« Tu retourneras vers Hachem ton Dieu, tu écouteras Sa voix et tu respecteras tout ce que Je t’ordonne aujourd’hui, toi et tes enfants, de tout ton cœur et de toute ton âme. Hachem ton Dieu reviendra avec les exilés et aura pitié de toi ; Il reviendra et te rassemblera de toutes les nations où tu as été éparpillé[1]. »

Ces versets sont un appel que Dieu lance à toutes les générations[2] : « Revenez vers Moi afin que Je puisse retourner vers vous. »

Nombreux[3] sont les commentateurs qui ont vu dans ces versets la mitzva, l’obligation de la téchouva (repentir) : celui qui s’est éloigné de Dieu a la mitzva de revenir vers Lui.

Cette mitzva montre que Dieu n’abandonne pas celui qui trébuche. En exigeant le repentir, Il lui tend la main, car « Il ne désire pas la mort du pêcheur, mais que celui-ci se repente et vive. »

En revanche, pour Maïmonide, ce verset n’indique pas une mitzva. En effet, dans ses Lois relatives à la repentance, il cite un tout autre verset comme source de la mitzva du repentir : « Celui qui a transgressé un commandement de la Thora, que ce soit un commandement positif ou négatif, qu’il l’ait transgressé intentionnellement ou par inadvertance, lorsqu’il revient à Dieu, a l’obligation de se confesser, comme il est dit[4] : “…ils confesseront leurs péchés.” Lorsque le pécheur se confesse, il doit dire : Ô Hachem, j’ai fauté et péché envers Toi, j’ai commis telle et telle infraction, j’ai honte de mes actes et je m’engage à ne plus jamais les recommencer[5]. »

En choisissant un autre verset comme source de la mitzva du repentir, Maïmonide modifie la nature même de cette mitzva.

Pour lui, le repentir n’est pas une obligation de la Thora. La mitzva de téchouva est le mode d’emploi de celui qui a décidé de son propre chef de se repentir. C’est la raison pour laquelle Maïmonide ne dit pas qu’un pécheur doit se repentir, mais que lorsqu’un pécheur « revient vers Dieu » de sa propre initiative, il doit se confesser.

Maïmonide pense certainement que le repentir en tant que mitzva n’est pas nécessaire pour intimer à l’homme l’ordre de cesser de fauter.

Par exemple, le fait d’avoir transgressé Chabbat ou médit de son prochain n’autorise pas le pécheur à renouveler ces mauvaises actions, les fautes qu’il a commises n’ayant supprimé de la Thora ni les lois sur le Chabbat ni celles concernant la médisance.

Nul besoin de téchouva pour ordonner de cesser les mauvaises actions, les lois de la Thora se suffisent.

Aussi, pour Maïmonide, le but de la téchouva n’est-il pas de cesser de faire le mal, mais de réparer le mal déjà fait.

La téchouva en tant que mitzva est nécessaire pour effacer le passé, pour laver les taches causées par les fautes. La mitzva de téchouva réside donc dans le vidouy, l’aveu.

Lorsqu’un homme, de sa propre initiative, de sa volonté délibérée, désire retourner vers Dieu, Dieu lui offre ce cadeau extraordinaire : par le vidouy il peut effacer le passé. Grâce à la téchouva, le jour du jugement, les infractions qu’il aura commises ne seront pas comptabilisées.

Nos Sages[6] ajoutent que lorsque le repentir est totalement pur, il a même la faculté de transformer les mauvaises actions en bonnes actions, c’est-à-dire que la puissance du « travail » de celui qui revient vers Dieu peut être si forte qu’elle devient mitzva pour chaque action regrettée.

C’est cette idée qu’exprime Maïmonide à la fin du paragraphe où il dit que « le voleur n’est pas pardonné s’il s’est contenté de rendre son larcin ». Bien entendu, il doit rendre l’objet volé, celui-ci n’étant pas le sien.

Mais la restitution est une condition nécessaire pour être pardonné, elle n’est pas suffisante. Pour être pardonné, il faut encore un labeur, le vidouy, une confession sincère, des prières ferventes et un profond travail sur soi-même.

Une lecture attentive de notre verset dans son contexte lui confère un sens qui dépasse l’obligation de revenir vers Dieu et c’est peut-être ainsi que Maïmonide l’a compris.

En effet, la Thora situe la téchouva dans un moment de l’histoire : « Et ce sera lorsque se seront réalisés les événements que Je t’ai annoncés, la bénédiction et la malédiction. De là-bas où Je t’ai repoussé, tu reviendras à ton identité[7]. »

Dieu annonce donc qu’après avoir subi bien des souffrances, Israël fera téchouva. Ainsi, notre verset n’est pas une obligation, mais une prophétie et une promesse : le jour viendra, peut-être suite aux persécutions, où Israël prendra conscience de son identité et se rapprochera de son Créateur.

Cela fait bien cent ans déjà que la promesse de Dieu de ramener Son peuple sur sa terre se réalise et pourtant l’on ne voit pas qu’Israël ait fait téchouva.

Certes, cette affirmation : « Israël n’a pas fait téchouva », est gratuite. Seul Celui qui sait sonder les cœurs et les âmes, qui sait mesurer les mérites des uns et des autres, peut affirmer qu’Israël se rapproche ou s’éloigne de Dieu.

Notons aussi que le rav Taichtel, dans son livre Em Habanim Seme‘ha, explique que l’action sioniste de retourner sur la terre ancestrale est une téchouva collective.

Rachi, semble-t-il, a devancé notre question en commentant le verset 3  où la Thora dit que Dieu « revient avec les exilés » au lieu de dire qu’Il ramène les exilés : « Grand sera le jour du rassemblement des exilés et ce sera très difficile comme si Dieu lui-même devait prendre par la main chacun de son endroit pour l’amener en Israël. »

Rachi savait donc déjà que le travail du retour ne serait pas un travail de masse, mais un travail « à la pièce ». C’est pourquoi le processus, lent et individuel, n’est pas facilement perceptible.

Mais finalement, nous savons que Dieu nous emmène les uns après les autres auprès de Lui, dans le sens matériel, Il nous ramène en Israël, au sens spirituel, Il nous conduit au repentir.

Extrait de l’ouvrage du Rav Shaoul David Botschko  »A la table de Shabbat »

Pour se procurer l’ouvrage:

hesder2@gmail.com
029972023

[1] Deutéronome xxx, 2-3.

[2] Malachie iii, 7.

[3] Par exemple Séfer Mitzvot Qatan, mitzva 53.

[4] Nombres v, 7.

[5] Lois sur la Repentance, 1, 1.

[6] Yoma 86b.

[7] Deutéronome xxx, 1.

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Clement levy

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