Le dilemme de l’Iran : un conflit militaire avec Israël, oui ou non?

Analyse: Certains experts estiment que la position des dirigeants militaires iraniens diffère fondamentalement de la position enflammée des Gardiens de la révolution. Ils sont conscients des capacités militaires et de renseignement d’Israël, ne cherchent pas de conflit avec nous et comprennent que c’est une aventure dangereuse et irréaliste.

Le shah perse a abandonné son pays il y a 39 ans et Téhéran a annoncé la création d’une république islamique dirigée par l’ayatollah Khomeiny. Ses caractéristiques les plus saillantes étaient et restent le totalitarisme religieux, le culte de la personnalité du dirigeant suprême, le contrôle absolu de l’économie par l’État et ses armes, et une oppression permanente de la liberté d’opinion et de parole.

En ce qui concerne l’Iran, la révolution de Khomeiny n’a pas réussi à atteindre ses objectifs et à créer un précédent intéressant pour les autres nations. Un énorme échec.

Le revenu réel par habitant en Iran a augmenté en moyenne de 0,5% par an depuis 1980 et n’a pas augmenté du tout au cours de la dernière décennie. Ce qui était autrefois une puissance industrielle et technologique s’est transformé en un entrepôt de chiffonnier-ferrailleur et en un marché noir de biens de consommation désirés, provenant de l’Occident et des pays arabes voisins.

Le président ranéen Hassan Rouhani lors d'un défilé des Gardiens de la révolution (Photo: AFP)

Le président iranien Hassan Rouhani lors d’un défilé des Gardiens de la révolution (Photo: AFP)

L’économie iranienne est alimentée uniquement par le pétrole, et il manque encore des investissements (selon les déclarations officielles) d’environ 200 milliards de dollars pour relancer les industries pétrolières et gazières négligées. L’engouement de ses dirigeants pour le développement d’une arme nucléaire a presque détruit le pays, en raison des sanctions internationales et de l’attribution de ressources rares à un projet futile.

À la grande déception des citoyens, la levée des sanctions au cours des deux dernières années n’a contribué que marginalement à améliorer la situation de l’Iran. Le capital productif occidental n’a pas pénétré en Iran et la présence de ce pays dans les arènes mondiales du domaine civil est restée insignifiante.

Ce n’est guère surprenant : quarante-cinq pour cent de l’économie iranienne est détenue par le gouvernement, environ un tiers est détenu par les gardiens de la révolution et environ un cinquième est détenu par des associations religieuses corrompues et non contrôlées qui sont soumises directement au chef suprême. Le taux de chômage chez les jeunes iraniens est de près de 28%, seulement 15% des femmes font partie de la population active, et le taux de change de la monnaie iranienne sur le marché libre est inférieur de dizaines de points à son taux de change officiel.

A Cela s’est ajouté d’autres troubles, ce qui explique un peu la nervosité du régime de Téhéran : d’abord, la menace du président américain Donald Trump de renoncer à l’accord international pour réduire les sanctions en échange de la fin du programme nucléaire militaire iranien, qui incite les partenaires européens à envisager un accord qui renforcera les sanctions ; deuxièmement, l’atmosphère anti-iranienne dans le monde arabe à la lumière du soutien de Téhéran au régime meurtrier de Bashar el Assad ; et troisièmement, l’accord de réconciliation qui se dessine entre la Corée du Nord et les États-Unis, en vertu duquel Pyongyang abandonnerait complètement le développement d’une arme nucléaire – un coup considérable porté aux programmes militaires de Téhéran.

Ajoutez cela aux problèmes du Kremlin. La Russie de Poutine est loin d’être un pays fort, stable et développé. Le fossé scientifique et technologique entre la Russie et l’Occident est beaucoup plus large aujourd’hui qu’il ne l’était à la fin de l’ère communiste. Les déclarations du président Vladimir Poutine sur les types d’armes modernes que son pays est censé développer sont de pures illusions. Tôt ou tard, Poutine et les membres de son entourage réaliseront que la présence russe en Syrie est un fardeau plutôt qu’un atout. L’échec misérable de la Russie à empêcher l’attaque américaine-britannique-française contre l’armée d’Assad et sa tentative désespérée de créer une fausse couverture pour l’utilisation des armes chimiques, en sont la preuve.

Le guide suprême de l'Iran, l'ayatollah Ali Khamenei (Photo: Reuters)

Le guide suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei (Photo: Reuters)

En période de pénurie, les éléments conservateurs en Iran (dirigés par les Gardiens de la Révolution) peuvent voir un conflit limité avec Israël comme une échappatoire à l’isolement et à la faiblesse interne, pour gagner la sympathie des masses arabes et enrôler Poutine comme «Pacificateur». D’un autre côté, une défaite rapide dans un conflit ou un embourbement inattendu pourrait conduire à l’effondrement du régime à Téhéran, comme le montre parfois l’histoire.

Certains experts de l’Iran estiment que la position des chefs militaires diffère fondamentalement de la position enflammée des orateurs des gardiens de la révolution. Ces derniers sont enclins à croire que cela vaut la peine de se battre pour le maintien de plusieurs bases en Syrie, afin de leur permettre de réaliser leur vieux rêve de transformer le Liban en une «république islamique». Les premiers sont conscients des capacités militaires et de renseignement d’Israël, ne cherchent pas de conflit avec nous et comprennent que c’est une aventure dangereuse et irréaliste, ce qui sera mauvais pour l’Iran. Israël, préviennent-ils, a déjà clairement fait savoir qu’il était déterminé à ne pas permettre, quel qu’en soit le prix, aux Iraniens de se retrancher en Syrie, et c’est très sérieux ; et dans l’arène internationale, Poutine commence déjà à s’attirer les bonnes grâces de Trump.

Tout ceci n’empêchera pas nécessairement un conflit Iran-Israël limité. Les guerres au Moyen-Orient sont imprévisibles et sont généralement stratégiquement irrationnelles.

Première publication le: 26.04.18, 20:27

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guigui169

Je rois que je ne comprendrais jamais la politique étrangère israélienne. Comment Israël ne voit-elle pas l’évidence, qui est que le fondamentalisme sunnite est bien plus dangereux pour la sécurité des juifs que ne le sera jamais l’Iran chiite ? Le régime des Mollahs ne joue la surenchère anti-israélienne que pour une seule raison : légitimer sa place dans le concert des nations islamiques (objectif d’ailleurs très ardu, vu que nombre de ces nations persistent à voir l’Iran comme une hérésie religieuse). L’Iran n’attaquera jamais Israël parce qu’il sait qu’une telle attaque entraînerait une réplique bien plus dévastatrice. Et pourtant, les politiciens israéliens continuent à agiter le chiffon rouge iranien, encore et encore ! Et pendant ce temps, les dirigeants israéliens (et américains) ferment complaisamment les yeux sur l’extrémisme de leur « allié » saoudien, un pays qui est pourtant à la source de la radicalisation des musulmans dans le monde entier. Si l’on réfléchit en termes d’idéologie (notamment antisémite), le vrai danger vient de Riyad, pas de Téhéran.

Macroyme-Crimeur-Contre-l'Humanité

L’Armée Iranienne n’a JAMAIS porté à son cœur la bande de voyous qui a pour nom : Gardiens de la Révolution.
Il faut noter qu’au tout début de la dite révolution islamique, de hauts gradés de l’Armée Iranienne ont demandé conseil auprès de l’OTAN et divers attachés militaires européens pour connaitre la manière d’écraser ce mouvement islamique et qui salissait le prestige de l’Armée Iranienne.
Et les USA, l’Angleterre et la France ont fait la sourde oreille.

Amouyal

Vous avez raison de pointer le decalage entre l armee et les pasdaran , tout systeme fasciste genere une armee de fanatiques choyés par le pouvoir , je vous rejoins aussi sur l incapacite russe , poutine navigue sur la lachete occidentale , il sait qu Israel frappera s il le decide et le corps expeditionnaire russe sera balaye en quelques heures , donc si trump lui fait le coup de plus gros baton comme la coree du nord Poutine va reculer et reculer tres vite , laissant les iraniens a poil