L’utilisation des termes et concepts détournés de l’histoire de la Shoah pour attaquer et délégitimer l’action d’Israël est omniprésente. Israël a été traité de “néo-nazi génocidaire” par des personnalités aussi diverses que le président turc Tayyip Erdogan ou le secrétaire général adjoint du Congrès national africain, Jessie Duarte. Dans toute l’Europe, lors de manifestations de soutien aux Palestiniens, des pancartes et des slogans appelaient à la mort des Juifs : “Les Juifs au gaz” ou “Hitler n’a pas fini le travail”. Sur Facebook et Twitter, ces slogans ont atteint des millions de personnes.

 

Dans la presse, Israël fut, non seulement, accusé de génocide, mais déjà jugé et reconnu coupable. Ces accusations, surtout en Europe, permettent de soulager le sentiment de culpabilité des États face à leur attitude pendant la Shoah.n véritable raz de marée antisémite récupérant de façon abusive l’histoire et les symboles de la Shoah ; c’est peut-être ce qui caractérise le mieux les réactions qui ont fait suite au déclenchement de l’opération “Bordure protectrice” sur Gaza.

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Par le passé, les opérations de défense menées par Israël avaient déjà donné lieu à de pareils amalgames. Mais cet été, l’ampleur et la radicalité de ce phénomène ont atteint de nouvelles proportions. Les spécialistes de l’antisémitisme sont tous d’accord pour affirmer que le conflit israélo-palestinien n’est pas la source profonde des vagues d’antisémitisme mais un catalyseur qui déclenche l’antisémitisme. Depuis l’an 2000, une constellation antisémite recouvrant un spectre très large de motivations et de groupuscules se retrouve dans une même rhétorique de haine contre les Juifs. Cette situation n’a jamais été aussi claire qu’au cours de l’opération “Bordure protectrice” de cet été.

The curved ceiling of the Hall of Names is pictured during a visit by U.S. President Barack Obama at the Yad Vashem Holocaust Memorial in Jerusalem

Au centre de cette vague d’antisémitisme se trouve un phénomène de diabolisation. La diabolisation des Juifs est une longue histoire… Dès les premiers temps du christianisme et la période médiévale, les Juifs sont associés au diable. La diabolisation se retrouve dans l’antisémitisme moderne du XIXe siècle, notamment lorsque Heinrich von Treitschke affirme : « les Juifs sont notre malheur ». Pour les nazis, les Juifs sont devenus l’ennemi absolu responsable de tous les maux de la planète en raison de leur racea. La propagande accusant les Juifs d’être les initiateurs des crimes de Staline participe également de cette diabolisation. Au cours des dernières années, c’est la diabolisation de l’État d’Israël, accusé de crime de guerre et crime contre l’humanité, qui a pris le relais. Lors de cette nouvelle vague d’antisémitisme, les Juifs du monde, individuellement, ont été directement confondus avec Israël et ont été victimes d’agressions verbales et physiques à New York comme à Paris et dans de nombreuses autres villes.

Certains ont pu suggérer que la situation actuelle ressemble à la nuit de Cristal de 1938 ou à la veille de la Seconde Guerre mondiale en 1939. Néanmoins, il ne faut pas oublier que l’Allemagne nazie présentait un antisémitisme d’État alors que les gouvernements d’Europe et d’Amérique, même s’ils ne peuvent entièrement endiguer cette vague, condamnent l’antisémitisme.

Tout au long de la campagne militaire menée contre la bande de Gaza, les plates formes de discussions et les réseaux sociaux de Yad Vashem ont été inondés de commentaires antisémites et d’incitations à la haine contre les Juifs. Yad Vashem a publié de nombreux communiqués, énergiques mais mesurés, dénonçant les manipulations de la Shoah à des fins antisémites. Ces articles et ces argumentaires ont été lus par des milliers d’internautes. Yad Vashem fait donc face également à ce raz de marée d’antisémitisme qui nécessite une pédagogie efficace et innovante afin de relever le défi de la manipulation antisémite de la Shoah ; un phénomène qui prend des proportions endémiques depuis le début du XXIe siècle.

Dr. Robert Rozett*

Extrait de : Yad Vashem • Le lien francophone, Décembre 2014-Janvier 2015, n° 49

* L’auteur est Directeur de la Bibliothèque de Yad Vashem.

a • Vocable qui a prévalu tout au long du XIXe siècle et une grande partie du XXe, encore fréquemment en cours aujourd’hui.

 

ψ  [Psi] • LE TEMPS DU NON
cela ne va pas sans dire
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