Immigration, citoyenneté, nationalité : un enjeu pour l’Etat juif

Le 29 août 2017, la Cour Suprême israélienne a validé le principe de l’expulsion des migrants africains en direction d’un pays tiers non identifié. Toutefois, elle a refusé leur maintien en prison pour une durée supérieure à 60 jours, lorsqu’ils refusent leur départ. Cette décision a attiré les foudres de la Ministre de la Justice Ayalet Shaked pour qui, la Haute Cour ne prend pas « en considération la préservation d’une majorité juive en Israël » et qui cherche « à imposer une vision du monde utopique et universelle sans prendre part à la guerre pour l’existence même de l’Etat ». Cette analyse est également partagée par la vice-ministre des Affaires étrangères, Tzipi Hotovely, pour qui : « le système judiciaire a abandonné les valeurs de l’Etat juif au profit des valeurs de l’Etat démocratique». Israël est confronté depuis quelques mois (tout comme le sont les pays européens) à une immigration importante des populations africaines, susceptible, à terme, de modifier l’équilibre démographique. Pour Israël, ce problème se double d’un autre: faute d’avoir mis en place une « nationalité juive » aux côtés de la « citoyenneté israélienne », c’est la catégorie de citoyens la plus nombreuse qui décide de l’avenir de l’Etat, non la nation juive.

Le 4 septembre 2017, le premier Ministre Benjamin Netanyahou a confirmé l’importance de la présence juive en Judée Samarie, confirmant qu’il n’y aurait jamais de démantèlement des implantations juives et d’expulsions des 600 000 habitants : «Nous sommes ici pour toujours. Nous nous enracinons, nous construirons, nous deviendrons de plus en plus fort et nous resterons ». Pour autant l’emprise territoriale ne garantit pas un contrôle politique exclusivement juif de l’Etat.

Lors de sa création, Israël a légiféré sur la « citoyenneté israélienne » pour permettre aux juifs de venir s’établir en Israël : c’est la Loi sur le Retour du 5 juillet 1950 (5710), amendée en 1970 (5730) pour préciser qui est juif (en l’occurrence « une personne née d’une mère juive ou qui s’est convertie au judaïsme et qui n’est pas membre d’une autre religion »). En 1970, la Loi a également étendu la faculté de s’établir en Israël, au conjoint d’un juif, à ses enfants et à ses petits enfants (et leur conjoint) à moins qu’il « n’ait volontairement changé de religion ». Cette possibilité ne joue toutefois pas, si ces personnes « constituent un danger pour le bien-être de la population et la sécurité de l’État ».

De même, la Loi du 1er avril 1952 sur la Citoyenneté a offert une faculté de s’établir en Israël aux enfants d’un israélien (quelque soit son lieu de naissance), aux citoyens palestiniens qui ont décidé de demeurer en Israël lors de la naissance de l’Etat (en 1948), ainsi qu’aux enfants des palestiniens ayant quitté le territoire entre 1948 et 1952 et qui sont revenus après l’entrée en vigueur de la Loi (Loi du 4 août 1998). Rappelons, en outre, la possibilité pour le Ministre de l’Intérieur d’accorder (de façon discrétionnaire) la citoyenneté à une personne qui « s’identifie à l’État d’Israël et à ses buts » lorsqu’elle a rendu service à l’Etat juif.

Enfin, les résidents palestiniens de Jérusalem se sont vus offerts la possibilité de présenter une demande de citoyenneté israélienne lors de l’annexion de la ville après (guerre des 6 jours, 4 juin 1967). Sur les 250 000 palestiniens concernés, seuls 12 000 l’avaient demandé mais ce nombre est, depuis, en perpétuelle augmentation.

Ces textes ne concernent toutefois que la « citoyenneté israélienne », c’est-à-dire la possibilité de vivre en Israël, et non la « nationalité israélienne » toujours pas instituée Israël, bien qu’il s’agisse du lien juridique qui lit une nation, en l’occurrence la nation juive, à son Etat. Autrement dit , Israël se présente comme « l’Etat nation du peuple juif », sans avoir organisé de cadre juridique concernant le lien entre la nation juive et sa terre. Aussi, et contrairement à l’ensemble des pays démocratiques, Israël peut, à terme, être contrôlé par ses résidents peu importe leur origine ou leur identité culturelle ou cultuelle, comme l’illustre le fonctionnement de la Knesset qui comprend en son sein, des députés palestiniens qui légifèrent pour l’Etat juif (une véritable aberration). L’Etat juif perd alors sa sérénité, compte tenu de la natalité importante des personnes palestiniennes qu’il appelle « arabes israéliennes » (alors qu’elles-mêmes se disent palestiniennes), même si l’aliyah permet de maintenir une proportion de juifs à hauteur de 80 % de la population totale. Certaines parades ont été trouvées qui ne sont en fait, que des rustines qui occultent le véritable problème.

Ainsi, Israël a récemment décidé de retirer la citoyenneté israélienne à des centaines de bédouins du Néguev qui l’avaient acquise à tort. Il s’agit généralement de personnes dont les grand parents ne se sont pas fait inscrire entre 1948 et 1952 puisque les villages était administrés par Tsahal et, précédemment, par l’administration Britannique. Un rapport de 2016 (intitulé « Enregistrements erronés d’habitants du Néguev »), mentionne que « le problème pourrait concerner jusqu’à 2 600 personnes susceptible de perdre leur citoyenneté israélienne à cause d’enregistrements erronés».

Par ailleurs, Israël retire la citoyenneté aux israéliens qui se livrent à des actes terroristes : le Tribunal de Haifa a, le 9 août 2017, déchu de sa citoyenneté, un israélien de 22 ans ayant commis un attentat à la voiture bélier contre des policiers et une attaque au couteau contre des passants. La mère du criminel, arabe israélienne, s’était mariée avec un palestinien ayant obtenu un droit de résidence en Israël (que le Ministre de l’Intérieur voudrait bien lui retirer). Or, ce phénomène devrait se multiplier puisque selon le rapport du Shin Beth remis au Tribunal, 98 personnes nées de couples mixtes arabes israéliens et palestiniens sont impliquées dans des activités « terroristes » depuis 2001. Ces jeunes se présentent d’ailleurs comme palestiniens et ne cache pas qu’Israël est leur ennemi.

Pour renforcer le nombre de juifs en Israël, le Premier Ministre envisage le dépôt d’un texte de Loi visant à permettre à des millions de personnes de s’établir en Israël : il s’agit de ceux dont les ancêtres se sont convertis au judaïsme, des communautés « juives émergentes » adoptant les pratiques juives, et ceux qui disent descendre des « tribus perdues » d’Israël…

La solution au problème est toutefois beaucoup plus simple : il suffit d’instituer une « nationalité israélienne » (leoumiyoute) aux côtés de la citoyenneté israélienne (Ezrahoute) qui serait réservée aux seuls juifs. Eux seuls bénéficieraient alors de la faculté d’être candidats ou éligibles aux scrutins nationaux (Knesset, mandat de Ministre, Président de la République…). Pour leur part, les citoyens israéliens non nationaux (les populations non juives) bénéficieraient de tous les droits civiques, et bien évidemment du droit de vote aux scrutins locaux, à l’exception des scrutins nationaux. Israël conserverait alors et définitivement, un contrôle étatique juif.

Dans les pays démocratiques, les non nationaux ne peuvent exercer de fonctions électives ou des mandats de représentation de la nation. Lorsque Israël se sera doté de cet outil juridique, les juifs du monde entier pourront solliciter la nationalité juive et Israël comprendra 15 millions de nationaux, face aux 1.4 millions de non nationaux insusceptibles de modifier le contrôle politique juif. Si l’Etat juif n’accepte pas sa vocation historique (et transcendantale) de « pays juif, par les juifs pour les juifs », il disparaîtra : nul besoin de l’Iran, de la barbarie palestinienne ou de l’immigration massive des populations africaines pour ce faire. La clé est entre ses mains.

Par Maître Bertrand Ramas-Muhlbach

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danielle

Exact Maitre Muhlbach !
Mais je ne comprends pas faut-il être religieux pour saisir l’urgence vitale de la Judaïcité d’Israël ?
Les Juifs Israéliens veulent être Juifs mais sans obligations en dehors de rester pour la paix des Hommes, qu’ils croient !