C’est la sombre considération qui occupait mon esprit en prenant conscience du drame qui se déroule sous nos yeux à Gaza et qui aurait pu être évité, si ses véritables instigateurs n’avaient pas décidé de masquer l’échec de leur entreprise, entamée il y a déjà une décennie.

Des Palestiniens manipulent des pneus destinés à être brûlés afin de fournir un rideau de fumée protecteur face à l’armée israélienne, le 15 mai 2018 à la frontière entre Gaza et Israël.

Cette phrase qui sert de titre à cet éditorial, tirée d’un verset lu dans le premier livre de Samuel, fut prononcée lors d’une rencontre entre les chefs d’état majors ennemis, celui de David qui avançait à grands pas vers les marches du trône et celui du roi Saül qui faisait tout pour conserver le sien… C’est le général Avner ben Ner face au général Yoab ben Sérouya.

La phrase hébraïque s’énonce ainsi : ha-la-nétsah to khal hareb ? C’est un appel à la cessation de la guerre et des hostilités de toutes sortes dans une longue confrontation fratricide. Cette phrase a été aussi choisie comme titre des Mémoires du général Moshé Dayan, l’un des soldats les plus célèbres et les plus glorieux de l’Etat juif.

La première idée qui s’impose à mon esprit est la folie meurtrière des dirigeants actuels de la bande de Gaza qui, pour masquer leur échec patent à développer, ou à simplement administrer un territoire conquis par la force armée, lancent une partie de la population contre les barrières les séparant d’une frontière internationalement reconnue.

Même les gouvernements arabes ou musulmans de la région se sont mis aux abonnés absents et la réaction de certains est proche d’une valeur égale à zéro, comparée à l’enjeu. C’est peu dire, même le pouvoir légal de Ramallah suit en traînant les pieds. Et les trois jours de deuil public étaient le minimum requis.

La palme de la lucidité et même de l’objectivité revient dans ce conteste à l’Egypte qui n’a stigmatisé la réaction –légitime- d’Israël que du bout des lèvres.

En revanche, en coulisses, elle est allée bien plus loin. D’après certaines sources, généralement bien informées, les autorités ont sèchement convoqué Ismaïl Hanniyé au Caire et auraient même dépêché un hélicoptère militaire afin de le transporter dans la capitale sans perdre un seul instant.

C’est le chef des renseignements militaires égyptiens qui l’a reçu le jour même et lui a intimé l’ordre de cesser sur le champ toutes ses provocations sur le terrain, faut de quoi l’Egypte ne dissuaderait pas Tsahal de s’en prendre directement à sa personne et à celle des autres dirigeants du mouvement terroriste. Sitôt dit, sitôt fait : il faut dire que la menace des pires sanctions avait été brandie par le général égyptien, en cas de désobéissance. Et le Caire a toujours son mot à dire dans ce conflit depuis tant d’années.

C’est ce qui explique qu’après avoir atteint son paroxysme, les mouvements de foules à la frontière avec Israël ont complètement disparu, seuls quelques cas isolés ont été signalés depuis. La tension est retombée et les Égyptiens qui savent tout ce qui se passe sur la bande côtière, ont expliqué au Hamas qu’il ne pouvait pas, pour sauver sa tête, mettre en péril tout l’équilibre de la région. Car, économiquement et politiquement, ce mouvement terroriste est au bout du rouleau. Bientôt, si on ne fait rien, la pénurie sera là…

Toutefois, usant de moyens criminels et aussi que la morale réprouve, le Hamas a marqué des points sur le terrain des médias et on sait tous très bien aujourd’hui que seule la communication compte et rien d’autre. J’en veux pour preuve ce qui se passe à la frontière avec Gaza dont, dois je le redire, je déplore les morts. Car, hormis des membres des brigades armées, infiltrés au sein des manifestants, ces derniers ne savaient pas vraiment qu’ils allaient vers un objectif, susceptible de leur coûter la vie…

Et l’opinion publique internationales, habituée à pourfendre toutes action d’Israël, a jugé d’après les volutes de fumée, le nombre de morts et de blessés, sans recourir à un raisonnement simple mais nécessaire : devait on laisser la foule pénétrer en territoire israélien et y perpétrer des attentats ? Qu’aurait alors dit cette même opinion habituée à voir couler le sans des Juifs sans réagir. Il faut dire que le peuple d’Israël se retrouve toujours seul à enterrer ses morts. Si le pouvoir est au bout du fusil (selon Mao), la vérité est, hélas, trois fois hélas, ce que la caméra de journalistes pas vraiment impartiaux veut bien filmer dans toutes les zones de tension…

Mais par delà le cynisme et la cruauté du Hamas, il faut bien dire un mot de la profonde tristesse qui s’empare de nous quand on lit la presse tant européenne qu’internationale. On a alors l’impression d’être incompris, que l’histoire est sans cesse falsifiée, que nous somme seuls. A part certaines chaînes, c’est I24News qui s’efforce de donner une vue équilibrée de la situation, donnant la parole tant à des Israéliens qu’à des Palestiniens.

Je m’abstiendrai de commenter les réactions outrancières du Grand Turc qui donne des leçons à qui veut bien l’entendre, rappelle Israël soi-disant à ses devoirs (songez donc : il lui dit de relire le Décalogue), lui, M. Erdogan qui martyrise les Kurdes et viole l’intégrité territoriale d’un pays voisin dont le chef ne vaut guère plus que lui-même… Mais dans les coulisses , ce cher homme poursuit de lucratives relations avec l’Etat juif… juste le temps de gagner les futures élections de juin et puis tout rentrera dans l’ordre. En matière de cynisme éhonté le grand Turc est imbattable, insurpassable.

L’esprit partisan et les réactions victimaires me sont étrangères intrinsèquement : et tous ceux, et ils sont nombreux, qui visitent régulièrement depuis une bonne décennie ce blog, le savent très bien. Alors comment oser s’en prendre aux conséquences (des morts dont nous déplorons la disparition sincèrement) sans jamais considérer les causes, prochaines ou lointaines, pour parler comme Leibniz.

Cette «marche du retour» visait à pénétrer en territoire israélien par la violence et à y perpétrer des attentats qui auraient coûté la vie à des citoyens israéliens…

Songez que le kibboutz Nahal Oz (en hébreu : le fleuve de la force) est à moins d’un kilomètre des barrières de sécurité. Et en dépit des multiples mises en garde, en dépit de toutes les menaces, le Hamas a lancé ses propres troupes et d’autres manifestants contre la frontière… Or ces gens ont sectionné les barbelés, déposé des engins explosifs sur les barrières, et même fait des tentatives d’infiltrations…

Que devait faire Tsahal ? Accueillir les assaillants les bras ouverts, comme s’ils venaient leur offrir des fleurs et des chocolats ? Il est assez scandaleux de voir des diplomates si sérieux au Conseil de sécurité de l’ONU énoncer sans ciller de grandes contre-vérités et se refusant obstinément à tenir à égalité les deux plateaux de la balance.

Et c’est bien ce qui plonge les Israéliens mais aussi les juifs du monde entier dans une tristesse et une amertume sans fond. Nul, à part les amis d’Israël (et qui se font bien rares cet an ci) ne veut considérer l’ensemble du problème. Un exemple : quand on dénonce le terrorisme du Hamas, on nous répond que ses partisans veulent rentrer chez eux. Quand on dit que l’Etat d’Israël, ce n’est pas chez eux, on rétorque que les Juifs sont des usurpateurs, des accapareurs, des occupants, que leur Etat est illégitime, etc… etc…

Il est absolument sidérant de prendre connaissance des titres et de la une de certains journaux, pourtant plus enclins à l’équilibre et à la pondération… Mais voilà quand il s’agit d’Israël, les choses changent de manière inexplicable. Tout le monde, le monde entier, a droit à un état sur cette terre, excepté les juifs…

Personne n’a parlé des explosifs, des cisailles apportés à la frontière dans la gibecière des manifestants. Pourquoi donc, s’il ne s’agissait que d’une marche pacifique ?

On ne comprend pas très bien. Personne ne parle de la nature même du Hamas que tant l’ONU que l’UE reconnaissent comme un mouvement terroriste : mais dans ce cas précis, aucune institution, aucune arène, aucune juridiction internationale n’a jamais parlé de citer à comparaître les chefs du mouvements qui ont arraché à leurs frères Gaza par la force. Et les mêmes s’empressent de demander que l’on se saisisse des fautes prétendument commises par Tsahal. Étrange…

Même en France, la seule voix qui s’est élevée pour reconnaître à Israël le droit de se défendre, émane du … Front National.

Quelle leçon tirer de tout cela ? La cause palestinienne n’intéresse plus les capitales arabes du Proche Orient qui ont fini par comprendre qu’elles se trompaient d’ennemi. Ce n’est pas Israël qui les menace –et d’ailleurs elles s’en rapprochent- c’est l’Iran des Mollahs. Je suis étonné par la faiblesse des réactions concernant le statut de Jérusalem : les gens honnêtes ont enfin compris que cette reconnaissance ne changeait rien au statu quo : tous ceux qui veulent y prier peuvent le faire.

Mais je ne résiste pas à la tentation de rappeler un bon mot du grand historien français du XIX e siècle, Salomon Reinach : s’il fallait rendre Jérusalem à quelqu’un ce serait aux Jébuséens. Allusion à l’antique conquête par le roi David de ce petit village de bergers, juché sur un piton rocheux, donnant sur un espace pauvre et inhospitalier, que fut jadis Jérusalem avant que le génie, la sagacité et la persévérance du peuple d’Israël ne s’y déploient pleinement.

Maurice-Ruben Hayoun

Le professeur Maurice-Ruben Hayoun, né en 1951 à Agadir, est un philosophe, spécialisé dans la philosophie juive, la philosophie allemande et judéo-allemande de Moïse Mendelssohn à Gershom Scholem, un exégète et un historien français. il est également Professeur à  l’université de Genève. Son dernier ouvrage: Franz Rosenzweig (Agora, universpoche, 2015)

Le nouveau cycle de conférences, Aux racines de la culture européennese penche sur l’humus spirituel et les valeurs premières qui gisent au fondement de ce continent. Mais l’Europe n’est pas seulement un continent, c’est aussi et surtout une culture, axée autour de courants spirituels et d’écoles philosophiques, qui passent à juste Titre pour sa constitution théologico-politique ou éthique.

Les réflexions qui seront exposées dans la salle des mariages de la Mairie de notre arrondissement couvrent la critique biblique, la littérature éthique, la philosophie médiévale sous son triple aspect, gréco-arabe, chrétienne et juive au miroir des pères spirituels de l’Europe : Thomas d’Aquin, Maimonide, Averroès et Maître Eckhart.

Salle des Mariages Mairie du 16e Arrondissement – 71, avenue Henri Martin- 75016 Paris

Jeudi 11 janvier -19h
Hannah Arendt, égérie de Martin Heidegger?

Jeudi 8 février – 19h
Le Moïse de Sigmung Freud, selon Y. Yerushalmi

Jeudi 15 mars – 19h
Franz Rosenzweig, la philosophie et la Révélation: le problème de la Vérité

Jeudi 5 avril – 19h
Emmanuel Levinas et Moïse Maimonide

Jeudi 17 mai – 19h
L’historien Marc Bloch et Simone Veil face au Kaddish

Jeudi 7 juin – 19h
La langue judéo-arabe: plaidoyer pour une culture (presque) oubliée

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