Les élections norvégiennes, Israël et les Juifs©

Des affiches et des T-shirts représentant Dalal Mughrabi, une terroriste du Fatah responsable du massacre de la route côtière en 1978, qui a tué 38 Israéliens dont 13 enfants, pendant une manifestation à Ramallah, le 16 juillet 2008. Cette année, la Norvège a réclamé les fonds alloués à un centre portant le nom de cette terroriste (Crédit : Issam Rimawi/Flash90)

Les élections norvégiennes, Israël et les Juifs

 

L’évolution en cours en Norvège est, au mieux partiellement analysée ou même observée mais, seulement de loin, à l’étranger. C’est aussi vrai en Israël, en dépit du fait que la Norvège s’est avérée être le pays d’Europe le plus problématique pour l’Etat Juif, entre 2005 et 2013. Sous l’égide du gouvernement d’alors, conduit par le dirigeant du Parti Travailliste Jens Stoltenberg, les attitudes antisionistes ont fleuri[1]. Il y a aussi eu des expressions extrêmes d’antisémitisme, y compris des coups de feu tirés par un Musulman contre la seule et unique synagogue d’Oslo. En 2012, l’écrivain norvégienne très connue Hanne Nabintu Herland, a désigné la Norvège comme étant le « pays le plus antisémite[2] ».

Hanne Nabintu Herland

L’actuelle Première Ministre, Erna Solberg, cheffe du Parti Conservateur (Hoyre) et trois autres partis de coalition potentielle ont, de manière inattendue, gagné les élections du 11 septembre, en obtenant 89 des 170 sièges. Forger une volonté de gouvernement n’est, cependant, pas chose aisée. Le Parti Démocrate Chrétien,en tant qu’allié de Solberg, qui a à peine dépassé le seuil d’entrée au Parlement, fixé à 4%, est opposé au fait que le Parti du Progrès anti-Islam puisse continuer à siéger au sein d’un gouvernement.

Il y a quelques mois, les sondages indiquaient que le Parti Travailliste et ses alliés retourneraient au pouvoir. Dans ce cas, le dirigeant travailliste, Jonas Gahr Støre, serait devenu Premier Ministre. Si cela s’était produit, il est probable que la Norvège aurait, tôt ou tard, rejoint la Suède, dans sa reconnaissance d’un gouvernement de l’Autorité Palestinienne qui ne contrôle qu’une partie des territoires palestiniens.

En 2011, Anders Breivik a assassiné 77 personnes, principalement des jeunes du Parti Travailliste. Stoltenberg a proclamé dans la foulée que la Norvège, en dépit de cela, n’en deviendrait qu’une démocratie encore plus ouverte. En réalité, les dissidents qui s’opposaient fortement aux règles imposées par les Sociaux-Démocrates, ont été encore plus ostracisés qu’auparavant.

Après sa défaite de 2013, Stoltenberg est devenu Secrétaire-Général de l’OTAN. En tant que Premier Ministre, il n’était pas, lui-même, tant que cela un incitateur antisioniste qu’il n’a été particulièrement tolérant envers une telle incitation, de la part de son parti et de ses alliés. Lors de plusieurs événements où il s’est exprimé, on a constaté des attaques verbales brutales contre Israël, alors que lui-même gardait un silence complice. En ne faisant pas face à ces attaques pour les contrer, il y a consenti.

L’anti-israélisme de Støre a atteint des sommets vertigineux, quand il a rédigé le commentaire de quatrième de couverture légitimant un livre rédigé par deux partisans norvégiens du Hamas, Mads Gilbert et Erik Fosse. Ecrivant sur la campagne militaire « Plomb Durci » de 2009, dans Øyne i Gaza (Des Yeux à Gaza), ils prétendaient qu’Israël était entré dans la bande de Gaza, en 2009, « à la cosaque », pour y massacrer femmes et enfants.

Støre a toujours joué sur les deux tableaux. En janvier 2009, les pires émeutes antisémites jamais menées dans le pays se sont déroulées à Oslo. Les Musulmans ont attaqué les manifestants pro-israéliens à coups de projectiles potentiellement meurtriers. Støre a, ensuite, rendu un visite compassionnelle la synagogue d’Oslo pour exprimer sa solidarité avec la communauté juive.

En 2012, une étude a été publiée part le Centre Norvégien d’Etudes sur la Shoah et les minorités religieuses. Il a été financé par le gouvernement. L’étude démontrait que 38% de Norvégiens pensent qu’Israël agit envers les Palestiniens comme les Nazis se sont comportés envers les Juifs[3]. Quand Shimon Peres, alors Président d’Israël, s’est rendu en visite en Norvège, en 2014, il a déclaré, de manière complètement absurde et obséquieuse : « La Norvège est la perle de l’humanité, fondée sur les valeurs humaines et elle cherche à rendre les peuples égaux et libres[4]« .

Au cours les années de gouvernement Solberg, l’anti-israélisme extrémiste, notamment parmi les organisations de la gauche norvégienne, est loin d’avoir pris fin. Au contraire, le vaste syndicat LO, qui est la force majoritaire derrière le Parti Travailliste, s’est prononcé pour un boycott total d’Israël[5]. En 2014, l’organisation de la jeunesse chrétienne YMCA-YWCA a voté en faveur du boycott des produits et services provenant des territoires[6]. Le doyen d’Oslo a, cependant, rejeté ce boycott[7].

On sous-estime souvent l’importance de la Norvège, parce que ce pays n’est pas membre de l’Union Européenne et n’a qu’environ 5 millions d’habitants. Pourtant, ses énormes revenus liés au gaz et au pétrole lui permettent de faire des dons importants à l’étranger, notamment à la cause palestinienne. Les gouvernements travaillistes ont fait un usage immodéré de cette manne financière et le gouvernement Solberg a poursuivi les donations.

Cependant, en mai de cette année (2017), la Norvège a réclamé le remboursement des financements qu’elle avait offert à un Centre dédié aux femmes dans le village arabe de Buraq, à l’ouest du Jourdain[8]. On a, en effet, appris que le centre prévu dans ce village avait pris le nom de Dalal Mughrabi, qui dirigeait, en 1978, le massacre qui a laissé pour morts 37 civils israéliens, dont beaucoup (13) étaient des enfants et blessé des dizaines d’autres personnes innocentes.

Une récente étude de Jonas Duc Enstad du Centre d’Etudes sur l’Extrémisme, à l’Université d’Oslo, a déclaré qu’il semble que « les pires incidents antisémites en Norvège sont provoqués par les Arabes et les radicaux de l’ultra-gauche[9]« .

Alors que le gouvernement suédois est actuellement le principal incitateur anti-israélien d’Europe, il est intéressant de noter qu’avant les élections, la Ministre norvégienne de l’intégration et de l’immigration, Sylvi Listhaug, du Parti du Progrès, avait mis en garde contre l’éventualité que la Norvège ne laisse dégénérer des « conditions à la suédoise ». Le Financial Times écrivait alors : « C’est un nom de code pour désigner la guerre des gangs, des fusillades, des voitures brûlées et d’autres problèmes « d’intégration » récurrents que la Suède ne cesse de subir tous ces derniers temps, dans les banlieues de ses trois villes principales : Stockholm, Gothenburg et Malmö.”[10] On peut aussi rappeler que Malmö est considérée par de très nombreux experts comme la capitale européenne de l’Antisémitisme.

Listhaug s’est aussi rendue à Stockholm peu de temps avant les élections, où elle a visité le quartier de banlieue extrêmement violent de Rinkeby. Elle a, en outre, déclaré qu’il y a plus de 60 zones de non-droit en Suède. La Suède, avec ses 10 millions de citoyens est le pays scandinave dominant, ce qui fait que les Suédois regardent les Norvégiens avec condescendance. Cette critique inhabituelle de la part d’une Norvégienne a frappé la Suède comme un coup de poing en-dessous de la ceinture, d’autant plus que c’était largement véridique et vérifié.

Si Solberg parvient à gouverner les quatre ans prévus de son mandat, cela peut permettre à Israël d’améliorer encore les relations avec la Norvège et mieux contre-attaquer ses ennemis d’extrême-gauche qui y résident et y prospèrent.

Par Manfred Gerstenfeld

Le Dr. Manfred Gerstenfeld a présidé pendant 12 ans le Conseil d’Administration du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem (2000-2012). Il a publié plus de 20 ouvrages. Plusieurs d’entre eux traitent d’anti-israélisme et d’antisémitisme.

Adaptation : Marc Brzustowski.

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[1] http://sicsa.huji.ac.il/sites/default/files/sicsa/files/acta37.pdf

[2] www.timesofisrael.com/at-jerusalem-panel-norwegians-spar-over-israel-and-anti-semitism/

[3] Christhard Hoffmann, Øivind Kopperud, Vibeke Moe, et.al., “Antisemittisme i Norge? Den norske befolkningens holdninger til jøder og andre minoriteter,” Center for Studies of the Holocaust and Religious Minorities, May 2012.

[4] /www.jpost.com/Diplomacy-and-Politics/Norwegian-family-greets-Peres-with-honor-guard-canons-352030

[5] www.jta.org/2017/05/12/news-opinion/world/norways-largest-trade-union-calls-for-blanket-boycott-of-israel

[6] www.jpost.com/Diplomacy-and-Politics/Norwegian-YMCA-embraces-boycott-Israel-policy-343995

[7] www.israelwhat.com/2014/03/13/oslo-chapter-of-ymcaywca-reject-ymcaywca-israel-boycott/

[8] www.jpost.com/Arab-Israeli-Conflict/Norway-UN-withdraw-funds-from-West-Bank-womens-center-named-for-terrorist-494345

[9] www.hlsenteret.no/publikasjoner/digitale-hefter/antisemittisk-vold-i-europa_engelsk_endelig-versjon.pdf

[10] www.ft.com/content/23ea67a2-8d80-11e7-a352-e46f43c5825d