Lekh Lekha: Faire le premier pas

La sidra s’inscrit dans une dynamique qui illustre à la fois le personnage du patriarche du peuple juif en devenir mais le père spirituel des religions « monothéistes », et, qui dans sa volonté de progresser, d’enseigner et de faire évoluer les masses fut en quelque sorte le précurseur du mot d’ordre « OUFARATSTA » (diffuser, rayonner) en diffusant le concept innovant à l’époque d’un Dieu unique, sans représentation graphique ou autre.

Dès la fin de la péricope consacrée à Noé, nous sommes spectateurs d’une aventure folle qui se développe en Chaldée. C’est dans cette contrée qui est le berceau de la civilisation mésopotamienne, à l’époque, qu’Hamourabi y conçoit son « code », et, cette région est un nid privilégié d’idolâtrie.

Or, le père d’Abram, a bâti toute sa « parnassa » sur l’exploitation de ce culte idolâtre. Térah, père d’Abram, est un homme qui décide, pourtant, de quitter la Chaldée après qu’Abram eût, miraculeusement, échappé à la fournaise. Abram ne part pas tout seul : il est accompagné de sa famille (son épouse, son neveu et son père).

Ce convoi se dirige donc vers le pays de , abandonnant la Chaldée, dont ils étaient originaires, mais, en chemin, Térah opère un retour sur lui-même et décide de revenir sur ses pas.

C’est alors que D. éprouve une fois de plus la conviction d’Abram : לך-לך « vas pour toi » traduit-on généralement mais, en fait, il s’agit plutôt d’un encouragement, et pas seulement d’un ordre : D. fait comprendre à celui qui va avoir l’immense privilège de discuter pied à pied avec Lui  que LE moment est venu : le moment de tourner le dos à l’impureté de l’idolâtrie, à la faiblesse de Térah, à cette région, à cette civilisation, et, le moment est arrivé de fonder la nation juive sur une terre juive, sur ce pays de Canaân qui n’est autre que le pays des Hébreux comme en témoigne le texte biblique en plusieurs endroits, ainsi, par exemple, nous le verrons plus tard, lorsque Joseph se présente à Pharaon et lui déclare avoir été enlevé du pays des Hébreux (Genèse XXXX, 15).

Néanmoins, Canaân est rempli d’idoles. Comment expliquer, alors, qu’Abram réussira à faire des émules au monothéisme tout comme il en fit à Ur ? C’est, disent nos Sages, parce que les Cananéens sont plus souples que les Araméens.

D’autre part, il semble étrange qu’ HaShem ordonne à Abram de partir de chez lui alors que justement, quelques versets avant nous avons lu que Térah était parti de chez lui en emmenant avec lui toute sa famille, les mots LEKH LEKHA viennent donc souligner l’importance de l’acte que va accomplir Abram, il est déjà parti d’ Our Kasdim alors pourquoi D. lui dit-Il de partir de son pays de naissance et, en fait Our Kasdim est-elle vraiment son lieu de naissance ?

Abram se trouve à Haran lorsque D. demande à Abram de quitter sa ville de naissance c’est donc que le patriarche est né à Haran ! Ce lieu est celui des Araméens ou celui des gens trompeurs (en inversant les lettres de arami (araméen) on obtient ramai (trompeur). Et, c’est vers Haran que le patriarche se tournera plus tard pour chercher une épouse pour son fils Isaac….

Le but divin est donc pour Abram de quitter ce lieu où il n’y a pas de source de pureté et de sanctification possible, bien qu’à diverses occasions, HaShem fera sortir la Sainteté et la Pureté d’un nid d’impureté.

Le premier hébreu nommé explicitement comme nous le verrons dans le courant de cette parasha (lorsque dans Bereshit XIV, 13 Abram est désigné comme Abram HaIvri) est Abram, cet homme qui a franchi la frontière qui sépare l’impureté de la sainteté et donc la Chaldée, ce qui sera Babylone, vers le pays de Canaân qui est devenu le pays d’Israël.

Cette séparation d’avec Térah sera suivie de la séparation d’avec Loth, le neveu d’Abram. Loth qui fera l’inverse d’Abram puisqu’il va revenir en arrière : au lieu d’aller et de continuer à aller de l’avant et de progresser dans le chemin que lui a montré le futur patriarche, Loth va revenir en arrière vers le pays d’avant : il se tourne vers kedem c’est-à-dire non pas seulement vers l’orient mais encore vers la culture de la civilisation de laquelle il ne s’est pas séparé.

La lutte qui existe entre Abram et Loth est celle du bien contre le mal. Abram, par vision prophétique verra que de Loth viendra le Messie (l’une des deux filles de Loth étant la mère de Moav d’où est issue Ruth, « grand-mère » du Mashiah. Kedem qui désigne l’Orient fait allusion à une régression. La dynamique d’Abram n’a pas été adoptée par Loth.

Il régresse, il revient en arrière. Mieux encore : lorsque Loth voit une région luxuriante en ce lieu qu’est Tzoar, il y a là un message que Loth n’a su déchiffrer en effet Tzoar s’écrit en hébreu tsadik-ayin-resh qui est la racine tzaar : chagrin cette région n’est-elle pas celle qui fut le théâtre de tant d’événements tragiques pour Loth et sa famille (la guerre des 5 rois contre les 4 autres rois, l’enlèvement de Loth, la destruction de Sodome et Gomorrhe, la salinisation d’Edith épouse de Loth, la cohabitation des deux filles de Loth avec leur père).

Les quatre rois qu’Abram vainct dans la sidra sont : Amrafel, Ariokh, Kedarlaomer et Tidal. D’après la tradition Amrafel, Hamourabi et/ou Nimrod sont un seul et même roi. Ils représentent les 4 empires qui vont asservir Israël au cours de l’Histoire ainsi que le décrit le Maharal de Prague : Babel, Parass, Yavane et Roma = Babylone, Perse, Grèce et Rome. C’est-à-dire le « bloc » d’Ismaël et le bloc d’Essav ou Edom, nos frères et ennemis de toujours.

Abram est donc parti de Haran avec « les âmes qu’il a faites ». Abram a enseigné le monothéisme à tous ceux qui l’entouraient et au sujet desquelles la Torah précise qu’il les a « faites » c’est-à-dire qu’il les a formées aux normes du judaïsme et non seulement il les a formées mais souligne bien le texte : il les a « élevées » car en abandonnant l’idolâtrie pour devenir les serviteurs du D. Un ils ont élevé leurs âmes et leurs instincts vers la sainteté. C’est également en ce sens qu’Abram a eu le mérite d’être Abram HAIVRI car il est demeuré « à part », il a dépassé les autres et il est donc passé « méêver » au-delà.

Entre autres épreuves, Abram qui est le premier à quitter son lieu de naissance pour prendre possession du pays de Canaân, doit subir la famine et se mesurer avec un premier « exil ».

La famine, (רעב, raâv en hébreu) est un mot composé des mêmes lettres que le mot êver (ivri) רעב עבר/עברי. Rashi commente cet événement de la façon suivante : D. a voulu imposer cette famine à Abram qui, à peine arrivé en Canaân s’est vu dans l’obligation de s’éloigner de ce pays pour aller en Egypte trouver de la nourriture et pouvoir constater alors si Abram se révolterait et repartirait vers son pays d’origine. Le thème de la famine est souvent exposé dans la Bible. Et, il est utilisé toujours pour pouvoir éprouver les protagonistes.

Demeurant encore sans enfant, Abram, sur les recommandations de Saraï, devient père d’Ismaël en prenant Hagar pour concubine mais, ce n’est qu’après ceci qu’HaShem ajoute la lettre HE aux noms d’Abram et de Saraï qui deviendront les parents d’Isaac. La lettre HE qui est le symbole du D Créateur et de Miséricorde.

Cette sidra est particulièrement riche en événements mais surtout en précisions historiques : en effet, lorsqu’Abram arrive dans la plaine près de Sichem/Naplouse (Shkhem en hébreu) et qu’il y construit deux autels dont un près de Shkhem et l’autre près de Beith El, puis il est attiré par la Jérusalem d’alors, qu’aucun peuple n’avait la dévotion et aux sacrifices pour l’Éternel s’était installé…

Un peu plus tard, lorsque l’alliance est conclue (Brith beyn habetarim : alliance des morceaux) et que sont énoncés les peuples existants à l’époque n’apparaissent que les 7 peuples qu’HaShem a dépossédé de leurs territoires au profit d’Abraham et de la descendance qu’il eut véritablement de son épouse et non pas de sa concubine. Ces 7 peuples sont les Cananéens, les Hétéens, les Hévéens, les Guirgashéens, les Emoréens, les Péréséens, les Jébuséens…..

Caroline Elishéva REBOUH

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