Bibi et les menteurs

Bibi et les menteurs

Le premier sentiment à l’écoute des incroyables révélations du premier ministre israélien le dimanche 30 avril a été une sorte de stupeur admirative. Comment ?

Des agents israéliens infiltrés en Iran sont arrivés à pénétrer dans le saint des saints de la recherche nucléaire iranienne ? L’endroit où sont entreposées les archives les plus secrètes ?  Ils ont pris le temps d’en retirer une demie-tonne de matériaux ultra secrets – documents et disques – sans être détectés ? Enfin ils ont réussi à faire sortir cette masse considérable du territoire iranien ? Il s’agit là d’un exploit à faire pâlir tous les James Bond du monde. On imagine les risques encourus, le sort qui aurait été celui des agents s’ils avaient été pris.

Ensuite, à la lumière de ce qui a été décrypté par les experts israéliens, on prend la mesure de l’étendue de la duplicité des dirigeants iraniens. Ils ont répété à l’envie que leur pays n’avait jamais eu l’intention de développer l’arme atomique, laquelle de surcroît serait contraire aux principes de l’Islam, alors que justement, il ressort des documents que développer cette arme est pour l’Iran un objectif stratégique essentiel -et rien ne permet de penser que cet objectif a changé.

La prestation du premier ministre  a été  retransmise  en direct et dans son intégralité par la chaîne CNN à grande écoute et l’essentiel repris par l’ensemble des médias occidentaux et arabes. Il s’est produit alors un phénomène curieux. A peine le feu des projecteurs éteints, une vigoureuse contre-offensive se déclenchait. La cause est entendue clamaient en chœur les médias. La montagne a accouché d’une souris. Les soi-disant révélations du premier ministre israélien ?

De vieilles histoires que tout le monde connaissait et qui d’ailleurs ne prouvaient rien. Ou plutôt qui prouvent à quel point l’occident avait eu raison de conclure un accord avec l’Iran pour bloquer tout risque de développement de l’arme nucléaire.  D’ailleurs, tout laisse à penser que Téhéran respecte ses obligations puisque les contrôles des experts de l’Agence Internationale pour l’énergie atomique n’ont décelé aucune infraction à ce jour.

Bref, les critiques fusent de toutes parts. Pas question de saluer l’exploit du Mossad, généralement passé sous silence. On accuse Benjamin Netanyahu d’avoir fait une tentative de diversion pour faire oublier ses ennuis juridiques et autres ; on lui reproche d’apporter sciemment de l’eau au moulin de Trump pour convaincre le président américain de se retirer de l’accord. Enfin on s’indigne de ce que lui, leader d’un pays qui détiendrait l’arme atomique, se permette de s’opposer à ce que d’autres en disposent.

Les commentaires que les équipes de modération des grands quotidiens laissent passer avec complaisance se déchaînent contre l’Etat hébreu et celui qui le dirige. Il faut prêter l’oreille pour entendre le tintement lointain d’autres sons de cloche. On retiendra notamment le communiqué prudent de L’AIEA qui, selon l’AFP, a déclaré n’avoir « aucune indication crédible d’activité en Iran liées au développement d’un engin nucléaire après 2009. »  Netanyahu n’a rien dit de tel.

Des voix dans les capitales européennes parlent tout à coup de « révisions » à apporter à l’accord. Les experts de l’AIEA veulent voir les documents recueillis par Israël. On retiendra surtout que des représentants de la France, de l’Angleterre et de  l’Allemagne s’apprêtent à se rendre discrètement à Tel Aviv pour visionner ce qui, pour eux, est un matériel inédit et préoccupant. Parce qu’ils ont compris, eux. Ils ont compris que comme l’a martelé celui qu’amis et ennemis appellent « Bibi », l’Iran a menti lors des négociations qui ont conduit à l’accord.

Par ©Michèle Mazel