Par Aldo-Michel Mungo

Analyste en géostratégie

Directeur de la rédaction du magazine militaire Carnets de VolLongtemps restés passifs face au programme nucléaire israélien, les pays arabes ont été réveillés par les ambitions de l’Iran, à l’instar de l’Égypte, de nombreux pays ont manifesté leur ferme intention de développer un programme nucléaire. La crainte d’une bombe perse incite les arabes à maîtriser le cycle nucléaire.

L’Arabie Saoudite, un des pays les plus concernés, n’a jamais renoncé à se doter de l’arme atomique, au cas où l’Iran s’en équiperait. Riyad aurait discuté avec ses alliés régionaux de l’option nucléaire comme élément dissuasif au Moyen-Orient. L’Arabie Saoudite sait qu’elle risque gros à laisser l’Iran chiite devenir la première puissance militaire nucléaire islamique au Moyen-Orient. Signataire du TNP, le royaume wahhabite a contribué financièrement au développement du programme nucléaire irakien. Ryad est depuis soupçonné d’avoir passé un accord secret avec le Pakistan portant sur l’échange de technologie nucléaire contre du pétrole. Parallèlement, les Saoudiens tentent d’obtenir un statut particulier à l’AIEA. Riyad négocie, en effet, un protocole d’accord l’exemptant de certains contrôles, jouant sur le caractère saint de certains lieux du Royaume, que les Saoudiens interdisent d’accès aux inspecteurs.

Ces grandes manœuvres nucléaires ont contribué à réveiller le spectre d’une prolifération au Moyen-Orient.

L’Egypte

Le début du programme nucléaire égyptien date des années ’50. Initié en secret par Gamal Abdel Nasser, il fut abandonné après la catastrophe de Tchernobyl en 1986 ; alors que le pays, signataire du TNP en 1981, avait annoncé la construction de huit centrales à Dabaa, sur la côte méditerranéenne. Les deux décennies suivant le gel du programme, Le Caire prône l’instauration au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes de destruction massive. Les essais nucléaires de l’Inde puis du Pakistan, en 1998, entraînent un raidissement. Le Caire continue de promouvoir la dénucléarisation du Moyen-Orient mais critique l’inefficacité du TNP. Des intellectuels égyptiens appellent, dès lors, l’Egypte à se doter de l’arme nucléaire dans un souci d’équilibre avec Israël. Le sentiment d’injustice faite aux Arabes ne cesse de s’exacerber avec la deuxième Intifada en 2000, l’invasion américaine de l’Irak en 2003 et la crise du nucléaire iranien. La perception du danger s’est aiguisée au fur et à mesure de la montée en puissance de l’Iran. Expression de cette inquiétude, le président Moubarak fait scandale en déclarant en 2006 que «Les chiites sont en général toujours loyaux à l’Iran et non aux pays dans lesquels ils vivent.»

Du programme nucléaire initial, il reste à l’Egypte deux réacteurs expérimentaux à Inchass, dans le delta du Nil à 60 kilomètres au nord du Caire, ce centre rassemble plusieurs laboratoires et réacteurs de recherche. Il est composé de l’ICF (Inshas Cyclotron Facility), un accélérateur de particules de 4 MW, de l’ETRR-1, un réacteur à eau légère de 2MW, fourni par l’URSS et mis en service en 1961 et de l’ETRR-2 : un réacteur à uranium enrichi de 22MW destiné à la recherche médicale, fourni par l’Argentine et mis en service en 1997. Le centre comprend également plusieurs laboratoires de recherche : rayonnements ionisants, traitement et analyse des matériaux irradiés, mécanique, électronique, eau lourde et un incinérateur de déchets à faible activité.

En 2006, Gamal, fils et successeur présumé du président Moubarak, annonce que l’Egypte va relancer son programme civil avec trois réacteurs à construire à Dabaa. Certains s’interrogent sur les motivations du régime. Outre le fait que l’énergie renouvelable, notamment solaire, pourrait être plus rentable, cette relance du programme égyptien intervient en effet en pleine crise du nucléaire iranien.

En mai de la même année, des extraits d’un rapport confidentiel de l’AIEA fuitent dans la presse, concernant des traces de plutonium et d’uranium enrichi retrouvées à Inchass. En 2005, le pays a déjà fait l’objet d’une enquête de l’AIEA et a également été cité comme acheteur possible de matériel nucléaire via le réseau du Dr Khan. Le pays est aussi accusé d’avoir utilisé la Libye comme plateforme souterraine pour sa propre recherche nucléaire.

D’après le rapport, l’Egypte a importé sans le signaler, après 1982, 67 kilos de gaz d’uranium et plusieurs autres produits utilisés dans l’enrichissement. Le Caire a aussi omis de signaler des expériences secrètes d’irradiation d’uranium naturel et de thorium. Ces expériences portent sur la fabrication de métal d’uranium, pouvant servir à du plutonium militaire, et la production de tétrafluorure d’uranium (UF4). Des dessins d’une usine pouvant servir à la fabrication de plutonium ont également été découverts. Certains rappellent que Le Caire n’a pas ratifié le traité d’interdiction complète des essais nucléaires (CTBT). Le programme nucléaire égyptien est encore loin de pouvoir se transformer, techniquement, en potentiel militaire. Mais l’Egypte possède le potentiel humain pour le mener à bien. Et les pays du Golfe, Arabie Saoudite en tête, semblent prêts à payer une partie de l’addition.

Le programme nucléaire algérien

L’Algérie poursuit un programme nucléaire civil depuis les premières années d’indépendance, mais le soupçon sur le caractère militaire de ce programme reste tenace. Et si l’Algérie cherchait à réaliser un programme d’armement nucléaire depuis 1980 ? Dans l’affirmative, l’a-t-elle abandonné ? Ne serait-elle pas plutôt en train de maîtriser la manipulation du plutonium ?

Le lièvre est levé en 1991. Les Américains découvrent, grâce à un satellite de reconnaissance de l’US Air Force, un grand site nucléaire à Aïn Oussara, 200km au sud d’Alger. Jusque-là, l’Algérie n’a, officiellement depuis 1989, qu’un seul réacteur, celui de Draria, à 20 km à l’est d’Alger, dont la puissance n’excède pas 1MW et qui est déclaré comme un site de recherche civile. Le réacteur baptisé Nour (Lumière) a été fourni par l’Argentine en collaboration avec la Chine. Il fonctionne à l’eau légère avec de l’uranium 235 hautement enrichi à 20% fourni par l’Argentine.

Le nouveau réacteur baptisé Es Salam (La Paix) provient de la même filière sino-argentine et a été commandé en 1983 et construit en secret. Il développe une puissance de 15MW et est officiellement inauguré en 1993, il se révèle être un réacteur à eau lourde.

En août 1998, les services secrets espagnols (Centro Nacional de Inteligencia) établissent un rapport sur le potentiel nucléaire algérien. Il y est écrit que l’Algérie est prête pour produire du plutonium de type militaire. Le Washington Times dans son édition du 3 juin 2000 va plus loin : l’éditorialiste estime que «Le programme militaire algérien se trouve à un stade très avancé et cela suscite l’inquiétude dans plusieurs capitales, à commencer par les pays de l’Europe du Sud».

En mars 2003, sous le titre «Two, three, many North Koreas», The Weekly Standard donne la parole à Henry Sokolski, directeur du Non Proliferation Policy Education Center (NPEC). Ce dernier avance que l’Algérie a l’intention de fabriquer des armes nucléaires. Pour étayer son argumentation, Sokolski rappelle que, l’Algérie a mis en service un second réacteur nucléaire sur le site d’Aïn Oussara. «Ceci suscite la crainte à cause de la taille de ce réacteur (trop grand pour un usage de recherche civile), de la large défense antiaérienne dont il bénéficie (des batteries de S-300) et du fait qu’il soit sous des constructions couvertes», explique-t-il. La sortie médiatique d’Henry Sokolski est porteuse de sens parce que le personnage fait partie des spécialistes de la question de la non-prolifération qui sont les plus écoutés à Washington. Il rappelle que la CIA avait conclu, dans un autre rapport, à l’éventuelle utilisation militaire du premier réacteur d’Aïn Oussara. Les deux réacteurs sont capables de produire cinq kilos de plutonium par an, la quantité nécessaire à la fabrication d’une tête nucléaire chaque année. Dans l’interview de Sokolski, on apprend également que les inspecteurs de l’AIEA ont découvert plus de 3 kilos d’uranium hautement enrichi et une quantité d’uranium naturel provenant de Chine, malgré la signature par l’Algérie du TNP en 1995.

Avec Ain Oussera, l’Algérie veut entrer dans la cour des grands.

Ce qui irrite au plus haut point les services occidentaux, c’est que les Algériens et les Chinois travaillent sur la deuxième étape, celle des vecteurs, c’est-à-dire les modifications nécessaires sur certains missiles pour leur permettre d’être équipés d’une charge nucléaire ou chimique. Tous les pays côtiers de la Méditerranée sous la menace d’un feu nucléaire ; un cauchemar encore plus effrayant que l’Iranien. Comment ne pas craindre qu’un gouvernement islamiste aspergerait ses voisins de plutonium. Alors, qu’est-ce qui mijote vraiment sous les képis des généraux algériens? Car l’émergence d’un pouvoir islamiste dans un pays converti au nucléaire de fraîche date constitue l’un des pires cauchemars depuis les attentats de septembre 2001. Et cela vaut pour tous les pays musulmans.

La Syrie a-t-elle un programme ?

L’inquiétude va croissant depuis l’Opération Orchard, le raid mené le 6 septembre 2007 par Israël contre de mystérieuses installations syriennes. Le silence gêné observé par Jérusalem et les pays occidentaux répond à l’étrange embarras du régime syrien, qui n’a pas cru bon de hurler au scandale. Que cachait donc le désert syrien ? Un réacteur nucléaire d’inspiration nord-coréenne, sous maîtrise d’œuvre des ingénieurs de Pyongyang ? Ou bien un lieu de stockage pour du matériel sensible en partance pour l’Iran ? Dans les deux cas, l’incident conforte les craintes des voisins de la Syrie, et la prise de conscience de leur vulnérabilité, au cœur du dangereux bras de fer irano-américain.

Plus on dispose d’informations sur le raid Israélien contre la Syrie, plus les enjeux semblent élevés.

Traditionnellement, en matière de défense, Israël agit beaucoup et parle peu.

Au mois d’août 2007, Jérusalem apprend que la Syrie est sur le point de recevoir des éléments d’armes nucléaires opérationnelles (ogives ou lanceurs, ou les deux) de provenance nord-coréenne. Le dossier est transmis aux Etats-Unis. Après étude des données satellites, ceux-ci accordent leur feu vert pour une action israélienne.

Damas, qui dispose à la fois d’un arsenal chimique et bactériologique important et de missiles, avait récemment menacé Israël d’une «surprise terrible», peut-être une allusion à l’acquisition de l’ultime échelon non-conventionnel, le nucléaire. Mais les Américains et les Israéliens n’excluent pas une autre hypothèse : la livraison nord-coréenne serait en fait destinée à l’Iran. Un transit par la Syrie, via Lattaquié, étant moins repérable qu’un acheminement direct, via le golfe Persique.

Le 6 septembre, Israël attaque. Un raid aérien détruit d’abord la surveillance radar dans le nord de la Syrie, du matériel d’origine russe. Une autre attaque détruit diverses installations, et un convoi motorisé, à la base militaire secrète de Daïr az-Zwar, sur les rives de l’Euphrate, au nord-est du pays. Cette attaque est menée par une unité aéroportée, ayant parallèlement pour mission de collecter des preuves matérielles d’une implication nord-coréenne. Un commando du Sayereth Mathkal, la force chargée des missions de choc, tue des dizaines de Syriens et de Nord-Coréens, sans pertes du côté Israélien ; dès que les commandos se retirent, les F-16 Sufa et F-15 Ra’am israéliens détruisent à l’armement guidé l’ensemble de l’infrastructure.

Trois jours auparavant, un cargo battant pavillon nord-coréen a mis à quai dans le port syrien de la ville de Tartous un chargement de «ciment». Longue route pour du ciment…

Moins de huit jours plus tard, un accident tue des douzaines de Syriens et d’Iraniens chargeant une tête balistique de gaz innervant sur un missile syrien. La coopération entre la Syrie et l’Iran dans la construction d’un missile balistique est avérée et des ingénieurs des deux pays y participent.

Les frappes israéliennes ne visaient pas un site destiné à une centrale nucléaire mais à l’entreposage secret de missiles. Secret, est un euphémisme puisque c’est semble-t-il à l’insu de sa propre armée que le président Al-Assad a engagé son pays dans un programme clandestin. Le 1 août 2008, le Général Souleimane, un proche conseiller d’Assad, est tué par un tireur d’élite. Ce haut gradé était le responsable du dossier nucléaire syrien.

Exécuté par un commando israélien ?

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Quelques données complémentaires

pour mieux maîtriser la problématique

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Pays soupçonnés de développer un programme nucléaire militaire

Algérie : les Algériens ont mis en marche un second réacteur nucléaire, qui est particulièrement protégé. Il suscite des craintes à cause de sa taille et de la large défense anti-aérienne dont il bénéficie.

Arabie Saoudite : elle a signé avec le Pakistan un accord secret sur la coopération nucléaire qui fournirait aux Saoudiens la technologie en échange de pétrole bon marché.

Brésil : le président Lula a signé un accord en 2008 avec l’Argentine pour le développement conjoint d’un programme nucléaire, qui n’écarte pas un possible volet militaire. Le pays avait déjà renoncé à la bombe dans les années ‘80, lorsque la dictature militaire a cédé la place à un gouvernement civil.

Egypte : des traces d’expériences sur de l’uranium ont été retrouvées à Inchass.

Iran : le programme nucléaire iranien est repris depuis janvier 2006 avec la décision de l’Iran de produire elle-même de l’uranium enrichi. Le pays est signataire du TNP.

Maroc : l’Espagne a fait part de ses craintes après la construction d’un réacteur d’expérimentation dans la région de Rabat en 2006.

Syrie : elle coopère avec la Corée du Nord, en bénéficiant de financements iraniens, pour le développement de la filière plutonium.

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Le programme de la Corée du Nord

La Corée du Nord est le seul pays qui a acquis l’arme nucléaire après avoir ratifié le TNP. Elle a dénoncé ce dernier en janvier 1993. En septembre 2005, elle déclare renoncer à l’arme nucléaire en contrepartie de garanties de sécurité et d’un accès au nucléaire civil. Cependant, le 9 octobre 2006, elle réalise un essai souterrain puis renonce à son armement nucléaire suite à l’accord de Pékin du 13 février 2007. Mais contre toute attente, un second essai, plus puissant et sans aucune ambigüité, est réalisé le 25 mai 2009 quelques temps après l’essai d’un missile balistique qui survole le Japon. Ce programme nucléaire a été rendu possible par la construction d’un réacteur de 5 mégawatts, régulé au graphite et refroidit au gaz, qui est opérationnel depuis 1986, alors que le pays était sous le régime du TNP. Ce réacteur a produit depuis lors plus de 45kg de plutonium.

Le nombre de têtes nord-coréennes est estimé à moins d’une dizaine, dont quelques-unes seraient peut-être opérationnelles ; auxquelles s’ajoute une tête par an. Si la Corée du Nord parvient à terminer la construction de son deuxième réacteur d’une puissance de 50MW, elle pourrait produire 60kg de plutonium par an lui permettant d’augmenter ses stocks de 10 à 15 têtes par an.

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Pays ayant abandonné son programme nucléaire militaire

Afrique du Sud : a disposé, avec l’aide d’Israël, d’un arsenal clandestin de sept têtes dans les années ’80 ; mais ces têtes n’ont jamais été véritablement opérationnelles car trop volumineuses pour être vectorisées. Elles ont été démantelées avant la passation de pouvoir à l’ANC de Mandela en 1989. L’Afrique du Sud a adhéré au TNP en 1991.

Argentine : le programme militaire a été arrêté en 1983, après l’élection de Raul Alfonsin et le retour du pouvoir aux mains des civils.

Irak : a arrêté son programme nucléaire après la première guerre du Golfe en 1991, ses installations ont été partiellement démantelée par l’ONU. L’Irak a repris ses recherches fin 1999. Ses installations ont été définitivement détruites après 2003.

Libye : a abandonné son programme nucléaire en 2003, après 9 mois de tractations secrètes avec les États-Unis et la Grande-Bretagne.

Suède : a développé un programme secret d’arme nucléaire dans les années ‘50 et ’60. Ce programme lui a permis de réaliser une bombe atomique qu’elle s’apprêtait à tester en 1968. Elle décide cependant de démanteler son programme nucléaire militaire pour rejoindre le processus de négociation qui conduit à la signature du TNP.

Suisse : a construit des installations pour l’enrichissement de l’uranium, puis a pris des contacts avec la France pour acquérir une arme nucléaire avant d’abandonner le projet au milieu des années ’60.

Anciens Etats de l’Urss : tous les États issus de la dissolution de l’Union soviétique ont rendu les ogives, qui se trouvaient sur leur territoire, à la Russie qui a repris les engagements de l’Urss. Toutes les installations nucléaires existantes sur leur sol ont été démantelées et ils ont renoncé à l’arme atomique en adhérant tous au TNP

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Pays détenteurs signataires du TNP

Cinq pays sont juridiquement reconnus comme États dotés de l’arme nucléaire par le TNP :

Russie : 16.000 têtes, dont 5.830 opérationnelles. Depuis 1949, l’Union Soviétique/Russie a produit plus de 55.000 têtes nucléaires, dont 30.000 étaient en service en 1991 à la fin de la Guerre Froide. En 1986 l’Union Soviétique avait 45.000 têtes nucléaires en stock. Une décennie plus tard près de la moitié de ces têtes avaient été démantelées. La Russie a démantelé un peu plus de 1.000 têtes par an durant les années ’90.

États-Unis : 9.962 têtes, dont 5.735 opérationnelles. Plus de 60.000 têtes, sur les 70.000 fabriquées depuis 1945, ont été démantelées à ce jour. Près de 4.500 têtes doivent encore être démantelées à l’usine de Pantex près d’Amarillo au Texas. Le Département de l’Energie possède plus de 12.000 bâtons de plutonium intacts provenant de têtes nucléaires démantelées.

France : 348 têtes opérationnelles ; réduction à moins de 300 en projet. Le pic a été atteint en 1992 avec 540 têtes. La France a produit plus de 1.260 têtes nucléaires depuis 1964. Durant la dernière décennie, la France a démantelé ses missiles balistiques terrestres. Les installations françaises en Algérie ont été démantelées en 1962.

Royaume-Uni : un peu moins de 200 têtes opérationnelles, dont 48 à tout moment à bord d’un SNLE en patrouille. Depuis 1953, la Grande Bretagne a produit plus de 1.200 têtes nucléaires. L’arsenal britannique a atteint son maximum dans les années ‘70 avec 350 têtes. La base britannique d’essais nucléaires en Australie a été démantelée.

Chine : environ 200 têtes, dont environ 145 opérationnelles. Ce pays en avait 435 en 1993 et a produit plus de 600 têtes depuis 1964, mais les experts prévoient qu’un nombre accru de têtes devraient être en service dans les dix prochaines années.

Le total mondial des armes nucléaires entreposées est considérablement inférieur à ce qu’il était durant le pic de la Guerre Froide en 1986, époque où il y avait 70.000 têtes nucléaires. Depuis 1945, plus de 128.000 têtes nucléaires ont été construites dont 55% par les Etats-Unis et 43% par l’Union soviétique et la Russie.

Lors du sommet Obama-Medvedev en juillet 2009 à Moscou, deux objectifs ont été fixés pour le nouveau traité de désarmement qui doit être signé en 2010: abaisser dans une fourchette de 1.500 à 1.675 le nombre de têtes nucléaires et dans une fourchette de 500 à 1.100 le nombre de vecteurs

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Pays, non-signataires du TNP, disposant de l’arme nucléaire

Inde : 40 à 50 têtes, presque toutes opérationnelles; ce pays a produit suffisamment de matériau fissile pour la fabrication de 105 têtes nucléaires. L’Inde réalise le 18 mai 1974 son premier essai, puis annonce renoncer à son programme nucléaire. Le 11 mai 1998, sur le site de Pokhran, dans le désert du Rajasthan, elle procède à trois essais avec un engin à fission (bombe A), et un quatrième avec un engin thermonucléaire (bombe H). Le 13 mai, elle effectue deux nouveaux essais avec des charges inférieures au kilotonne, des armes tactiques. Elle annonce dans le même temps un moratoire unilatéral sur les essais.

Pakistan : 50 à 60 têtes, presque toutes opérationnelles; ce pays a produit suffisamment de matériau fissile pour fabriquer 90 têtes. Ce pays réalise quelques jours après l’Inde, le 28 mai 1998, cinq essais nucléaires et un sixième, le 30 mai. Un seul essai portait sur une bombe, d’une puissance de 30 à 35 kilotonnes, soit deux fois celle de Hiroshima. Les autres concernaient des armes tactiques, destinées à être montées sur des missiles de courte ou moyenne portée utilisables contre des concentrations de troupes sur un théâtre d’opérations. Après ces essais, le Pakistan a également déclaré un moratoire unilatéral sur les essais.

Israël : 200 têtes, dont une centaine opérationnelles. Israël a procédé, avec l’aide de l’Afrique du Sud, à un essai sous-marin dans l’Océan Indien, à proximité de l’île Marion, le 22 septembre 1979, connu sous le nom de l’Incident Vela du nom du satellite américain de surveillance qui a repéré le flash.

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Le programme israélien

Israël est considéré comme un pays du seuil : possession et production du nucléaire militaire mais de façon officieuse. Aucune déclaration officielle des autorités publiques n’a jamais été faite, l’Etat hébreu préférant cultiver l’ambiguïté dans ce domaine.

Dès 1949, les savants atomistes israéliens collaborent avec leurs homologues français et se mettent à fouiller le désert du Néguev pour y trouver de l’uranium. Le premier réacteur israélien de recherche à Dimona entre en service en 1955. En Novembre 1956 est passé un accord secret entre la France et Israël pour la construction d’un nouveau réacteur plus puissant (24MW). Cet accord est complété l’année suivante par une disposition non écrite autorisant Israël à retraiter les combustibles du réacteur pour en extraire le plutonium nécessaire à la bombe. La construction du réacteur débute en 1958 et les travaux se poursuivent en parallèle avec ceux menés en France à Marcoule par le Commissariat à l’Energie Atomique (CEA) où un réacteur similaire est installé. Ainsi de nombreux techniciens français travaillent-ils à Dimona tandis que de nombreux techniciens israéliens travaillent à Marcoule. Cette connivence franco-israélienne s’achève avec la Guerre des Six jours en 1967 et l’embargo décrété par le Général de Gaulle. L’année 1974 marque le début d’une nouvelle coopération nucléaire avec l’Afrique du Sud qui débouchera sur un premier essai commun au Sud de l’océan Indien en 1979. A partir de 1987, l’assemblée générale de l’ONU et la conférence générale de l’AIEA vont voter une douzaine de résolutions demandant à Israël de signer le TNP. Toutes resteront lettre morte, l’arme nucléaire constituant pour Israël une assurance-vie.

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Les cas argentin et brésilien

Membre du Groupe des fournisseurs de combustible nucléaire, l’Argentine est dotée de deux réacteurs, Atucha et Embalse, qui fournissent environ 8% de l’électricité nationale. Le programme nucléaire de l’Argentine date du général Perón, dans les années ’50, avec l’ambition affirmée de détenir l’arme atomique, mais sans jamais y parvenir. En juin 1968, sous la dictature du Général Onganía, commence le chantier de construction de la centrale nucléaire d’Atucha, la première d’Amérique latine. Equipée d’un réacteur à eau lourde pressurisée, elle entre en service en 1974. Lors du troisième et dernier mandat de Perón, en mars 1974, la construction de la centrale d’Embalse est lancée. La junte qui prend le pouvoir en mars 1976 continue le programme nucléaire. L’enrichissement d’uranium est abandonné, lorsque le pouvoir est rendu aux civils, en 1983 avec l’arrivée de Raul Alfonsin. Mais le pays continue à exporter des technologies nucléaires au Pérou, en Algérie, en Égypte et en Australie. Le pays se lance surtout dans une coopération importante avec l’Iran. Un accord qui est officiellement suspendu en 1991 par l’Argentine, qui continue néanmoins à livrer de l’uranium faiblement enrichi à Téhéran, jusqu’à ce que Buenos Aires signe le TNP en 1995. En août 2006, le président Nestor Kirchner annonce un plan de réactivation du nucléaire, visant notamment à augmenter jusqu’à 15% la production d’électricité. Le plan comprend un volet d’enrichissement d’uranium et de production d’eau lourde.

Le Brésil, de son côté, inaugure au début du mois de mai 2006 son premier complexe nucléaire d’enrichissement de l’uranium, dans la municipalité de Resende, à Rio de Janeiro.

Le pays dispose de deux centrales nucléaires, Angra I et Angra II. Une troisième est en cours de construction ; elle commencera à fonctionner en 2013. Le Brésil occupe le sixième rang mondial en termes de réserves d’uranium et va cesser de l’exporter. Le pays est suspecté de développer un programme militaire. En effet, le gouvernement de Lula a refusé d’autoriser des inspections sans limites à l’AIEA, en soutenant qu’un accès complet à ses centrifugeuses ferait courir à son pays le risque de devenir la cible d’actes d’espionnage industriel. Lorsqu’il a commencé à enrichir de l’uranium, l’agence Associated Press a diffusé un article affirmant que le Brésil «suit avec précaution le chemin de Téhéran». Le gouvernement brésilien ne cache pas que son programme nucléaire est lié, outre la création d’énergie électrique, à la construction d’un sous-marin nucléaire.

Un accord de coopération a été signé entre le Brésil et l’Argentine en 2008.

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