Qui est vraiment Rav Ovadia Yossef ?

(Texte venant du Blog « Le Monde Juif »)

Le Rav Ovadia Yossef est peut-être aujourd’hui la figure la plus controversée, à la foi la plus adulée mais aussi la plus détestée du monde juif aujourd’hui.

Mais qu’on l’aime ou qu’on le déteste, l’erreur serait de le caricaturer et de ne retenir que ses interventions limites sur la Shoah et de ne pas percevoir le caractère parfois novateur bien que très polémique de certaines décisions halakhiques.

Le Rav Ovadia Yossef vaut mieux que cela, car il est une figure extraordinaire du monde juif actuel. Il est déjà le sujet de plusieurs biographies, ouvrages critiques et autres analyses sur sa perception de la Halakha. Il plus occupe une place non négligeable sur l’échiquier politique assez chaotique du pays.

Le professeur Marc Shapiro, grand connaisseur du milieu orthodoxe, a produit une excellente revue critique des livres récents parus sur le Rav Ovadia Yossef.
Il a appelé son article: “MiYossef ad Yossef lo Kam ke Yossef” (De Joseph à Joseph, il n’y en eut aucun comme Joseph).

Petite explication de texte. Cette phrase renvoie à une autre phrase célèbre, présente sur la tombe du célèbre Moïse Maïmonide: “Mi Moshé ad Moshé lo Kam ké Moshé” (De Moïse (notre maître) jusqu’à Moïse (Maimonide), il n’y en eut aucun comme Moïse). Eloge incroyable qui crée un lien presque direct entre Moïse à qui Dieu a donné les tables de la loi et Maïmonide qui a révolutionné le judaïsme, plus d’ailleurs avec son ouvrage de Halakha (le Michné Thora) qu’avec le Guide des Egarés, cher aux intellectuels juifs parisiens.

L’intitulé de Marc Shapiro retrace un lien identique entre Rabbi Yossef Karo et Rav Ovadia Yossef. Pour qui connaît l’impact de Rabbi Yossef Karo sur le monde juif avec la diffusion de son Choulkhan Aroukh ne peut qu’apprécier l’audace de la comparaison. Le Choulkhan Aroukh a en effet provoqué une rupture épistémologique dans la façon qu’ont eu les maîtres de la Tradition d’aborder la loi juive. Il s’agissait, ni plus ni moins, que de compiler et d’arbitrer les décisions halakhiques des plus grands maîtres du Moyen-âge, afin de produire le “code de lois ultime”, celui qui mettrait fin aux innombrables discussions portant sur les comportements pratiques du peuple juif et ce, sur l’ensemble du périmètre législatif: les fêtes, la cacherout, les lois commerciales, les prières, le mariage, les contrats, etc.

Nous y reviendrons. Mais l’idée de ce billet, c’est de comprendre en quoi Rav Ovadia Yossef est une personne éminemment importante pour le monde juif d’aujourd’hui.

La renaissance de la fierté séfarade.

Pendant longtemps en Israël, l’establishment était composé d’ashkénazes, véritables fondateurs du pays. C’est vrai bien sûr du point de vue laïc (socialistes venus de Russie et de Pologne), mais vrai aussi dans le camp religieux où les plus importantes autorités rabbiniques du pays ont pendant longtemps été issues du monde ashkénaze: le Rav Kook, le Hazon Ich, puis le Rav Shakh, le célèbre Directeur de la Yéchiva de Poniowitz.

Comme esquissé dans un billet précédent, de nombreux jeunes du monde séfarade (principalement d’Afrique du Nord) ont été happés par les yéchivot ashkénazes, ont adopté leur méthodes d’étude et parfois leurs coutumes. Ce qui n’a pas empêché une discrimination notoire: les étudiants séfarades, même les plus brillants, ne peuvent pas forcément étudier dans les plus grandes yéchivot, un séfarade dans le monde Harédi ne peut pas épouser une femme ashkénaze (à moins qu’elle ne soit aveugle, sourde et pauvre), etc., etc. Cet état de fait est bien décrit dans cet article par le Rav Elie Kling.

Un brin paternalistes donc (voire racistes), les grands dirigeants ashkénazes ont toujours considéré qu’il n’était pas encore venu le temps où un séfarade pouvait accéder à des fonctions de leadership au sein du monde religieux. C’est d’ailleurs suite à une phrase malheureuse du Rav Shakh, que le parti Shass décida de ne plus rester sous la coupe des leaders ashkénazes et de prendre son envol de façon autonome dans le paysage politique israélien.

Et ce principalement grâce au Rav Ovadia Yossef. Né en Irak, d’un famille pauvre et pas spécialement reconnue, le Rav Ovadia Yossef n’avait pas de signe extérieur permettant d’imaginer faire une carrière rabbinique de grande envergure en Israël: séfarade, sans Yikhouss (appartenance à une lignée prestigieuse), et de condition modeste.

Arrivé à l’âge de 4 ans en Israël, il fut pourtant invité à l’âge de 22 ans en Egypte pour prendre la tête du tribunal rabbinique du Caire.

En 1968, il fut nommé Grand Rabbin de Tel-Aviv pour finalement être élu Grand Rabbin Séfarade d’Israël (Richon Letzion: le primat de Sion) en 1973.
La suprématie halakhique, gage de légitimité incontestée.

Qu’est-ce qui distingue donc Rav Ovadia de ses contemporains ? Il dispose d’un atout majeur: c’est un génie de la Halakha. Selon tous les observateurs et les connaisseurs, sa maîtrise des textes halakhiques est absolument inégalée, y compris par les plus grands maîtres ashkénazes du XXème siècle. Or, la légitimité halakhique est absolument fondamentale pour quiconque veut avoir une influence sur le monde juif. Si un quelconque rabbin de communauté explique qu’il est possible d’utiliser une même machine pour laver alternativement le lait et la viande, il risque de se voir rapidement traiter de laxiste, de libéral ou de petit rigolo.

Lorsque c’est Rav Ovadia Yossef qui énonce une telle décision, l’impact est énorme. D’abord, cela a une répercussion sur la vie pratique de centaines de milliers de personnes. Ensuite, il est très compliqué, compte tenu de l’aura dont dispose le Rav Yossef en matière de halakha, de soutenir une opinion opposée.

Si le sujet de la machine à laver la vaisselle vous laisse froid (il ne devrait pas), il faut alors se souvenir que le Rav Ovadia a été à l’origine de plusieurs “Psak Din” (décisions halakhiques) qui ont eu un retentissement énorme en Israël:
– c’est en majeur partie grâce à lui que les immigrants éthiopiens ont été considérés comme Juifs d’un point de vue halakhique. Sans sa décision argumentée et fondée, il n’y aurait peut-être pas d’Ethiopiens en Israël aujourd’hui.

– Rav Ovadia Yossef s’est démené comme jamais pour résoudre le problème des femmes Agounot pendant la guerre de Kippour. Les Agounot sont ces femmes de soldats disparus pendant la guerre qui ne disposaient pas de moyens de divorcer juridiquement et donc de se remarier. Aujourd’hui encore, sur ce sujet épineux, Rav Ovadia Yossef est certainement le décisionnaire ultime auquel on adresse les cas les plus problématiques.

Nous développerons un billet spécifique sur le caractère novateur, voire révolutionnaire sous certains aspects, de la vision halakhique du Rav Ovadia Yossef.

L’autonomie du monde Séfarade en Israël

Mais nous devons d’abord comprendre en quoi son influence a atteint un niveau tel qu’un personne aussi censée qu’Ami Bouganim m’a dit un jour que la seule personne capable de véritablement résoudre le conflit israélo-palestinien s’appelle Ovadia Yossef.

On l’a dit, pendant longtemps, les séfarades religieux ont suivi les décisions prises par les grands maîtres des Yéchivot lituaniennes, y compris sur le plan politique en votant pour Agoudat Israël (ou Deguel Hathora), le grand parti ultra orthodoxe. Mais au milieu des années 80, le Rav Shakh, encourage les séfarade et le Rav Ovadia Yossef à créer un parti spécifiquement séfarade: Shas. L’idée était d’élargir la base électorale orthodoxe pour mieux maîtriser un électorat parfois encore méfiant vis-à-vis du monde ashkénaze. La manoeuvre réussit au-delà de toute attente. En plus d’accueillir les votes des ultra orthodoxes séfarades, Shas réussit le tour de force de s’attirer les votes des marocains traditionalistes ou même peu religieux, beaucoup plus nombreux.

Shas devient une force majeure de la vie politique israélienne et le Rav Ovadia Yossef, après plusieurs atermoiements, rompt définitivement avec le Rav Shakh pour devenir le leader incontesté de ce mouvement.

La fierté Séfarade était rétablie, ce à quoi ne manque pas de faire allusion le slogan de Shas: “lehahazir ateret leyoshna”: redonner la gloire à sa couronne.
A partir du moment où Shas a pris son indépendance, le ressentiment du monde ashkénaze a été extrêmement violent. Du jour au lendemain, le nom de Rav Ovadia Yossef n’apparaissait plus dans les journaux ultra orthodoxes ashkénazes. Pire, seul son prénom était cité ‘Ovadia’, sans tous les titres et les marques de respect qui sont accolés dans ces publications aux grands de la Thora. Traitement inimaginable pour un maître du rang d’Ovadia Yossef.

Marc Shapiro se souvient que lorsqu’il a lu ces attaques dans la presse haredi, cela lui a fait l’effet d’un moustique essayant de s’attaquer à un éléphant. La comparaison est pertinente: ces attaques n’ont absolument rien fait pour décrédibiliser le Rav, bien au contraire, elles lui ont donné un prestige supplémentaire: celui qui ose enfin se dresser devant l’hégémonie ashkénaze.

Car Rav Ovadia Yossef a su également critiquer de façon construite la société ashkénaze: dans les introductions des volumes 1 et 3 de son oeuvre maîtresse (Yabia Omer), Ovadia Yossef remet en cause le système d’enseignement ashkénaze du fait de sa trop grande valence théorique qui ne permet pas de se concentrer sur l’étude des Aharonim (décisionnaires post-Choulkhan aroukh) et la halakha pratique.

Il n’a pas hésité non plus à diminuer le rôle joué par le Hazon Ich dans la période récente. Le Hazon Ich ! Le fondateur de la ville de Bné-Brak, le Rav chez qui Ben Gourion s’est déplacé pour négocier le statu quo, l’autorité incontestable du monde ashkénaze en Israël après la guerre ! Une icône !

Et voilà que Rav Ovadia Yossef se permet de remettre en cause son appellation de “Moré Horaa”, expert en halakha, sous prétexte que le Hazon Ich n’avait jamais eu de responsabilité collective. Tempête en Israël que les deux biographies (non apologétiques rappelons-le car écrites par des journalistes) déjà existantes ont bien évidemment rappelé.

Bien entendu, sur le champ politique, le Rav Ovadia Yossef est connu pour sa position modérée concernant le conflit israélo-palestinien. Ou plutôt pour son “psak din” visant à expliquer que rendre des territoires était permis pour parvenir à une véritable paix. Il ne s’est pas fait que des amis, cette fois-ci du côté des Sionistes religieux qui pourtant dans une grande majorité suivent ses autres décisions halakhiques. Mais contre vents et marées, il a cassé certaines barrières en entrant volontairement dans un gouvernement travailliste où figurait le Meretz, le parti laïque anti-religieux. Ou en refusant de participer au gouvernement d’Ariel Sharon. Ou encore en affichant sa proximité et même son amitié avec Shimon Pères.

Bref, sans rentrer dans son système halakhique qui recèle de nombreuses surprises et pépites, il s’avère que le Rav Ovadia Yossef est un véritable leader au sens où il réussit à inspirer les gens et à rassembler bien au-delà de sa famille proche.
Sa proximité avec les masses est également un facteur important de son succès.

Marc Shapiro se souvient avoir assisté à une des ses conférences de Motsaé Chabbat avec un réel plaisir: ce mélange de Thora, d’anecdotes et d’humour a un vrai impact sur l’homme de la rue. Vous me direz que des rabbins qui blaguent et qui s’entendent bien avec le peuple sont légions. Certes, mais aucun n’a l’envergure académique d’un Ovadia Yossef, peut-être le plus grand décisionnaire depuis le Choulkhan Aroukh.

Dans le monde occidental, Ovadia Yossef est plus connu pour ses “gaffes” ou ses déclarations intempestives comme lorsqu’il appela Yossi Sarid (un des leaders du parti Meretz) “Aman” ou “Satan”. Marc Shapiro semble mettre ces écarts sur l’ambiance surchauffé de ces conférences du Samedi soir et sur la grande proximité du Rav Ovadia Yossef avec les masses lors de ces déclarations. Pour lui, ces petites phrases seront passées aux oubliette de l’histoire, un peu comme on a oublié aujourd’hui “le bruit et l’odeur” de Jacques Chirac pour ne retenir que sa stature d’homme d’Etat

Le Rav Ovadia Yossef a donc transformé profondément la sociologie de l’Etat d’Israël, dispose d’un pouvoir politique très important et a opéré une véritable révolution dans le monde halakhique que nous aborderons dans un prochain billet.
C’est tout ça qu’il faut avoir en tête pour mieux comprendre l’action du Rav Ovadia Yossef. Et au-delà, mieux comprendre l’évolution du monde juif en diaspora et en Israël.

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BIOGRAPHIE
Article du Jerusalem Post

Rav Ovadia Yossef : la revanche des Séfarades.

C’est l’homme qui a rendu sa « fierté » aux Juifs séfarades longtemps méprisés par l’élite ashkénaze israélienne. Les superlatifs ne manquent pas pour décrire le rav Ovadia Yossef. Personnalité adulée et détestée, le leader spirituel du parti ultra-orthodoxe séfarade, Shas, à la mémoire phénoménale, est l’une des voix les plus écoutée en matière de Halakha (loi juive).

Génie de la Torah.

Né à Bagdad en 1920, rien ne prédestinait Ovadia Yossef à une carrière rabbinique aussi impressionnante en Israël : séfarade, aucune lignée prestigieuse et issu d’un milieu très modeste sur les berges du Tigre. La famille immigre en Terre promise en 1923.

Le clan composé de huit enfants rejoint Jérusalem où le père, Rabbi Jacob, ouvre une épicerie « Beit Israël ». Très jeune, Ovadia se distingue par ses connaissances dans le domaine de la Torah. A 12 ans, il est admis à la yeshiva, Porat Yossef, seul établissement séfarade de la Palestine ottomane.

Le jeune élève impressionne. Doté d’une mémoire photographique inégalée, il retient chaque commentaire rabbinique à la perfection. Tout son temps libre est consacré à la Torah. Etudiant modeste, il passe ses journées dans les librairies religieuses de Jérusalem, dévorant les ouvrages qu’il n’a pas les moyens de s’offrir. Ovadia préfère le terrain de l’étude, ses frères celui du combat contre les Anglais.

L’un d’entre eux participe, en juillet 1946, à l’attentat contre l’hôtel King David devenu le quartier général des forces britanniques. Possédant un don unique, l’élève saute les étapes : il publie son premier ouvrage à l’âge de 18 ans, puis est nommé rabbin à peine deux ans plus tard. A 25 ans, il siège déjà au Beth Din (tribunal rabbinique) séfarade de Jérusalem. Un poste habituellement hors de portée pour un rabbin aussi jeune.

Entre 1947 et 1950, Ovadia Yossef franchit les frontières du jeune Etat hébreu balbutiant pour présider le tribunal rabbinique du Caire. Il est alors l’adjoint du grand rabbin d’Egypte. Dans un contexte politique extrêmement tendu, il fait la preuve de sa posture de leader. Il tient tête au gouvernement du Caire, refuse de faire des déclarations contre Israël et continue, malgré les menaces, à prêcher en hébreu. Son destin atteint alors les sommets. Le modeste rabbin originaire de Bagdad est nommé grand rabbin de Tel-Aviv en 1968.

En 1973, il devient Rishon Letsion, titre porté par les grands rabbins séfarades en Palestine ottomane, puis en Israël. Il le reste jusqu’en 1983 car la loi limite cette fonction à deux mandats.

Gélatine casher, lave-vaisselle unique. Ses décisions détonent.

Au-delà des titres, Ovadia Yossef est considéré comme le « possek » séfarade (le décisionnaire en loi juive) le plus écouté de sa génération. Dans le monde juif oriental, il jouit du même prestige que le grand rabbin Schach dans les milieux ashkénazes. Mais il marque un profond sillage.

Ses jugements sur la pratique religieuse apparaissent comme moins stricts que ceux de l’école lituanienne. Il est celui qui crée la controverse en affirmant que la gélatine est casher, y compris celle qui provient du porc.

Il autorise, par ailleurs, sous certaines conditions, l’utilisation d’un seul lave-vaisselle pour les couverts destinés au lait et à la viande. Il est l’une des rares voix à encourager les fêtes de bat-mitzva pour les jeunes-filles, un événement qui se célèbre généralement en privé dans les milieux haredim.

A travers ses décisions, Ovadia Yossef cherche à se démarquer d’une tutelle ashkénaze longtemps considérée comme oppressante par les Juifs orientaux. Prise de position révélatrice : la voix séfarade s’oppose farouchement au port de la perruque pour les femmes mariées, une pratique importée d’Europe, et préconise l’utilisation du foulard.

Lumière pour les grandes et petites questions du judaïsme, Ovadia Yossef est l’auteur de dizaines de livres dont une collection d’ouvrages Yabia Omer, témoins indélébiles de ses connaissances astronomiques. En 1970, il remporte le Prix d’Israël dans le domaine de la littérature religieuse juive. Ses leçons hebdomadaires, organisées à la synagogue Yazdim à Jérusalem, sont suivies par satellite à travers tout le pays.

Les Arabes, des « serpents vénéneux »

Certaines de ses prises de positions ont profondément influencé la vie politique israélienne : « Je suis arrivé à la conclusion que les Falashas sont des descendants d’une tribu d’Israël… et j’ai décidé qu’à mon avis les Falashas sont juifs », déclare-t-il en 1973.

Autorité spirituelle de premier plan, il confirme la judéité des Juifs d’Ethiopie et amorce ainsi les célèbres opérations de sauvetage des années 1980. L’ancien grand rabbin d’Israël apparaît également comme une voix discordante concernant les territoires conquis par Israël en 1967 :  » Il est permis de céder une partie d’Eretz Israël à des non-Juifs si cela doit éviter des guerres et sauver des vies. »

Une position violemment combattue par les rabbins du Parti national religieux. Ces déclarations restent pourtant dans l’ombre des provocations du leader séfarade. Il déclenche régulièrement des tempêtes médiatiques. Même les sujets les plus sensibles sont attaqués. Les victimes de la Shoah ont été massacrées parce qu’elles étaient des « réincarnations d’âmes pécheresses ».

En novembre dernier, Ovadia Yossef s’en prend aux enseignants des établissements laïcs qu’il qualifie d' »ânes ». Cible régulière de ses attaques : les femmes et les Arabes. « Une femme sans enfant ne vaut rien… De temps en temps, dans la galerie des femmes, tu les entends qui papotent. De quoi ? Celle-ci dit à son amie : comme ta robe est belle !… C’est là toute leur intelligence. » Durant ses discours, le leader spirituel du Shas crache souvent sa haine contre les Arabes comparés à des « serpents » nuisibles et « venimeux ».

En 2001, lors du prêche de Pessah, Ovadia Yossef dérape à nouveau : « Il faut anéantir les Arabes. Il ne faut pas avoir pitié d’eux, il faut leur tirer dessus avec des super missiles, les anéantir, ces méchants, ces maudits. » Des déclarations haineuses qui provoquent la consternation internationale.

Détestée ou admirée, l’aura d’Ovadia Yossef s’étend pourtant bien au-delà du monde religieux. Au début des années 1980, les sirènes de la politique l’appellent d’autant que la population séfarade reste un électorat délaissé par les cercles du pouvoir.

Avec le rabbin Arieh Deri, il fonde en 1984 le parti Shas, ovni politique qui va, au fil des scrutins, construire les coalitions gouvernementales ou au contraire signer leur arrêt de mort. Les experts politiques parlent de fierté « ethnique » pour expliquer le succès inattendu de Shas en Israël. La posture de l’ancien grand rabbin séfarade joue un grand rôle dans le processus d’identification : robe et turban plutôt que costume sombre et chapeau noir des Ashkénazes. Néanmoins, l’image d’Ovadia Yossef a été ternie par les errements judiciaires de son second, Arieh Deri, secrétaire général du Shas, à la fin des années 1990.

Malgré les évidences, l’ancien Rishon Letsion soutient envers et contre tous son « fils » spirituel jusqu’à en perdre sa crédibilité. Arieh Deri écope de quatre années de prison pour détournement de fonds et Ovadia Yossef est obligé de nommer un nouveau second, Eli Yishaï, en 1999.

Par ailleurs, sa conduite politique est régulièrement sujette à controverse. Et le rabbin est fréquemment rappelé à l’ordre. Le rav Ovadia Yossef promet ainsi le paradis à tous ceux qui votent pour la liste séfarade. Lors du dernier scrutin législatif, il récidive dans le registre religico-populiste. Lors d’une allocution télévisée, il s’en prend aux électeurs de Lieberman qui ne font que « renforcer Satan ».

Aujourd’hui, le leader politique et religieux est davantage connu pour ses nombreuses sorties de route que pour ses marques de génie halakhique.

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mivy

Merci beaucoup pour cet article bien informé.
Rav Ovadia Yossef avait toute ma sympathie au début, grâce à sa défense des sépharades, et à sa préférence pour la paix. Mais ses propos racistes l’ont complètement discrédité.
L’absence de rabbin notoires, ashkenaze ou sépharade parlant un langage d’humanisme me fait beaucoup de peine, et me manque énormément. Dans ma jeunesse, je croyais que le judaisme et l’esprit de tolérance étaient liés, que nous préparions l’arrivée de Mochiah, une époque où tous les hommes seraient ensemble dans la fraternité, et{{ j’ai l’impression que nos représentants spirituels s’enfoncent dans la haine de leur prochain au lieu de séparer les hommes (arabes), des idéologies létales qui les contaminent.}}