Les enjeux du sommet Poutine-Netanyahu en Syrie

Analyse : Les Israéliens ont donné un ultimatum clair à la Syrie : une force militaire pénétrant dans la zone tampon de Quneitra sera détruite. La Russie s’est engagée auprès d’Israël à maintenir les forces iraniennes à 100 km de la frontière, tandis que les Etats-Unis tiennent Israël en laisse alors que Tsahal se prépare à se jeter sur l’armée syrienne dès que le Kremlin lui permet d’aller trop loin.

Israël a donné aux Syriens un ultimatum clair concernant la poursuite de la prise du Golan syrien par le régime du président Bashar Assad. Toute force militaire qui rompt l’accord de désengagement de 1974 et pénètre dans la «zone tampon» démilitarisée sera détruite.

Cette menace israélienne, qui a été livrée aux Syriens plus d’une fois, sera mise à l’épreuve dans les prochains jours. L’armée syrienne – conformément aux accords conclus entre elle et les forces rebelles grâce à la médiation russe – entrera dans Quneitra, et Israël en est informé, afin de restaurer sa souveraineté dans la région.

Selon l’Accord sur la séparation des forces, Quneitra, qui est située à trois kilomètres de la frontière, est une zone tampon où la présence de personnel militaire et d’armes est interdite.

 (Photo: AP)

(Photo: AP)

L’armée syrienne va-t-elle respecter les règles et s’abstenir d’entrer dans Quneitra avec des forces armées? Le renforcement public des forces de Tsahal sur les hauteurs du Golan la semaine dernière avait pour but de rappeler aux Syriens ce qui se passerait s’ils violaient l’accord et pénétraient dans la zone tampon.

Ordre de mission

Les États-Unis trouvent l’ultimatum israélien acceptable. C’est l’une des questions soulevées lors de la rencontre entre le chef d’état-major de Tsahal, Gadi Eisenkot, et son homologue américain, le général Joseph Dunford, à Washington la semaine dernière. Au cours des trois dernières semaines, alors que l’armée syrienne se battait dans le sud du Golan, les Syriens ont respecté les règles et se sont abstenus d’entrer à Quneitra.

Les Syriens ont également montré le plus grand soin ou une certaine ruse à permettre aux forces de l’axe iranien de se joindre aux combats, uniquement sous uniforme syrien. [NDLR : selon les auteurs, on obtient deux versions différentes, quant au « peu » de forces pro-iraniennes dans la zone, ou au contraire, l’afflux de nouvelles colonnes chiites].

Il leur a été précisé que même si quelques conseillers iraniens étaient déployés dans la zone de combat, Israël considérerait cela comme une occasion suffisante pour ouvrir le feu, car ces conseillers pourraient rester en permanence en Syrie, sans parler des milices pro-iraniennes et des forces terroristes du Hezbollah.

Si c’était en effet Israël qui était à l’origine de l’explosion d’un dépôt de munitions cette semaine (le 3 juillet) appartenant à des milices pro-iraniennes dans le sud du plateau du Golan (à Dera’a), c’était une déclaration d’intention qui démontrait la gravité de l’ultimatum.

Aérodrome T-4

Aérodrome T-4

De plus, les Syriens comprennent que la Russie n’empêchera pas Israël d’exercer son droit de faire respecter les accords de désengagement par la force. Dans leurs discussions avec le Premier ministre Netanyahu, le ministre de la Défense Lieberman et Eisenkot, les Russes ne donnent pas explicitement leur feu vert à Israël, mais ils le font concrètement sur le champ de bataille. Par conséquent, les États-Unis et la Russie n’empêcheront pas Israël d’utiliser la force au plus profond de la Syrie, ou à moins de 25 kilomètres de la frontière israélienne.

Il s’agit d’une bande qui comprend la zone tampon, dont la largeur varie de quelques mètres à 13 kilomètres dans le nord du plateau du Golan, et trois zones où les restrictions sur le stationnement des forces autorisées varient.

C’est beaucoup plus compliqué pour les Russes que pour les Américains, car ce sont les Russes qui ont reconstruit les forces terrestres syriennes et formulé les plans opérationnels de l’armée syrienne. De manière informelle, les Russes commandent même ces opérations. Il n’est pas étonnant que ces généraux se rendent à Moscou pour se plaindre d’Israël.

Mais c’est en Russie qu’ils rencontrent les visages inexpressifs de Poutine et du ministre de la Défense Sergei Shoygu. Les restrictions imposées par Moscou à ses commandants en Syrie font partie d’un jeu politicien cynique joué aux dépens des soldats sur le terrain. Depuis son entrée en Syrie, l’armée de l’air russe a perdu 19 avions et 60 militaires, dont la plupart sont des membres d’équipage, et des dizaines de militaires russes et de volontaires dans la guerre au sol.

L’armée russe se bat, paie en vies humaines, mais quand il s’agit d’Israël, les généraux sentent qu’ils ont les mains liées.

Ce Mercredi, Netanyahu arrivera à nouveau à Moscou. Selon des sources russes, le Premier ministre tentera d’influencer les positions du Kremlin sur la question syrienne, avant le sommet entre Poutine-Trump du 16 juillet.

Les Américains ont promis à Israël qu’ils exigeraient le retrait de toutes les forces iraniennes de Syrie au sommet. Les Russes n’acceptent pas cette demande. Ils parlent de la présence continue de l’Iran en Syrie, mais ils ont promis à Lieberman et à Eisenkot de maintenir les Iraniens à une centaine de kilomètres de la frontière israélienne. Jusqu’ici, cet engagement n’a été que très partiellement réalisé, voire pas du tout (voir : la milice chiite Liwa Abou Al Fadl Al Abass, présente aux côtés des Syriens et des Russes, à 27 km de la frontière).

On ne sait pas combien de temps Trump et Poutine vont passer à discuter de la question syrienne, quand d’autres crises mondiales s’accumulent sur leurs bureaux.

Depuis des mois, Israël court entre la Maison-Blanche et le Kremlin, pour tenter de concevoir un plan qui les aidera à parvenir à un accord concernant les forces iraniennes en Syrie. Il est clair, pour Israël, que la position russe en la matière est le résultat direct de l’affrontement entre la Russie et les Etats-Unis concernant d’autres questions internationales telles que la Corée du Nord, l’Europe, la Chine, l’Ukraine, etc.

Selon l’agence de presse russe RIA, Netanyahou et Poutine discuteront également de l’attaque syrienne prévue dans le district de Quneitra, où la Russie devra encadrer et restreindre son Etat client de manière beaucoup plus résolue, car les attaques aériennes et d’artillerie dans cette région serait un véritable défi pour Ultimatum israélien, beaucoup plus que ce qu’il ne le serait à Daraa.

Sans parler de la situation dans laquelle l’armée syrienne tente de mener une manœuvre au sol près de la zone tampon. Il est clair pour les Syriens que toute «erreur de navigation» sera confrontée aux tirs israéliens, mais que fera Israël si l’armée syrienne tire des obus d »artillerie contre les centres de réfugiés situés à seulement quelques kilomètres de la frontière?

Un jeu qui se joue entre les Russes et les Américains

Entre-temps, l’attaque syrienne dans le sud du Golan, à 30 kilomètres de la frontière israélienne, a été la plus proche de la zone tampon lorsque l’artillerie syrienne a frappé une ville située à 12 kilomètres de la frontière. Les forces syriennes se sont dirigées vers la capitale du district de Daraa e empruntant deux axes, nord et est, afin de l’encercler.

Le conflit sérieux avec les rebelles à Daraa n’a pas encore commencé. Il aura lieu dans les cinq plus grandes villes de la province. L’occupation du district de Daraa pourrait durer des semaines, et il y a toujours une chance que le feu se propage à Israël et enflamme les relations entre l’armée israélienne et l’armée syrienne.

 (Photo: Bureau du porte-parole de Tsahal)

(Photo: Bureau du porte-parole de Tsahal)

En outre, la 9e Division syrienne stationnée à Al-Sanamayn, dans le sud du pays, responsable de la section syrienne des hauteurs du Golan, est prête à prendre Quneitra soit par un accord, soit par la guerre. Il est parfaitement raisonnable de supposer que les mentors russes escorteront la division pour s’assurer qu’elle ne se trouve pas mêlée à un conflit avec Israël.

L’administration américaine a émis, au cours des derniers jours, à la fois aux Russes et aux Syriens, au moins trois avertissements liés à l’attaque syrienne contre Daraa. L’attaque, a t-il été clairement indiqué, aura de sérieuses conséquences sur la conduite de l’Amérique en Syrie et sur les relations entre Washington et Moscou.

Les Russes vont essayer de se rendre à ce sommet avec le maximum de succès sur le terrain syrien qu’ils puissent utiliser comme monnaie d’échange à Helsinki. Les Américains apporteront également leurs propres jetons à la table, à commencer par le refus de fermer leur base militaire Al-Tanf (tant que les Iraniens ne refluent pas), leur intention de construire dans la région une barrière frontalière entre la Syrie et l’Irak, et de continuer à fournir un soutien aux forces kurdes en Syrie en utilisant 2000 membres des forces spéciales qui resteront dans le nord-est de la Syrie pour encore un an et demi au moins. Mais la carte la plus forte entre les mains des Américains est le soutien qu’ils apportent à Israël pour agir en Syrie. Israël, comme la Syrie, n’est juste qu’un autre pion sur le tableau global qu’agencent les puissances mondiales.

Alex Fishman | Publié: 07.10.18, 23:58

Première publication le: 07.10.18, 23:5

ynetnews.com

Adaptation : Marc Brzustowski

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marman68

Le Hamas a déclaré la guerre à Israël, et maintenant le Hamas se plaint parce qu’ils ont trop de mort, alors dans ce cas là il ne fallait pas leur déclare la guerre, c’est tout simple, et si les russes combattent Israël, c’est aussi pour avoir une part du gâteux de leurs richesses . Gaz, pétrole, or, ect… ect…. D’autres part ils ont raisons de ne pas accepter les réfugiés en Israël, parce que trop de terroristes se cachent parmi les réfugiés