Le vent tourne en faveur des Saoudiens au Yémen

Avec la fin prochaine de la guerre anti-Daesh en Syrie et en Irak – et, vraisemblablement, le début d’autres conflits Israël-Iran-Hezbollah et YPG kurdes-Turquie, assortis d’autres bras-de-fer américano-russes,- le paradigme qui circule le plus est celui d’une autoroute iranienne triomphante d’Est en ouest, menant inéluctablement à la domination de la Syrie par l’Iran et à un conflit multifrontal avec Israël.

Même si les données militaires et logistiques ne sont pas les mêmes, la situation de perte de terrain des alliés de l’Iran au Yémen apporte une vision bien différente des capacités de nuisance des groupes que parraine l’Iran : malgré l’apport balistique, les conseils et renforts du Hezbollah libanais et des Gardiens de la Révolution, les Houtis sont au bord de l’effondrement à six mois d’ici et peut-être avant.

Ils n’ont, pourtant, en face d’eux « qu’une » coalition arabe des Emirats et de l’Arabie Saoudite qui a peu combattu au cours des 50 dernières années (hormis l’armée égyptienne, par exemple).

Cette coalition va en partie :

  • parvenir à couper l’Iran de son influence en Afrique de l’Est, sur le Soudan, notamment,
  • permettre à l’Egypte et aux marines occidentales de maintenir la sécurité dans les détroits pétroliers et par le Canal de Suez,
  • de garder le contrôle sur les trafics maritimes iraniens au profit du Hezbollah et d’autres groupes supplétifs,
  • éventuellement parachever le blocus dans l’approvisionnement en armes du Sinaï et de la Bande de Gaza…

Le contournement par la mer deviendra moins possible, alors que Téhéran se serait vu signifier le refus de Damas de lui octroyer une base navale près du port d’accueil russe de Tartous.

C’est donc la première partie du renvoi de l’Iran dans ses cordes qui se réalise sous nos yeux…

Les fronts suivants concerneront les évolutions de la politique américaine pro-kurde dans le nord-est de la Syrie et la vallée de l’Euphrate, à Al-Tanf en protection de la Jordanie et du sud de la Syrie, le reste du travail étant partiellement réalisé par les frappes régulières de l’aviation israélienne sur les convois lancés vers l’ouest… 

©M.B pour JForum

Après des mois d’impasse, la coalition pro-saoudienne réalise finalement des progrès significatifs sur le terrain contre les rebelles Houtis du Yémen. En décembre, la coalition -critiquée à cause du bilan impressionnant de civils tués – a lancé 67 pour cent de frappes aériennes supplémentaires par rapport au mois précédent. Soutenues par la puissance aérienne saoudienne, les forces yéménites au sol avancent sur un certain nombre de fronts cruciaux, dont la frontière nord et la côté ouest du Yémen. La capitale demeure sous contrôle houti, mais se trouve de plus en plus isolée, alors que la coalition réduit plusieurs lignes d’approvisionnement essentielles.

L’Offensive du Nord

L’armée régulière yéménite a réalisé des progrès significatifs dans le nord du Yémen, avec l’aide et le soutien aérien de la coalition, en particulier dans le bastion Houti de Sadaa, où s’est illustrée cette pluralité des frappes aériennes. En début de semaine dernière, la coalition a annoncé avoir reconquis une chaîne de  montagnes stratégiques dans le gouvernorat, coupant ainsi la voie d’approvisionnement des Houtis, tout en s’emaprant de vastes dépôts d’armes.

Sadaa n’est pas seulement le cœur du territoire houti, elle se trouve aussi l long de la frontière yéméno-saoudienne et c’est probablement le point de lancement des missiles dirigés contre l’Arabie Saoudite. Ainsi, les progrès sur ce front servent le double-objectif de renverser un centre de gravité crucial pour les Houtis et d’interrompre les tirs de missiles houtis contre le royaume.

 

L’Offensive côtière

La coalition continue de progresser le long de la côte ouest du Yémen en direction de son port le plus important : Hodeidah. Les Houtis contrôlent Hodeidah depuis 2014, forçant la coalition à emprunter la ligne étroite entre le fait de prendre les Houtis pour cible et de préserver un accès humanitaire. En novembre, l’Arabie Saoudite s’est trouvée sous le feu des critiques pour avoir bloquer le port, ce qui a exacerbé la famine et l’épidémie de choléra au Yémen.

Immédiatement après l’assassinat de l’ancien président Saleh, aux mains de ses anciens alliés, les Houtis, la coalition a intensifié les opérations militaires dirigées sur Hodeidah. En moins d’une semaine, elle s’est emparée de Khoukha, une ville côtière entre le port de Mocha, déjà contrôlé par la coalition et le port d’Hodeidah contrôlé par les Houtis. Acause de la mort de Saleh, deux bataillons de ses partisans ont rejoint l’offensive de la coalition pro-saoudienne.

La semaine dernière, les forces yéménites appuyées par les troues terrestres des Emirats Arabes Unis ont consolidé encore un peu plus ces victoires locales, en s’emparant d’un terrain crucial au sud du département de Heys, réduisant les lignes d’approvisionnement Houties entre le port d’Hodeidah et la troisième plus grande ville du Yément, Taiz.

Non seulement la percée vers Heys contribue à l’offensive côtière, mais elle permet aussi à la coalition de prendre position afin de briser le siège houti de Taiz, une ville qui a longtemps « échappé à la coalition. Une filiale yéménite des Frères Musulmans, Islah, préserve un bastion solide à Taiz. Les Emirats Arabes Unis répugnent historiquement à soutenir Islah, étant donnée sa politique régionale consistant à chasser les Frères Musulmans, même si leur milice a démontré une farouche résistance contre la progression des Houtis dans la ville.

Au cours de ces dernières semaines, Les EAU ont modifié leur approche concernant Islah. A la mi-décembre, l’Arabie Saoudite a accueilli une réunion “fructueuse et positive” entre les dirigeants d’Islah et le prince héritier d’Abu Dhabi. La coalition apporte à présent un soutien aérien aux unités de l’armée qui s’alignentsur Islah, selon l’Economist.

Dans la Capitale

Alors que les Houtis maintiennent leur contrôle sur Sanaa, la capitale du Yémen, l’emprise du groupe semble soumise à des tensions croissantes. Les Houtis ont commencé à confisquer les téléphones pour empêcher qu’on puisse consulter les moindres pages rédigées par l’opposition sur internet et  recrutent les enfants des écoles comme combattants (enfants-soldats).

Bien que le Président Hadi ait immédiatement appelé à passer à l’offensive à la suite de l’assassinat de Saleh, il apparaît que la coalition va d’abord isoler les Houtis par ses offensives au Nord et sur la côte afin de les prendre en étau.

La coalition a, néanmoins, posé les conditions pour de futures opérations offensives sur la capitale, conduisant 118 frappes aériennes sur la ville et le gouvernorat environnant, le mois dernier, et en nettoyant les zones du nord-est de la capitale.

Alexandra Gutowski est analyste des affaires militaires au sein de la Fondation pour la Défense des Democraties.

Par  |10 janvier 2018 | alexandra@defenddemocracy.org | @angutowski

longwarjournal.org

Adaptation : Marc Brzustowski

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