Jérusalem vaut bien…une messe. Même sans Messi

A peine annoncée la nouvelle de l’annulation de la venue de l’équipe de football d’Argentine, le “sport national” de l’opposition et des grands médias israéliens s’est mis en branle: “Qui sont les coupables chez nous?”.

Il n’a pas fallu chercher longtemps: c’est la ministre de la Culture et des Sports Miri Reguev, accusée d’avoir imposé la tenue du match à Jérusalem pour ses propres besoins politiques!

Comme s’il s’agissait d’une aubaine, des membres de l’opposition se sont précipités pour dénoncer la ministre et même pour qualifier ce regrettable incident « d’échec patent de la politique du gouvernement ».

Avi Gabbaï, président du Camp Sioniste écrit : « Nous avons reçu une bombe en pleine figure. Ce n’est pas seulement le sport. C’est ainsi que commencera peut-être un tsunami international contre Israël ».

Des propos déjà entendus maintes fois dans la bouche d’Ehoud Barak qui attend toujours sur la plage, espérant voir arriver ce tsunami tant attendu. Avi Gabbaï enfonçait le clou avec outrance : « Concernant l’attitude corrompue de la ministre de la Culture et des Sports, depuis la cérémonie de l’allumage des flambeaux, en passant par le Times Square, elle devrait faire l’objet d’une enquête de police ! Il s’agit de notre Etat, de nos impôts, de notre honneur national (sic) et non de la machine des primaires de Mme Reguev ! »

Le chef de l’opposition Itshak Herzog lui emboîtait le pas : « Il s’agit d’un magistral but contre leur camp pour tous les porte-voix du pouvoir qui assurent que notre situation dans le monde est au plus haut. Aujourd’hui, le BDS exulte ! Il s’agit d’un échec retentissant du gouvernement qui pratique la politique de l’autruche et ne voit pas les réalités ».

Le député Zoheir Bahloul (Camp Sioniste) est encore plus agressif : « L’attitude de Miri Reguev et Binyamin Netanyahou en courant après les honneurs et les gains politiques ont eu leur effet. L’obstination à vouloir faire jouer cette rencontre à Jérusalem et l’obsession à vouloir serrer des mains devant les caméras pour ce qui n’aurait dû être qu’une rencontre sportive a entraîné la politisation de cette affaire. L’obsession pathologique de ‘Jérusalemiser’ a entraîné des oppositions qui ont abouti à l’annulation de ce match».

Tsipi Livni a tenu des propos similaires: “L’annulation de ce match irrite et déçoit au niveau national. Mais c’est surtout un auto-goal car Miri Reguev et Binyamin Netanyahou se sont obstinés à transformer un match sportif amical en politique dédiée à leurs propres besoins…”

Yaïr Lapid a repris sa rhétorique habituelle du « tout est combines » et a accusé Miri Regev de « se déguiser en ministre des Affaires étrangères uniquement pour être sur les photos et devant les caméras ».

Tous ceux qui critiquent la ministre ou le gouvernement dans son ensemble ont oublié que le jour de leur mariage, ils ont brisé un verre en jurant fidélité à Jérusalem, qui doit être placée « au-dessus de toutes les joies ». Ils oublient – ont font semblant d’oublier – que l’origine de l’annulation de la venue de l’équipe d’Argentine est due aux différentes campagnes agressives lancées par le BDS et ses métastases dans le monde, jusqu’à ces manifestants à Barcelone qui brandissaient des maillots n° 10 de Lionel Messi, maculés de sang. Ils oublient les menaces et propos inacceptables de Jibril Rajoub ou l’intervention des députés arabes.

Miri Reguev a eu raison d’insister pour Jérusalem, car si nous Israéliens cédons sur ce point, comment exiger des autres pays qu’ils respectent notre capitale ? Si le gouvernement avait reculé sur cette question, la porte, déjà entrebaillée, aurait été cette fois-ci grande ouverte pour l’annulation de l’Eurovision 2019 dans la capitale.

La ministre a d’ailleurs repoussé les attaques qui ont fusé contre elle : « Toutes ces accusations sont fantaisistes et elles légitiment le terrorisme et les partisans du BDS contre l’Etat d’Israël. Nous avons hélas des Chevaux de Troie à la Knesset ».

Le président de l’Etat Reouven Rivlin a remis les choses dans leur proportion : « C’est un jour triste pour les amateurs de football et les fans de Lionel Messi. Mais il y a des valeurs plus élevées que Lionel Messi ! La politisation de cette rencontre de la part des Argentins m’inquiète. Même dans les moments les plus difficiles nous avons toujours tenté d’agir en fonction de considérations sportives uniquement et il est regrettable que l’équipe d’Argentine n’ait pas agi de même ».

Le Premier ministre Binyamin Netanyahou n’a pas souhaité s’étendre sur le sujet. Interrogé sur cette affaire juste avant de décoller de Paris pour Londres, il a juste dit cette phrase: “On passe à autre chose…”.

Le ministre de la Sécurité intérieure Guilad Erdan a estimé que l’une des raisons de l’annulation a été la crainte des joueurs de l’équipe d’Argentine d’être attaqués lors de leur séjour, comme avait menacé accusé Jibril Rajoub.

Avigdor Lieberman, ministre de la Défense a écrit sur Twitter : « Dommage que les chevaliers du football argentin n’aient pas su résister aux pressions de la part des incitateurs permanents contre Israël dont l’unique but est de nous empêcher de nous défendre et de favoriser la disparition de l’Etat d’Israël. Mais nous ne cèderons pas à cette bande d’antisémites qui soutient le terrorisme ».

Le ministre chargé de Jérusalem, Zeev Elkin a lui-aussi catégoriquement repoussé les attaques contre Miri Reguev et son « entêtement » à vouloir que la rencontre se déroule à Jérusalem. Il s’en est violemment pris à ceux qui ont adopté cette thèse quitte à apporter de l’eau au moulin des ennemis d’Israël : « Depuis hier, je suis consterné face à certaines réactions après l’annulation du match. Qu’est ce qui nous arrive ? Où et passé l’honneur national ? L’intérêt supérieur de l’Etat d’Etat est de renforcer sa capitale Jérusalem et non pas de s’adonner à de la basse politique lorsqu’on est attaqués du dehors. Aujourd’hui c’est Messi, demain ce sera l’Eurovision et après-demain ce sera la Knesset. Avez-vous oublié le nombre d’artistes qui ont annulé leur représentation en Israël suite aux pressions du BDS, alors qu’elle était prévue à Tel-Aviv ? Voulez-vous transférer tous nos événements à Chypre pour être plus tranquilles ? Si on suit votre logique, il aurait fallu créer l’Etat d’Israël en Ouganda parce que cela ne plaît pas à certains que nous soyons là ! »

La Fédération israélienne de football n’a pas non plus suivi le troupeau des auto-flagellateurs : « Notre fédération considère avec une extrême gravité les propos et les menaces brutales et physiques proférées par Jibril Rajoub qui a franchi toutes les lignes rouges. Elle saisira les instances internationales du football sur cette question. Par ailleurs, une lettre de protestation sera adressée au président de la FIFA Gianni Infantino demandant que soit sanctionné celui qui a osé inciter ouvertement à s’en prendre physiquement aux joueurs de l’équipe d’Argentine et qui a tout fait pour saboter cette rencontre amicale entre les deux équipes ».

Finalement, c’est de l’équipe d’Argentine elle-même qu’est venue la réponse qui devrait clouer le bec à tous ceux qui s’acharnent contre Miri Reguev. L’une des vedettes de l’équipe, Gonzalo Hinguen a salué la décision et a confié qu’elle est tombée après que Lionel Messi ait déclaré : « Comment peut-on jouer (en Israël) alors qu’il y a de la souffrance de l’autre côté ? » « Finalement, nous avons pris la bonne décision. L’essentiel c’est la santé et le bon sens. Comment se rendre là-bas alors que tant de Palestiniens souffrent », a renchéri Hinguen. Nulle référence au fait que la rencontre ait été prévue à Jérusalem. Le BDS ne fait pas la distinction factice que certains font ici en Israël.

Contrairement à ses détracteurs, la ministre de la Culture et des Sports a bien fait d’exiger que la rencontre ait lieu à Jérusalem, même au prix de cette lâche annulation.

Jérusalem vaut bien…une messe. Même sans Messi.

Par Shraga Blum

 

• www.lphinfo.com

 

Photo Yonatan Sindel / Flash 90