JERUSALEM (Reuters) – Il y a quelques années, la reprise des négociations israélo-palestiniennes après trois ans d’interruption aurait constitué un événement majeur pour tout le Proche-Orient. Ce n’est plus le cas aujourd’hui tant la région est accaparée par ses tensions religieuses, ses troubles politiques et ses difficultés économiques.

La réouverture de ces pourparlers, fin juillet à Washington, et la tenue de nouvelles discussions à partir du 14 août, a été quasiment occultée par la situation en Egypte et la guerre civile en Syrie, qui ravive les tensions entre chiites et sunnites dans plusieurs pays voisins.

Les Etats-Unis, à l’origine de ce début de rapprochement diplomatique, espèrent encore qu’une solution négociée au conflit entre Israël et les Palestiniens contribuerait à résoudre d’autres problèmes dans la région. Mais les analystes indépendants n’y croient guère.

« Cela aurait probablement été le cas avant les soulèvements arabes mais un certain nombre d’autres conflits sont apparus, comme la lutte entre sunnites et chiites et le conflit entre sunnites », explique Salman Chaïkh, directeur de l’antenne de Doha du centre de réflexion américain Brookings.

« Ce dossier est devenu accessoire mais il pourrait revenir au premier plan s’il y avait de vrais progrès », ajoute-t-il tout en soulignant le scepticisme que suscite une telle hypothèse.

Depuis la rupture des précédentes discussions, en 2010, des régimes autoritaires ont été renversés en Tunisie, en Egypte, en Libye et au Yémen, l’extrémisme islamiste a étendu son influence et les affrontements entre sunnites et chiites se sont multipliés.

UNE PRIORITÉ… POUR WASHINGTON

En Syrie, le bilan de plus de deux ans de guerre civile dépasse 100.000 morts et en Irak, les violences sont redevenues quasi-quotidiennes, avec plus de 1.000 personnes tuées en juillet, le pire bilan depuis 2009 selon l’Onu.

S’y ajoutent les tensions liées au programme nucléaire de l’Iran et les turbulences politiques en Egypte, pays majoritairement sunnite, où l’armée a déposé début juillet le président Mohamed Morsi, élu un an plus tôt.
Les chances de résoudre l’une ou l’autre de ces crises majeures n’augmenteraient sans doute aucunement si, par miracle, Israël et les Palestiniens parvenaient enfin à un accord politique et territorial.

Ceux qui jugent possible un tel accord à brève échéance sont si rares que certains s’interrogent sur l’implication dans le dossier israélo-palestinien du secrétaire d’Etat américain, John Kerry, alors que tant d’autres dossiers méritent son attention dans la région.

Pour le général en retraite James Mattis, qui commandait jusqu’en mars dernier le Centcom, l’état-major américain qui englobe la région, l’intérêt de Washington pour ces pourparlers s’explique par le fait que l’incapacité à faire naître un Etat palestinien nuit aux intérêts américains.

« En tant que commandant du Centcom, j’ai dû chaque jour payer, en termes militaires, le prix de la sécurité parce que les Américains sont jugés partiaux et favorables à Israël », explique-t-il, laissant entendre que les Etats-Unis se privent ainsi du soutien des plus modérés du camp arabe.

LES PROBLÈMES INTÉRIEURS ONT PRIS LE DESSUS

De leur côté, les dirigeants musulmans de la région ont de plus en plus de mal à attribuer au seul Etat d’Israël tous les malheurs des Palestiniens, un discours qui leur a longtemps permis de balayer les critiques sur leur incapacité à engager des réformes pourtant indispensables.

Les soulèvements politiques ont montré depuis 2011 que les pays concernés ne pouvaient plus se permettre de négliger leurs propres difficultés, à commencer par des faiblesses économiques auxquelles un accord de paix entre Israéliens et Palestiniens ne changerait absolument rien.

Illustration de l’obsolescence de ce discours: en 2011, dans un entretien à un journal, le président Bachar al Assad déclarait que la Syrie était immunisée contre les tensions politiques parce qu’elle était unie face à Israël. Quelques semaines plus tard débutait la guerre civile.

Pour Aaron David Miller, ancien conseiller au Département d’Etat américain devenu chercheur au Woodrow Wilson Center à Washington, un accord israélo-palestinien ne serait assurément pas la panacée à tous les maux de la région mais il permettrait au moins d’améliorer les relations diplomatiques entre Israël d’une part, l’Egypte et la Jordanie d’autre part.

Il en faudrait toutefois beaucoup plus pour ramener le calme en Egypte.

« Bien sûr, un accord de paix serait une bénédiction d’Allah pour nous et pour tous les Arabes, mais nous devons d’abord nous débarrasser des dictateurs et des tyrans qui nous volent et se couchent devant l’Occident », juge ainsi Faris Ismaël, propriétaire d’une pâtisserie dans le centre du Caire.

par Crispian Balmer

fr.news.yahoo.com Article original

Reuters – il y a 21 heures

avec Tom Finn au Caire et Phil Stewart à Washington; Marc Angrand pour le service français, édité par Henri-Pierre André

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