La première édition du Prix Ilan Halimi, Prix de la Tolérance et de la Fraternité, initié par le Fonds social juif unifié dès mars 2006, placé sous le haut patronage de Nicolas Sarkozy, a été remis mercredi 2 décembre 2009, en présence de Ruth Halimi, par Jacques Chirac, dans la Salle des Fêtes de l’Hôtel de Lassay à l’Assemblée nationale.

De très nombreuses personnalités assistaient à l’événement : Simone Veil, Tzipi Livni, Nicole Guedj, Pierre Lellouche, Claude Goasguen, François Zimeray, Avi Pazner, Joël Mergui, Mohamed Moussaoui, Dalil Boubakeur, les grands rabbins Joseph Sitruk et David Messas, les ambassadeurs d’Israël, d’Egypte, de Jordanie, du Maroc, du Quatar, de Tunisie, le Conseiller de l’Ambassade de Turquie, la Représentante de l’Autorité Palestinienne, ainsi que de nombreux parlementaires et membres de la société civile comme Francis Szpiner, avocat de la famille Halimi. Au total trois cents personnes s’étaient pressées pour assister à l ‘événement.

Le Prix Ilan Halimi 2009, Prix de la Tolérance et de la Fraternité, récompense la démarche de la Maison des Jeunes et de la Culture de Ris-Orangis, qui s’incarne dans le rapprochement de jeunes de Ploemeur en Bretagne, de Tel-Aviv-Jaffa en Israël et de Ris-Orangis en banlieue parisienne. Ce dialogue débouche sur la création d’une pièce de théâtre jouée dans les trois villes en juillet 2010
Photo (de gauche à droite) : Dina Kawar (Ambassadrice de Jordanie), Dany Shek, Simone Veil, Bernard Accoyer, Pierre Besnainou, Tzipi Livni, Ruth Halimi, Joseph Sitruk et Dalil Boubakeur
Accueilli par Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale

Bernard Accoyer a souligné à quel point les valeurs de tolérance et de fraternité sont au cœur de l’idée de la République et que l’Assemblée nationale, plus que tout autre lieu ou monument, les incarne. L’Assemblée est aussi par définition le lieu des divergences, des différences et des oppositions (…) et, a-t-il affirmé, la démocratie, c’est quand la civilisation remplace la barbarie.

Il a souligné qu’il y a dans cette tragédie, quelque chose qui concerne la République et que les responsables publics ne peuvent éluder la question de leur responsabilité. Qu’avons-nous fait ou laissé faire pour qu’un tel événement ait pu avoir lieu dans la France de 2006 ? Que faisions-nous en 2006 ? Que faisons-nous en 2009 pour qu’il ne se reproduise pas ? Se réjouissant de la présence de hauts représentants de la communauté musulmane, il s’est dit convaincu que la force de la République est de rassembler, dans la citoyenneté, dans des valeurs et dans un destin partagé, des Français d’origines, d’opinions et de religions différentes.
Photo : Bernard Accoyer entouré d’Ariel Goldmann (à gauche) et de Francis Szpiner
Nous avons choisi la vie, par Pierre Besnainou, président du FSJU

Dans un discours empreint d’émotion, Pierre Besnainou s’est, d’abord, adressé à Ruth Halimi qui, a-t-il rappelé, travaille au Fonds social juif unifié, évoquant sa dignité et sa grandeur. Il s’est félicité de la présence de nombreux ambassadeurs de pays arabes, ainsi que de celle de la Déléguée de l’Autorité Palestinienne en France, un symbole fort. Il a également salué la présence des parlementaires et des représentants des cultes religieux. C’est un rassemblement où l’on est venu dire que l’antisémitisme est quelque chose qui ne peut pas avoir lieu en France ! Il a souligné qu’en créant le Prix, le Fonds social juif unifié a voulu, avec Ruth Halimi, lancer un message fort de dialogue, de tolérance. Nous avons voulu aussi rappeler combien au Fonds social juif unifié la nécessaire volonté de dialogue et de compréhension des autres est notre quotidien ». S’adressant au président Jacques Chirac, il s’est souvenu que, durant les sombres années 2000 où les synagogues étaient attaquées, ce dernier a déclaré que ces actes sont une tache sur le drapeau de la République. Pour conclure, Pierre Besnainou a rappelé que le Prix répond à un triple objectif : Que la mémoire d’Ilan soit pour tous les Français, un phare, une lumière. C’est une espérance de fraternité, l’espérance que ceux qui vivent dans ce pays apprennent à mieux se comprendre. C’est un idéal important que d’encourager le dialogue. Je dirais enfin comme nous le transmet la tradition juive : tu choisiras la vie… Et nous avons choisi la vie.
Le choix du Jury par Ariel Goldmann, vice-président du FSJU

Ariel Goldmann, vice-président du Fonds social juif unifié a expliqué le choix du Jury. En 2007, l’appel à projet est largement diffusé dans les réseaux de l’éducation populaire. Le choix du Jury s’arrête sur l’initiative de la Maison des Jeunes et de la Culture de Ris-Orangis. A l’origine du projet, explique-t-il, il y a un éducateur, Max Leguem, aujourd’hui directeur de la MJC de Ris-Orangis, qui confronté au racisme et de l’antisémitisme décide d’agir. Des rencontres internationales l’amènent à nouer des échanges professionnels, avec le centre culturel arabo-juif de Tel-Aviv Jaffa, qui s’élargissent ensuite à la Maison des Jeunes de Ploemeur, dans le Morbihan. Ris-Orangis est jumelée avec une ville palestinienne et israélienne. Dans cette ville de banlieue, vivent des communautés juives et musulmanes…

A la Maison des Jeunes et de la Culture de Ris-Orangis, une équipe de théâtre travaille sur les problèmes de société. Une de leur création, « Place des Mythos » a, par le passé, remporté de nombreux prix. Des échanges de professionnels, puis de jeunes ont lieu, entre la France et Israël, afin de mieux se connaître. De ces échanges naitra un spectacle de théâtre et de danse contemporaine « Derrière les murs, la mer », joué en anglais, en français, en arabe et en hébreu. Les équipes éducatives, conclut Ariel Goldmann, ont su canaliser des expériences, des énergies et des projets multiples… Ce Prix est, surtout, celui des jeunes qui ont donné vie à ces programmes.
Les paroles justes de Jacques Chirac

Jacques Chirac a su trouver les mots de l’émotion, les mots du cœur, de la fraternité. Il a cité en hébreu la formule « Zakhor, Al Tichkah » (souviens-toi n’oublie pas) qu’il a prononcé en 2005, lors de la commémoration des soixante ans de la libération du Camp d’Auschwitz. Ce n’est pas le nombre qui fait l’horreur d’un crime. C’est la barbarie de l’assassin ! Il a souligné que l’antisémitisme n’est pas une opinion, mais une perversion qui tue ! Mon inquiétude, aujourd’hui, est que, bien au-delà de cette barbarie, bien au-delà des crimes, l’antisémitisme et toutes les formes de racisme sont encore là, insidieusement présents dans notre société. Il a estimé que trop de discriminations stigmatisent la religion, l’origine, les convictions et minent notre pacte républicain. Elles empoisonnent notre démocratie et remettent en cause notre cohésion nationale. Elles portent atteinte au respect auquel chacun a droit. Elles laminent, notamment chez les jeunes, la foi dans les valeurs de la République.

Face au racisme, face à l’antisémitisme, face au rejet de l’Autre, notre mobilisation doit être sans faille, a-t-il poursuivi. Nous devons nous inscrire résolument dans la fidélité de nos valeurs. Nous devons faire évoluer les esprits. Nous devons redonner confiance dans la République.

Il a salué l’initiative de la Maison des Jeunes et de la Culture de Ris-Orangis qui, dit-il, fait triompher l’esprit de tolérance et d’ouverture et correspond profondément à une vision du monde à laquelle je crois. Je crois à la primauté du droit sur la force. Je crois au refus intransigeant des haines ethniques et religieuses. Je crois au respect et à l’égalité des cultures et des civilisations. Oui, je crois en l’Homme et en ses capacités, a conclu avec conviction l’ancien président de la République.
Photo : Jacques Chirac remet le prix à la MJC de Ris-Orangis, représentée par Yvonne Stival et Vincent Vennin
La Maison des Jeunes et de la Culture de Ris-Orangis

Vincent Vennin, vice-président de la Maison des Jeunes et de la Culture de Ris-Orangis s’est fait le porte parole du projet. Le jeune homme en a retracé la philosophie, exprimant au nom de tous la fierté et la reconnaissance d’avoir été choisi par le Jury. S’adressant à Ruth Halimi, il a tenu à rappeler que le Prix est avant tout un hommage rendu à son fils, victime des maux que nous voulons combattre, de toutes nos forces ! Il a expliqué que le projet est né des tensions existantes dans les quartiers entre juifs et musulmans. Elles sont la projection d’un conflit qui a lieu à 4000 kms de là et de préjugés, tant du côté arabe que du côté juif, par manque d’éducation civique, tout est amalgame stupide, a-t-il précisé. Ce projet entend amener des jeunes de ces deux pays à complexifier leur regard sur le monde, en multipliant les points de vue… à saisir l’universalité des questionnements… à rencontrer l’Autre, à partir d’un travail commun, un objet artistique. A travers les premières rencontres, les jeunes ont compris l’importance de mieux se connaître pour progresser. Nous vivons une formidable aventure humaine, chaque voyage est un bouleversement pour chacun d’entre nous… Nous en ressortons à chaque fois grandi ! L’autre n’est jamais ce que l’on croit, chaque conflit est l’expression d’une réalité plurielle. Enfin, a-t-il affirmé, pour changer les choses, il faut éduquer, mais, pour éduquer il faut du temps, le temps de grandir et de comprendre (…). Pour rêver, il nous faut un autre imaginaire… et pour rêver loin, il faut rêver ensemble !
Photo : Jacques Chirac avec les jeunes de la MJC de Ris-Orangis
Le point de vue de Ruth Halimi

Ruth Halimi, quel regard portez-vous sur la création du Prix Ilan Halimi ?
C’est une excellente chose. L’histoire d’Ilan est effroyable, il faut tout faire pour que cela ne se reproduise jamais. Cette initiative du Fonds Social Juif Unifié va en ce sens. Je ne puis que l’approuver et la soutenir. Il faut apprendre à partager et à accepter l’Autre. Nous sommes tous des êtres humains, tous à égalité. Ne l’oublions jamais. La remise d’un Prix de la Tolérance et de la Fraternité est aussi un travail de mémoire. Je le salue.

Vous vous préoccupez beaucoup des jeunes
Il faut les motiver avec des valeurs positives. Aujourd’hui, il y a la crise. Pour les jeunes des banlieues, tout y est sans doute encore plus compliqué. Il faut que ceux qui ont la démarche, la volonté de s’en sortir, de réussir, soit encouragés, aidés. Ils ne doivent pas avoir le sentiment d’être exclus de la société, que quoi qu’ils fassent c’est fichu.

Pensez-vous que le procès du « gang des barbares » a valeur d’exemplarité ?
Malheureusement, mise à part pour le principal accusé, j’ai le sentiment que les peines ont été trop légères. Il faudrait que participer à quelque chose d’aussi horrible soit extrêmement puni. Cela n’a pas été le cas, à mon avis.

Le lauréat du premier Prix Ilan Halimi est la MJC de Ris-Orangis
C’est un excellent choix. Leur action s’inscrit au cœur de la problématique des banlieues. Etre, comme les jeunes de cette Maison des Jeunes et de la Culture, à l’écoute des autres, ne pas faire de différences entre les cultures, les religions, la couleur de l’Autre, accepter l’Autre, c’est exactement ce qu’il faut faire.
Photo : Ruth Halimi avec Tzipi Livni, Simone Veil et Jacques Chirac

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