Le soir du 27 novembre 2013, les juifs du monde entier (mais aussi tous ceux qui le souhaitent) allument la première bougie de la fête de hanoukka qui dure huit jours. Certes, il y a une histoire officielle qui explique ce geste religieux mais aussi profondément humaniste. Au cœur de la nuit, des ténèbres, une huitaine de petites bougies scintillent dans un petit instrument appelé hanoukkiya, sorte de bougeoir que toute famille juive possède chez soi en plusieurs exemplaires, ce qui permet à tous ses membres de s’acquitter de leur devoir.

A quand remonte ce rite purement humaniste qui a permis de sauver le monothéisme sous toutes ses formes (paroles d’André Néher, comme me le rappelle mon ami le sous préfet Alain BOYER) à un moment où il était gravement menacé par le paganisme de la soldatesque grecque ?

Sous Antiochus Epiphane IV, vers 165 avant notre ère, ce roitelet se risqua à une hellénisation forcée de la Judée, provoqua la révolte des Maccabées et des judéens attachés à leur tradition ancestrale. Pour bien marquer son autorité, ce monarque détruisit les murailles de Jérusalem et en profana le temple en y introduisant le culte idolâtre. La riposte fut foudroyante : sous la conduite des Macchabées et de Matthias ben Yohanan, la judée se déchaîna contre l’agresseur qui s’imaginait pouvoir la séparer de son Dieu et du monothéisme en général.

Lors de la reconquête, il fallut nettoyer le temple des souillures qui l’avaient rendu impur. Dans ce même temple brûlaient des lampes à huile. Mais les païens avait tout compromis et c’est à grand peine que l’on découvrit une unique fiole d’huile qui ne devait durer que 24 heures. Et miracle ! La fiole a tenu huit jours, ces mêmes huit jours que les juifs commémorent durant cette fête de hanoukka.

Que veut dire ce terme hébraïque ? Simplement, l’inauguration, une façon de pendre la crémaillère, la remise en état du temple de Jérusalem, débarrassé des souillures et de l’abomination du culte idolâtre. D’où la pertinente remarque de Neher : le monothéisme réaffirme ses droits face à un paganisme qui se croyait triomphant.

Durant les huit jours de cette fête, les juifs religieux insèrent dans les dix huit bénédictions (prière statutaire tri quotidienne) tout un couplet qui commence par ces termes : A l’époque de Mattathias ben Yohanan, le grand pontife, des Maccabées et de ses fils, au moment où le royaume grec impie chercha à leur faire oublier la Tora de Dieu et à les éloigner des commandements et préceptes divins…

La tradition rabbinique a institué cette fête qui n’est donc pas d’origine biblique (comme d’ailleurs la fête de Pourim), mais qui reste une joyeuse commémoration familiale.

Essayons d’aller au delà du cadre de l’histoire religieuse et voyons, d’un point de vue universel, ce que représente cette fête, ce qu’est sa symbolique : cette fête tombe généralement au cours du mois de décembre, il fait froid et sombre. On est généralement un peu triste en raison du ciel bas et du peu de luminosité solaire. Les bougies de hanoukka nous rapprochent de la lumière, de la chaleur et de la joie. C’est aussi une façon de rappeler que l’hiver ne dure qu’un temps et qu’après l’oppression et l’obscurité ( la tyrannie et la honte du paganisme avec son culte orgiaque et ses abominations) arrivent la liberté et la joie des lumières.

Hermann Cohen, le fondateur de l’école néo-kantienne de Marbourg a parlé de Kippour comme de la fête de l’humanité messianique, Hanoukka est la fête de l’humanité monothéiste, celle qui a découvert le monothéisme éthique, une divinité unique et qui se conduit moralement envers ses créatures.

L’église primitive ne s’est pas séparée sans peine de cette belle fête qui incarne les espoirs de tout ce qui porte sur le visage les traits de l’humain. Certains vont jusqu’à y trouver les origines de la proximité temporelle avec Noël. Il y eut des infiltrations réciproques : ce sapin auréolé de lumières scintillantes, tout en étant un héritage des tribus nordiques christianisées, n’est pas sans évoquer les bougies de la hanoukkiya… D’un autre côté, il y a les cadeaux de Noël qui ont commencé à devenir une pratique même chez les juifs. Il faut toutefois rappeler que l’on avait coutume de donner des gâteaux ou des cadeaux, voire de l’argent aux enfants, durant cette fête.. Voici un excellent exemple de l’interpénétration des deux cultes issus d’un même tronc ; on ne pourra jamais dire qui est la source et qui est l’emprunteur…

Alors hanoukka, vecteur d’un syncrétisme religieux moderne ? Quand j’étais professeur à l’Université de Heidelberg, j’ai assisté un jour à une curieuse cérémonie : Noël et hanoukka étaient très proches ce soir là, le sapin voisinait avec les bougies de hanoukka…. Mes édutiants allemands, juifs ou pas, me demandèrent de réciter les prières hébraïques ; ils m’apprirent ensuite ; alors que la bière coulait à flots qu’on célébrait WEIHKOUKA, mélange de Weihnachten (Noël) et Hanoukka… Mais Dieu n’aurait pas à reconnaître les siens car il se reconnaîtra en chacun de nous.

Maurice-Ruben HAYOUN

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Zuhurbelea

Shalom,

Alors déjà pour ce qui est de l’humanisme, se méfier de ce terme séduisant : il a l’air de signifier « avoir un bon sentiment envers son prochain », ce qui est un principe noble. Mais hélas ce terme a été récupéré par la pensée athée : « Dieu remplacé par l’Homme », avec un « grand architecte créé » qui « évolue » vers quelque chose de mieux. Donc, non, hélas, on ne peut qualifier désormais le geste ni le principe de Hanoukka d’humaniste : de geste « humain », oui, ou autre terme de neutralité préservée.

D’autre part : se joindre à ce geste des bougies, très bien. Mais cela casse la Brakha de vendre la peau de l’ours. Car si l’on observe l’occident, on voit clairement que ce sont les grecs qui ont gagné le monde-ouest ! Donc la bataille a été apparemment gagnée, mais ce n’est qu’une apparence. Il faut continuer : tout est à faire ! Nous devons renverser le matérialisme, et ses deux sbires : le clown mac do, et le menteur borgne marchand d’armes ! Amen