Syrie : pourquoi les démocraties protestent-elles sans agir?

Le drame syrien est un échec des démocraties et notamment de la France, un échec pour l’ONU et pour la chrétienté ainsi que pour les syriens eux-mêmes.

Il s’appelait Posidonius, et son enseignement fit courir vers lui les meilleurs orateurs gréco-latins, jusqu’à Cicéron.

La thèse principale de ce savant et philosophe était la « sympathie »: tout comme le doigt coupé affecte l’intégralité du corps, chaque élément de l’Univers est lié au Grand Tout; nul individu, nulle nation, nulle planète ne peut s’abstraire ni s’absoudre du reste de l’Univers.

Si Posidonius revenait dans son pays natal, il en pleurerait.

Le sage a vu le jour vers 135 avant Jésus-Christ, à Apamée, dans le nord de l’actuelle Syrie.

Du fleuve de sang qui sert désormais d’affluent à l’Euphrate nous parviennent depuis un an des cris de douleur et de colère, qui ne font que souligner notre impuissance.

Les vendredis de prière réprimés, les funérailles de martyrs mitraillées, les manifestations démocratiques écrabouillées: rien ne parvient à sortir la communauté internationale, non de son aphasie – elle hurle sa réprobation – , non de son apathie – elle s’agite sans cesse – , mais de son aporie.

En effet, les démocraties ne peuvent que constater sans agir, déplorer sans combattre et attendre sans intervenir.

L’aporie, c’est un échec sans fautif, c’est le confort un peu honteux de la fatalité.

Cet échec, pourtant, c’est d’abord celui de la France.

Le mandat que notre pays a exercé sur ce bout de Levant nous impose d’y combattre les ténèbres.

Nous le fîmes tant bien que mal pour aider le Liban, nous ne pouvons renoncer face à la guerre civile qui déchire Damas et Homs.

Rompant avec l’ostracisme chiraquien, Nicolas Sarkozy a choisi de considérer Bachar el-Assad, de lui offrir un siège parmi les puissances respectables.

Le massacre téléguidé par le dictateur consacre le fiasco diplomatique du président français, tout comme la razzia sur Benghazi sanctionna son tango cynique avec Kadhafi: en Libye, Sarkozy sut empêcher le pire et effacer sa faute – et même plus, et même mieux -; en Syrie, où est-il, que fait-il?

L’échec est aussi celui des Nations unies.

Derrière l’incapacité du Conseil de sécurité à bousculer la Russie et la Chine, amies du prédateur, perce l’obsolescence de l’ONU.

Construite pour le monde issu de 1945, elle est incapable de gérer ces drames nouveaux que sont les menaces terroristes, les guerres civiles imbriquées ou les printemps arabes qui tournent mal.

Les pays émergents fuient leurs responsabilités et ne songent qu’à leur PIB, les anciennes puissances se paient de mots pour cacher leur sénescence.

La Syrie prouve, après d’autres drames, que les Nations unies doivent céder la place à un Parlement mondial.

Echec aussi pour la chrétienté, si prompte, d’habitude, à soutenir les victimes de tout conflit, mais qui se demande quel sera le sort de ses fidèles – 10% du peuple – si la rébellion l’emporte sur le Baas et accouche d’un islamisme radical.

Echec enfin des Syriens eux-mêmes: comme l’a signalé, lucide, Nicolas Sarkozy, ils ne trouvent pas l’unité nécessaire contre « Bachar le Boucher ».

Au chevet de la Syrie, impuissance rime donc avec souffrance.

Les Syriens, sans cesse brutalisés à travers les âges, sont hélas habitués. Se consoleront-ils en songeant que Posidonius était stoïcien?

Christophe Barbier

le 22/02/2012

http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-orient/syrie-pourquoi-les-democraties-protestent-elles-sans-agir_1085064.html#xtor=AL-447

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Jean

Chers amis, en ce printemps qui point, ne voyez vous rien venir ?

De plus en plus , les musulmans sunnites se mettent à haïr Russes et Chinois , qui comme je m’échine à le dire depuis le début de la guerre civile en Syrie,ont décidé de mettre le holà au laxisme , à la faiblesse , au suicide des Occidentaux face au monde arabo_musulman.

Trop , c’est trop . Eh quoi l’islam fondamental va t il poursuivre sa conquête du monde ainsi sans combat ? Sans le moindre Stalingrad ? Est ce là ” la longue marche ” du Dhar El Harb (espace de la guerre ), cette conquête tranquille et rampante du monde par l’immigration et par le ventre fécond des femmes musulmanes ?

Trop , c’est trop !

Si l’Occident est , de par sa tortueuse histoire , devenu décadent , la chine et la Russie ne le sont pas , elles .

Elles ne veulent pas laisser ce si beau monde aux mains de ces gnomes barbus qui vont tout démolir . Elles ont pris le gouvernail de la géopolitique du monde .

Et l’ironie de l’histoire va désormais placer face à face les anciens amis du 20 ème siècle soit les communistes et …..les Arabo-musulmans , nos anciens ennemis

N’oublions pas , chers amis , que les nationalistes arabes ( Assad, Nasser , S. Hussein ) ne sont que des Islamistes déguisés : aujourd’hui , la vareuse du Moudjahid nationaliste , demain la djellaba du frère. L’arme est la même , la haine de l’autre aussi.

Et là , les anciens alliés vont s’en mettre plein la tronche .

C’est encore la leçon de Hatgadïa (Séder de Pessah )qui doit tenir lieu de référence et de leçon historique.