À une personnalité libanaise qui lui demandait jeudi de lui envoyer une carte détaillée des dernières positions des forces en conflit à Alep-Est, le général syrien Ali Mamlouk aurait répondu : « Ce n’est pas la peine, les changements sont trop rapides. » De fait, depuis quelques jours, les développements se précipitent à Alep-Est et les combattants de l’opposition sont en pleine déroute. Une partie d’entre eux cherche à se rendre aux forces du régime et les autres réclament des garanties de repli vers des « zones plus sûres » comme Raqqa. Selon les estimations militaires, les forces du régime et leurs alliés devraient reprendre le contrôle des quartiers est de la ville dans une dizaine de jours au grand maximum, avant les fêtes de fin d’année et surtout avant l’entrée en fonctions officielle du nouveau président des États-Unis, Donald Trump, pour créer un fait accompli irréversible. Sachant que les quartiers est d’Alep sont passés sous le contrôle de l’opposition à partir de 2012. D’ailleurs, les sources proches du régime syrien annoncent une prochaine visite du président Bachar el-Assad à Alep pour prononcer ce qui sera considéré comme un discours décisif dans le cours du conflit syrien commencé en 2011.

Il est donc clair que la bataille d’Alep, attendue et annoncée, est en train de prendre fin, au profit des forces du régime et de leurs alliés. De l’avis de nombreux observateurs et même de la presse occidentale, cette bataille marque un changement radical dans les rapports des forces en Syrie et même dans la région. Après la reprise de contrôle d’Alep par le régime, ce dernier ne sera plus menacé de renversement. L’État islamique et l’ex-Front al-Nosra n’auront plus d’autre choix que de se replier vers Raqqa ou Idleb (Nord-Est et Nord-Ouest), alors que les poches existantes dans le centre, notamment dans le Rif (campagne) de Damas, seront condamnées à plus ou moins brève échéance à l’asphyxie.

Quant au front du Sud, il est plus ou moins figé dans un statu quo dissuasif entre d’un côté les rebelles ouvertement appuyés par l’armée israélienne et de l’autre les forces du régime et leurs alliés.

Selon une source militaire qui suit de près le dossier syrien, la fin de la bataille d’Alep n’aura pas seulement un grand impact sur les contours de la « nouvelle Syrie », elle redéfinit aussi les rôles régionaux.

Déjà, l’Égypte a clairement choisi son camp en déclarant d’une façon plus ou moins officielle son appui au régime syrien « dans sa lutte contre les terroristes ». Le général Ali Mamlouk a d’ailleurs effectué une visite récente au Caire et certains médias rapportent la présence d’experts militaires égyptiens en Syrie, en dépit de la grande colère de l’Arabie saoudite qui a immédiatement décidé de suspendre l’approvisionnement de l’Égypte en pétrole.

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De même, la Turquie est en train de modifier sa position initiale de franche hostilité au régime syrien au point d’être particulièrement active dans les plans visant à le renverser. La même source militaire affirme ainsi que les forces du régime syrien n’auraient pas pu prendre aussi rapidement le contrôle des quartiers est d’Alep si la Turquie n’avait pas pris des mesures pour limiter l’afflux de combattants à travers ses frontières. De plus, la Turquie se rapproche de plus en plus de la Russie, au point que le président russe a exigé de son homologue turc de changer une déclaration dans laquelle il disait que l’objectif des forces turques en Syrie était de renverser le régime d’Assad.

De même, les Russes ont fixé des lignes rouges à l’intervention militaire turque en Syrie, l’autorisant à sécuriser ce qu’elle considère comme ses intérêts stratégiques avec les Kurdes, mais l’empêchant de prendre le contrôle de la ville frontalière d’al-Bab qui coupe en deux la zone kurde. La Turquie a donc revu ses ambitions syriennes à la baisse et a de moins en moins les mains libres en Syrie. Ce qui place l’Arabie saoudite ainsi que les autres pays du Golfe, qui ont largement appuyé les groupes rebelles, dans une volonté déclarée de renverser le régime syrien, dans des positions délicates et les classe dans la catégorie des grands perdants.

La source militaire précitée affirme toutefois que ces développements sur le terrain et stratégiques ne signifient pas que la guerre se terminera rapidement en Syrie, puisqu’une partie du territoire syrien continuera à être sous le contrôle des rebelles, mais la page du renversement militaire de Bachar el-Assad sera définitivement tournée. Il faudra alors mener des négociations politiques sur un nouveau partage des pouvoirs, sachant que le régime sera en position de force et que l’opposition dans ses factions « modérées » aura besoin du solide appui de la communauté internationale pour tenter d’arracher des concessions.

En même temps, les groupes jihadistes continueront d’exister, même affaiblis. Ils peuvent même être encore plus violents à travers des attentats-suicide pour compenser la perte du terrain. La source militaire place même l’attentat de Bqaa Sifrine, au Liban-Nord, dans ce contexte, estimant que sur l’ordre des chefs installés à Raqqa, les « cellules dormantes » au Liban pourraient se réveiller et semer de nouveau la mort et la violence. Ce qui doit pousser les services de sécurité libanais ainsi que l’armée à une vigilance maximale. Mais celle-ci sera certainement plus efficace lorsque les institutions officielles reprendront leur fonctionnement normal. Hélas, les parties concernées ne semblent pas pressées de former un nouveau gouvernement…

09/12/2016

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Jcg

Rien n est joue , la region repose sur du sable , mouvant Seuls les chameaux et leur neutralite legendaire , gagneront !