Le meneur notoire d’une croisade anti-drogue, Yevgeny Roizman, est prêt à lancer une nouvelle bataille – le nettoyage de la quatrième ville de Russie, Yekaterinburg.

« Les gens des réseaux de drogue avaient déjà peur de Roizman, avant qu’il ne soit élu »
Le Maire de Yekaterinburg, Yevgeny Roizman, parlant à l’une de ses aides de camp, à l’extérieur de son bureau, le 17 Oct. 2013. (photo credit: Brendan Hoffman/Getty Images/JTA)

YEKATERINBURG, Russie (JTA) — Ayant grandi dans l’une des villes les plus riches d’Union Soviétique, Elena Chudnovskaya n’avait jamais imaginé qu’elle élèverait sa fille dans un endroit autant peuplé de toxicomanes, à tel point que « les seringues jonchent les parterres de fleurs ».

Mais, c’est pourtant bien ce qui est arrivé à son bloc d’immeubles du centre-ville, après l’effondrement du communisme, lorsque le chômage endémique et la proximité avec les pays producteurs de drogue ont provoqué une épidémie de narcotiques dans des proportions alarmantes, dans cette capitale de province de 1,3 million d’habitants à environ 1.450 kms à l’Est de Moscou.

Au cours de la dernière décennie, tout a changé. Chudnovskaya et sa fille âgée de 15 ans ont, progressivement oublié de prêter attention aux Junkies, qu’on aperçoit plus rarement, à présent, à Yekaterinburg.

Comme responsable d’un tel changement, elle crédite l’homme qu’elle a contribué à élire en tant que Maire, le mois dernier : Yevgeny Roizman, un militant aux idées très claires, fort de son palmarès impressionnant de succès dans la lutte contre le problème de la drogue, qui a infligé une rare défaite au candidat préféré du Président Vladimir Poutine.

« Les gens des réseaux de drogue avaient déjà peur de Roizman, avant qu’il ne soit élu », signale Chudnovskaya. « Désormais, ils parlent de trouver un autre endroit où s’établir ».

Même avant qu’il ne devienne Maire de la Quatrième grande ville de Russie, Rozmain, 51 ans, avait déjà acquis une notoriété internationale, grâce au succès de « Ville sans Drogue », l’organisation qu’il a mise en place, en 1999, qui est très largement créditée d’avoir réalisé une transformation radicale de Yekaterinburg.

Mais cette mutation ne s’est pas opérée sans qu’il faille en payer le prix. Des allégations de violence et d’intimidation jalonnent le parcours de Roizman et de l’équipe de son organisation, qui se sont engagés dans des pratiques radicales, comme d’enlever les toxicomanes et les menotter à des lits de métal pour y subir une désintoxication angoissante.

“Nous avons fait face au problème de la drogue et, aujourd’hui, il n’y a pratiquement pas de vente d’héroïne dans cette ville », affirme Roizman, un colosse d’1 m 88 tout en muscles, qui porte des T-shirts moulants et des baskets quand il part travailler.


Le Maire d’Yekaterinburg, Yevgeny Roizman rencontrant u de ses administrés à son bureau, le 17 octobre 2013. (photo credit: Cnaan Liphshiz/JTA)

“Ville propre sans drogue” travaille, à présent, avec les représentants de la loi, mais l’organisation a débuté comme une association de voyous. Au fil des années, elle a « traité » plus de 6.500 toxicomanes et contribué à l’arrestation et aux poursuites judiciaires contre plus 3.300 suspects de trafic de drogue, selon le tableau présenté par l’organisation elle-même.

Roizman qui a, lui-même, passé deux ans en prison pour vol, au cours des années 1980, affirme qu’il sait « comment communiquer » avec les utilisateurs de drogue. Mais les Juges pensent que les méthodes de l’organisation vont bien au-delà de la plus élémentaire « communication ».

Une toxicomane, Tatyana Kuznetsova, est morte, l’an dernier, après avoir été enchaînée à un lit, par « Ville propre sans drogue ». Deux associés de Roizman font, actuellement, l’objet d’un procès, suite à sa mort, découlant d‘une méningite, que les Juges disent être devenue mortelle, faute de soins médicaux appropriés, durant des jours entiers.

“En luttant contre le phénomène de la drogue, il a fait des choses illégales que je ne saurais approuver », explique Fyodor Krasheninnikov, un militant pro-démocratique, qui avait, jusqu’alors, l’habitude de travailler avec Roizman. « Il est trop dur. Pour Roizman, quiconque essaie des drogues est un Junkie qui doit être puni sévèrement ».

Lors d’une interview à son bureau, Roizman intercale des réponses brèves aux questions d’un reporter, entre deux réunions avec des citoyens préoccupés, qu’il reçoit deux fois par semaine, une tradition qu’il a instaurée à l’hôtel de Ville, après l’avoir pratiquée au sein de « Ville sans Drogue ». Interrogé sur les rumeurs affirmant que son ancienne organisation a torturé des trafiquants de drogue sur les tombes de gens morts après avoir consommé leur « came », Roizman reste délibérément ambigu.

“C’est possible que des trucs comme ça se produisent de temps en temps. Tout autour d’ici, nous avons résolu le problème de façon la plus simple qui soit », dit-il, en refusant d’en dire plus.

Ces dernières années, Roizman a fait l’objet de plusieurs enquêtes de police, en lien avec des plaintes déposées par des toxicomanes, qui ont passé du temps dans les locaux de « Ville sans drogue ». Lors d’interviews précédentes, il a déclaré que les autorités voulaient que « Ville sans drogue » cesse ses opérations – non pas à cause de ses tactiques illégales, mais parce qu’elles tentaient de dissimuler leur propre incompétence.

Cet argument, conjugué à une chute sensible des problèmes liés à la drogue, semble avoir connu un large écho chez les lecteurs d’Yekaterinburg, qui ont apporté 33% des suffrages, au cours des élections, le mois dernier. Ya ‘acov Sillin, le candidat du parti Russie Unie de Poutine, n’est parvenu qu’à 29%.


Le Maire de Moscou, Sergei Sobyanin. (photo credit: AP Photo/Alexander Zemlianichenko)

Ce genre de succès est inhabituel, dans la Russie de Poutine, où les candidats de Russie Unie ont triomphé de leurs concurrents, dans la grande majorité des joutes électorales, le 9 septembre – y compris à Moscou, où l’opposition est particulièrement bien organisée. Dans la capitale, le Maire Boris Sobyanin a décroché une victoire avec 51 % des scrutins, sur le leader de l’opposition, Alexei Navalny a recueilli 27%.

Ceux qui ont travaillé avec Roizman affirment que sa guerre victorieuse contre la drogue n’est que la partie visible de sa popularité. Fils d’un ouvrier juif travaillant à l’usine, Roizman a quitté le domicile familial à 14 ans et a fait des petits boulots, avant d’avoir des ennuis avec la Justice, pour vol de bijoux et de vêtements. Il aime collectionner des pièces d’iconographie chrétienne et entretient des relations chaleureuses avec l’Eglise.

“Il est très cultivé, mais sait parfaitement travailler de ses mains », dit de lui Konstantin Kiselev, un professeur de sciences politiques, qui a travaillé pour la campagne de Roizman. « Il écrit de la poésie, mais sait comment faire, face aux criminels. Il y a, en lui, une réponse à tout un chacun ».

Bien qu’il n’ait jamais dissimulé ses origines juives, Roizman déclare ne s’être jamais senti membre d’aucune minorité.

“Cela n’a jamais constitué un problème, et je n’ai jamais ressenti aucun antisémitisme, mais c’est peut-être dû au genre de personne que je suis », explique Roizman, une paume enveloppant son poing serré.

Après trois semaines au poste de Maire, Roizman porte le masque d’une expression tourmentée, alors qu’il passe de lieu de réunion en conférence. Il se détend, alors qu’il s’asseoit en face d’une sexuagénaire qui pleure en se plaignant qu’elle ne peut pas se permettre de mettre du chauffage.

Chudnovskaya pense que ce genre de politique démagogique est aisée pour Roizman, qui avait déjà l’habitude d’écouter les plaintes publiques, quand il était à « Ville sans drogue ».

“Il est peut-être un peu coriace et raide aux entournures”, dit-elle. « Mais cette ville, avec sa forte communauté minière si éloignée de Moscou, a toujours été l’équivalent de l’Ouest sauvage américain. On ne s’en fait pas pour ce genre de choses, ici ».

PAR CNAAN LIPHSHIZ 26 octobre 2013, 3:59 am. Mise à jour : 26 octobre 2013, 4:06 am

timesofisrael.com Article original

Adaptation : Marc Brzustowski

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Armand Maruani

{{A Marseille ou dans les Cités , on devrait s’en inspirer .}}