était sous le coup d’un ultimatum qui n’était en fait que l’annonce d’un assassinat programmé ».

« Nous avons accepté que les forces françaises prêtent un soutien à la Mauritanie qui, informée d’une attaque imminente sur son sol d’un groupe terroriste, avait décider de mener contre lui une action préventive ». Le camp « de base du groupe qui a été détruit était susceptible d’être le lieu de détention de Michel Germaneau ». « Convaincus que nous étions que celui-ci était condamné à une mort certaine, nous avions le devoir de mener cette tentative pour l’arracher à ces geôliers ».

« Le crime commis contre Michel Germaneau ne restera pas impuni ».

– la première secrétaire du Parti socialiste Martine Aubry:

« C’est avec une profonde tristesse que j’apprends la mort de Michel Germaneau, exécuté par le réseau Al-Qaïda au Niger. Les conditions effroyables de sa détention et de son exécution devront être éclaircies mais aujourd’hui, nos pensées, tout comme celles de tous nos compatriotes, vont vers ses proches et sa famille. Je leur adresse mes plus sincères condoléances pour cette terrible perte ».

– l’UMP

« L’exécution de Michel Germaneau par l’organisation terroriste d’Al-Qaïda au Maghreb islamiste constitue un acte lâche et barbare. Le Mouvement Populaire considère comme inconcevable qu’un humanitaire engagé au service des plus faibles puisse faire l’objet d’un marchandage politique sordide ».

« L’UMP tient à saluer cependant tous les efforts qui ont été déployés par le président de la République et le gouvernement pour tenter de sauver Michel Germaneau de ses ravisseurs, ainsi que cela a toujours été et sera, pour tous nos ressortissants en danger à l’étranger ».

– Olivier Thomas, le maire de Marcoussis, où vivait Michel Germaneau, sur France-Inter:

« Je ne suis pas contre les interventions militaires mais je me demande comment elle a été préparée. On connaît le savoir-faire des militaires français, donc en général ils préparent bien leurs affaires et ils savent quand ils interviennent où se trouve la cible qu’ils recherchent. Et là, force est de constater que ce n’est pas ce qui s’est produit, donc je me demande qui a pris la décision qu’il y ait cette intervention alors qu’on n’avait pas 99,9% de réussite. C’est ce qui me pose question. Si c’est ce qui a précipité la mort de Michel Germaneau, je trouve ça dramatique ».

– le ministre de la Défense Hervé Morin sur France-Inter:

« La décision (de l’opération militaire menée avec la Mauritanie), elle a été prise après de multiples réunions qui se sont déroulées autour du président de la République, avec le Premier ministre, le ministre des Affaires étrangères, votre serviteur et quelques militaires (…) Cette décision, c’est une décision collective, qui engage le président de la République et le gouvernement dans son ensemble ».

« Cet ultimatum était comparable à celui qui avait valu la mort d’Edwin Dyer qui est un otage britannique qui a été assassiné après un ultimatum de quelques semaines aussi (…) Fallait-il rester les mains ballantes et les bras croisés alors que nous pensions qu’on annonçait la mort de Michel Germaneau? »

– le président de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale Axel Poniatowski:

« L’assassinat de Michel Germaneau, tout comme celui de l’otage britannique en juin 2009 par la même unité d’Al-Qaïda, constitue un acte des plus odieux ». « Afin d’apporter une complète information à cette annonce de grande gravité, je serai reçu, avec les membres du bureau de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale, par le Premier ministre François Fillon, demain mardi ».

– le maire (PS) de Paris Bertrand Delanoë:

« Les responsables de cet acte lâche et abject, où qu’ils se trouvent, ne doivent pas rester impunis. Car le terrorisme met à l’épreuve une certaine idée de la civilisation et de l’humanité. Et je souhaite que, face à ce défi, la France sache affirmer et défendre sans faiblesse ses valeurs, qui sont celles de la liberté ».

– le président (PS) de la région Ile-de-France Jean-Paul Huchon:

« Le lien social a besoin de militants associatifs engagés. Michel Germaneau faisait partie de cette catégorie. C’est ce qui rend sa mort d’autant plus choquante ».

– le Parti communiste français:

Le parti « condamne ce crime injustifiable et sauvage. Le PCF apporte son soutien à la famille et aux proches de Michel Germaneau, cet humanitaire connu et respecté pour son engagement généreux auprès des populations locales.

L’ensemble des pays de la région sahélienne traverse de graves problèmes liés en particulier aux enjeux du développement et de la sécurité. Dix millions de personnes y sont aujourd’hui menacées de famine. La France et ses partenaires européens doivent développer la coopération avec ces pays africains pour les aider réellement à faire face à ces lourds défis ».

– le Parti de Gauche:

« Le Parti de Gauche s’oppose dans les termes les plus absolus à la violence aveugle et abjecte qui est l’apanage du terrorisme. Ce n’est pas un hasard si celle-ci est cette fois tombée sur un homme entièrement consacré à la solidarité avec ses semblables.

Passé le deuil, la lumière devra être faite sur les circonstances de ce drame. Le PG récuse l’opération française conduite dans un pays souverain, le Mali, sans mandat international. (…) Pour l’usage de la force, la France ne devrait jamais agir en dehors de l’ONU. Le droit est la réponse la plus efficace au terrorisme ».

– Nouveau parti anticapitaliste (NPA):

« L’annonce de l’ignoble exécution de l’otage français Michel Germaneau par un groupe se réclamant d’Al-Qaïda marque le fiasco complet de l’opération des forces spéciales françaises, avec l’appui de l’armée mauritanienne, dans le nord du Mali. Le président de la République et le ministre des armées, par leurs agissements irresponsables, portent une lourde responsabilité dans cette issue tragique. D’autant que cette intervention s’est déroulée dans le plus pur style impérialiste. Vraiment: Sarkozy, Fillon, Morin, ces gens-là sont dangereux! »

NDLR – Le NPA a toujours tout compris, Sarkozy, Fillon, Morin, ces gens-là sont dangereux, mais pas Al-Qaïda !

AP

COMPLEMENT D’INFORMATION.

La France voulait en découdre avec Al-Qaida »

Après l’annonce, le 25 juillet, de l’exécution de Michel Germaneau, otage français retenu par le groupe Al-Qaida au Maghreb islamique, la presse africaine fustige l’attitude de Paris. Elle considére que l’opération militaire menée par la France et la Mauritanie le 22 juillet n’a fait qu’empirer la situation.

Le 26 juillet, le président français Nicolas Sarkozy a confirmé la mort de Michel Germaneau, un humanitaire français de 78 ans, qui avait été enlevé au Niger le 19 avril dernier par Al-Qaida au Magheb islamique (AQMI). Ses ravisseurs ont affirmé l’avoir tué samedi 24 juillet, en représailles au raid militaire conduit, au nord du Mali, conjointement par la France et la Mauritanie, qui avait fait six morts parmi les terroristes. Cette opération, menée le 22 juillet, visait à tenter de libérer Michel Germaneau avant l’expiration de l’ultimatum fixé au 26 juillet par l’AQMI.

22 Septembre, un quotidien de Bamako, interprète l’affaire différement. Pour ce journal, Michel Germaneau « a été tué le 22 juillet dans l’opération militaire conduite par Paris, soutenu par l’armée mauritanienne qui lui servait surtout de guide et d’interprète ». Des moyens militaires importants avaient été mobilisés pour cette opération, mais ils n’avaient pas permis la localisation de l’otage. « L’impression qui se dégage, c’est qu’il fallait en découdre avec l’AQMI, même si Germaneau devait y perdre la vie », ajoute 22 Septembre. Le quotidien insinue que Paris était peut-être convaincu de son décès, avant même le lancement de l’opération, en raison de la santé précaire de l’otage – qui, cardiaque, n’avait plus de médicaments.

Pour L’Indépendant de Bamako, le raid français s’est terminé en désastre. Non seulement l’otage n’a pu être libéré, mais au moins six terroristes auraient été tués et plusieurs autres faits prisonniers, or « le pire était à craindre de la part de l’AQMI en termes de représailles ». Selon ce journal, l’échec du raid a provoqué l’incompréhension de Madrid vis-à-vis de la France, qui ne l’avait pas consulté. Or deux otages espagnols sont encore aux mains de l’AQMI et leur sort « ne tient plus qu’à un fil », ajoute L’Indépendant.

La maladresse de l’opération représente également « une humiliation pour le Mali, dont le gouvernement n’a probablement pas été informé et dont les troupes n’ont pas participé à l’opération », déplore le quotidien malien Le Républicain qui y voit un signe d’isolement ou de manque de confiance. « Peut-être parce que la Mauritanie serait plus déterminée que le Mali à lutter contre Al-Qaida » ? interpelle-t-il.

Le quotidien burkinabé Le Pays est moins sévère vis-à-vis de la France. Selon lui, l’opération redonne un peu d’espoir, car, malgré la mort de l’otage français, « l’AQMI n’est plus aussi insaisissable qu’elle le paraissait. Une de ses bases a bel et bien été identifiée. L’assaut militaire a réussi à la nettoyer de ses terroristes ».

26.07.2010?|?Anne Collet?|?Courrier international

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