Selon l’agence de sécurité intérieure des États-Unis, Facebook, Twitter et autres réseaux sociaux sont les nouveaux outils de prédilection des terroristes. »Le djihad sur Internet est aussi important que le djihad militaire », affirme Ayman al-Zawahiri, successeur de Ben Laden à la tête d’al-Qaida.

Dans Inspire, son magazine trimestriel en ligne et en anglais, al-Qaida propose depuis trois ans toutes sortes de « conseils » pour les aspirants au djihad.

La mise à profit d’Internet n’est pas une nouveauté, mais les réseaux sociaux ont apporté une nouvelle dimension au cyberterrorisme.

Contrairement aux sites et aux forums, utilisés depuis la fin des années 1990, cette évolution des moyens de communication favorise la participation des visiteurs.

« Grâce à leur simplicité et aux options partager, aimer, re-twitter, ces réseaux permettent de démultiplier à l’infini les messages à l’intention des militants et des sympathisants », explique Jean-Charles Brisard, spécialiste du terrorisme.

« Que ce soit pour informer, diffuser, recruter ou communiquer, les terroristes sont très étalés sur les réseaux sociaux. Facebook ou Twitter constituent une caisse de résonance pour leurs activités. »

« La ligne narrative très développée, l’usage de photos et le graphisme donnant une image héroïque du djihad font rêver certains jeunes », ajoute un spécialiste du Geneva Centre for Training and Analysis of Terrorism (GCTAT), basé à Genève. « Internet et l’usage des réseaux sociaux sont les premières étapes de la radicalisation : avant de se faire sauter, les clercs du djihad sont souvent passés par la plume sur des réseaux ou sites internet. »

Pseudonymes et noms de code

Les djihadistes sont les premiers à vanter les qualités de ces réseaux pour parvenir à leurs fins.

« Quelle riche idée que ce Facebook : au lieu d’attendre que les gens viennent à vous, vous pouvez maintenant aller vers eux ! » aurait affirmé l’un d’entre eux sur un fil de discussion mentionné dans le rapport de l’agence de sécurité intérieure américaine (Department of Homeland Security – DHS), dont les extraits sont diffusés par Foxnews.

Simples et performants, les réseaux sociaux permettent aussi aux terroristes de s’informer : « recettes » pour la fabrication d’explosifs, l’entretien et le maniement des armes, ou pour apprendre à se protéger des services de renseignements ou de police…

Cité par Guysen.com, Gabriel Weimann, professeur au département des communications de l’université de Haïfa, affirme que le Hezbollah aurait espionné les comptes Facebook de soldats israéliens dans l’espoir de récupérer des informations utilisables pour planifier des attaques.

Quant aux talibans ou aux chebabs, les miliciens islamistes de Somalie, ceux-ci seraient très actifs sur Twitter, où ils opéreraient sous le nom de code « @HSMPress ».

« Si l’accès à certains comptes est ouvert et revendiqué, comme celui des chebabs sur Twitter, les profils sont le plus souvent fermés et dissimulés sous des pseudonymes, nuance Jean-Charles Brisard. L’accès aux profils nécessite une autorisation, une cooptation.

 » Car si certains profils sont accessibles, les forums ou sites à vocation terroriste vers lesquels ils renvoient ne le sont pas.

Dès lors, comment être sûr de l’authenticité de l’interlocuteur ?

« Les mots, le phrasé permettent d’identifier les émetteurs, continue l’expert du GCTAT.

Chaque groupe possède une rhétorique particulière.

Dans le cas des chebabs somaliens sur Twitter, par exemple, nous sommes presque sûrs qu’il s’agit bien de membres de l’organisation. »

Crédibilité des réseaux

Comment lutter contre ce phénomène, et pour quels effets ?

Selon Itamar Marcus, directeur de l’Observatoire des médias palestiniens (PMW) de Jérusalem, l’initiative revient aux réseaux sociaux.

« Il est de la responsabilité morale des directeurs de ces réseaux de clôturer les comptes quand ceux-ci sont utilisés à des fins terroristes. »

Cité par Foxnews, Andrew Noyes, porte-parole de Facebook, affirme que la firme prend « très au sérieux » la déclaration définissant les droits et responsabilités des utilisateurs Facebook.

Il ajoute qu’en vertu de cette déclaration « les groupes appelant à la violence contre des individus sont fermés, ainsi que ceux incitant à la haine ou sponsorisés par des organisations terroristes reconnues ».

Si le DHS, dans son rapport, ne semble pas mettre en doute la bonne foi du réseau social, il en souligne les limites :

« Les informations ne sont pas contrôlées avant d’être postées, donc les posts qui violent les règles d’usage restent sur le site jusqu’à ce qu’ils soient détectés et enlevés. »

« Facebook à tout intérêt à collaborer, car la crédibilité de son réseau est basée sur la réputation sociale, commente Mathieu Guidère, professeur des universités et auteur du livre Les nouveaux terroristes, aux éditions Autrement (2010).

Le problème, c’est que Facebook, comme les autres réseaux sociaux, se heurte aux arguments des militants de la liberté d’expression et à ceux de la protection de la vie privée. »

Infiltrés par les services

Par ailleurs, clôturer les comptes concernés n’est pas suffisant.

« On peut fermer les sites ou les profils, mais tant qu’on ne change pas les mentalités, chaque site fermé sera immédiatement remplacé », soupire notre spécialiste du GCTAT.

Selon lui, ces sites comporteraient par ailleurs certains « avantages ».

« La plupart d’entre eux sont infiltrés par les services, qui récoltent des informations précieuses sur les réseaux terroristes.

Ils permettent de suivre certains profils à risque, pour pouvoir un jour les intercepter. »

Autre « atout », selon l’expert : « Ces sites publient des nécrologies toujours véridiques.

Pour les services occidentaux, ils permettent ainsi de confirmer si la bonne personne a été éliminée ou si elle est toujours en fonction. »

Pour Mathieu Guidère, si la France dispose de moyens techniques pour « surveiller, pister, contrôler » les profils à risque sur les réseaux, elle souffre en revanche d’un « manque cruel d’effectifs » pour y parvenir, « l’intelligence humaine étant primordiale en la matière ».

Autre problème : la dimension transnationale de la menace terroriste, face à laquelle les autorités européennes sont impuissantes, faute de « coordination » et d' »harmonisation législative concernant la surveillance et le contrôle de l’Internet ».

« La législation française est assez restrictive, mais Internet n’est pas français, il est mondial ! » s’exclame le professeur.

Selon lui, la France hébergerait une infime partie des adresses IP. « La difficulté, ajoute-t-il, c’est que quand ces sites sont hébergés à l’étranger, il est impossible de les bloquer.

Récemment, une centaine de pages Facebook ont fait l’éloge du terroriste de Toulouse : comme elles sont hébergées hors de France, elles sont soumises à la législation des pays concernés.

Il suffit que ces pays refusent d’intervenir pour qu’on ne puisse rien faire ! »

Marie De Douhet/ Le Point.fr Article original

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