Medinat Israël ou Malkhout Israël? La guerre de Gaza et les choix identitaires d’Israël par Pierre Lurçat

La situation dramatique dans laquelle les occupants actuels de la bande de Gaza entraînent régulièrement l’Etat d’Israël, depuis le jour funeste où l’armée et la police israéliennes, transformées en bras destructeurs d’un pouvoir corrompu et aveugle, ont expulsé les pionniers du Goush Katif, nous oblige à réfléchir sur le sens des événements que nous vivons aujourd’hui. Il n’est pas anodin que ce nouveau round d’affrontements (ou plutôt, cette nouvelle attaque suivie d’une riposte) survienne précisément entre Yom haShoah et Yom Ha’atsmaout, dans cette semaine chargée de symboles et lourde de significations de “beyn ha-Tsefirot” : entre la sonnerie de Yom haShoah et celle de Yom ha-Zikaron.

Comme le dit un récent adage, “Nous avons deux journées du souvenir des morts en Israël : une qui nous rappelle le prix à payer pour avoir un Etat, et l’autre pour nous rappeler le prix à payer pour ne pas en avoir”. Ces deux journées sont, évidemment, la Journée du Souvenir des soldats (Yom Hazikaron) et le Jour de la Shoah (Yom HaShoah).

Mais le lien qui unit ces deux journées n’est pas seulement chronologique : il s’agit en réalité d’une relation de causalité, ou plutôt d’un choix ontologique entre deux modalités d’être pour le peuple Juif. Ce choix peut être formulé ainsi : soit assumer le prix de l’existence étatique, soit redevenir le peuple victime des pogromes et de la Shoah.

Maison de Beer-Sheva détruite par un missile tiré de Gaza (photo Eliyahu Hershkovitz)

Les théoriciens du sionisme et les pères fondateurs de l’Etat juif avaient bien compris qu’il n’existait pas d’autre alternative.

C’est la raison pour laquelle plusieurs d’entre eux – Theodor Herzl, Max Nordau et Zeev Jabotinsky – avaient eu la prescience de la Shoah. Ils avaient en effet pressenti que celle-ci n’était pas un accident de l’histoire ou un événement monstrueux et absurde, mais l’aboutissement logique de l’existence galoutique.

Et ils en avaient tiré la conséquence ultime : à savoir, la nécessité impérieuse de retrouver notre indépendance nationale. Or, cette leçon de l’histoire juive, évidente à l’époque, est en train de d’estomper dans la confusion morale et intellectuelle de notre époque.

Comme l’écrivait ce shabbat Ran Baratz, dans les colonnes de Makor Rishon, non seulement cette leçon cruciale de la Shoah est aujourd’hui oubliée, mais elle est remplacée par une leçon inverse et scandaleuse.

Aux yeux d’une frange non négligeable des élites culturelles et politiques actuelles, la “leçon” de la Shoah est en effet qu’Israël devrait appliquer des normes morales plus élevées que les autres nations face à des ennemis barbares et inhumains, sous peine de voir Tsahal devenir pareil à la Wehrmacht… C’est bien cette équation que nous voyons actuellement appliquée, dans les commentaires des grands médias israéliens et jusque dans le “code éthique” de Tsahal (1).

La synagogue de Névé Dekalim, détruite après le retrait de Gaza

Comme l’écrivait Yoav Shorek il y a quelques mois (2), “lorsqu’un idiot jette une pierre au fonds du puits, plusieurs sages ne suffisent pas à la retirer”. La métaphore est parlante : le puits, c’est Gaza et la pierre, c’est le Hamas, arrivé au pouvoir à la suite du retrait israélien – la “Hitnatkout” – dont Israël ne finit pas de payer les conséquences désastreuses. Si l’histoire nous a pourtant appris une chose, depuis 1948, c’est qu’il n’est pas possible de laisser la souveraineté à une quelconque entité autre qu’Israël, entre la Mer et le Jourdain. Toutes les tentatives faites en ce sens – dans un cadre bilatéral (accords d’Oslo), multilatéral (résolution de l’ONU sur l’internationalisation de Jérusalem) ou unilatéral (retrait de la bande de Gaza) – se sont soldées par un cuisant échec. Lire la suite

Source: vudejerusalem.over-blog.com

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