ANALYSE – Par Guillaume Perrault, journaliste politique au Figaro

Marine Le Pen va-t-elle donner le ton de la présidentielle de 2012? Sa stratégie pour être élue à la tête du Front national a montré son efficacité. Et sa candidature à l’Élysée bouscule tant l’UMP que la gauche.

Marine Le Pen a obtenu 67,65% et son rival, Bruno Gollnisch, 32,35% lors du vote interne des adhérents du FN. Les membres du parti ont donc été à l’unisson des sympathisants, qui plébiscitaient Marine Le Pen dans les sondages. Les adhérents ont choisi la candidate susceptible de séduire le plus grand nombre de Français à la présidentielle. Le désir des membres du FN de sortir de l’isolement et de voir leurs représentants accéder au pouvoir dans le cadre d’une coalition a été décisif.

Certes, sur 22.403 adhérents appelés aux urnes, 5276 se sont abstenus – soit 23,55% -, ce qui peut paraître très élevé. Mais la fille de Jean-Marie Le Pen a désormais les mains libres pour s’entourer de l’équipe de son choix à la tête du FN et concevoir sa campagne présidentielle comme elle l’entend.

Pour Nicolas Sarkozy et l’UMP, le danger est évident. Au lendemain des régionales de mars, Thierry Mariani, alors député UMP du Vaucluse, considérait que l’électorat de la majorité était «toujours en attente» en matière «d’immigration, de sécurité et de patriotisme». Or, soulignait-il, ces thèmes «avaient contribué au succès de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007». Pour tout arranger, aucune personnalité charismatique ne paraît aujourd’hui en mesure d’incarner l’aile droite de la majorité, comme le fit en son temps Charles Pasqua, voire Philippe de Villiers. Désormais, à droite, entre Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen, il n’y a rien, hormis Nicolas Dupont-Aignan.

Le potentiel électoral déjà démontré par le FN à la présidentielle de 2002 – Jean-Marie Le Pen et son ex-lieutenant Bruno Mégret avaient respectivement obtenu 16,86% et 2,34% des voix – va-t-il conduire Nicolas Sarkozy, qui avait commencé son quinquennat par l’ouverture à gauche, à l’achever par un coup de barre à droite? Tel fut le cas de Valéry Giscard d’Estaing.


Après avoir appelé Françoise Giroud au gouvernement en 1974, fait adopter l’IVG en 1975 et le regroupement familial en 1976, le troisième président de la Ve République acheva son septennat par la loi «sécurité et liberté» et par l’accord franco-algérien qui prévoyait le retour volontaire de 35.000 travailleurs algériens par an. Comme si un scénario immuable poussait un président de droite à tendre d’abord la main à la gauche puis à repartir à la conquête de ses électeurs de droite mécontents.

À gauche aussi, le dynamisme de Marine Le Pen n’est pas sans conséquence. Dans le domaine de la tactique électorale, les ténors socialistes tirent argument du redressement du FN pour condamner la multiplication des petits candidats – Nouveau parti anticapitaliste, Lutte ouvrière, Front de gauche, Verts – qui risqueraient d’empêcher le PS d’accéder au second tour en 2012, comme le 21 avril 2002. Dans le domaine de la stratégie politique, François Hollande, ancien premier secrétaire du PS, a conscience de la nécessité de répondre à l’inquiétude des catégories populaires, mais ne précise pas encore comment.

Jean-Luc Mélenchon bataille lui aussi pour conserver des électeurs protestataires que le discours de Marine Le Pen en faveur de «l’État fort» et contre la mondialisation pourrait tenter. Le titre de son livre à succès – Qu’ils s’en aillent tous! – évoque le slogan de Pierre Poujade aux législatives de 1956: «Sortez les sortants!»

La réapparition, à droite de l’UMP, d’une force politique significative, dotée d’un leader et portée par une dynamique exerce ainsi une pression sur tous les autres partis.

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