L’esplanade du « kotel », le mur occidental, lieu de recueillement le plus symbolique du judaïsme, déjà habituellement séparée en deux sections – une pour les hommes, l’autre pour les femmes- est en ce petit matin de juin traversé par des cordons de police.Raison de cette présence policière massive: les « femmes du mur », un groupe de femmes la plupart inspirées par le judaïsme libéral, accordant une place égale aux hommes et aux femmes dans les rituels religieux. Elles prient dans l’espace réservé aux femmes mais en lisant la Torah à haute voix et en utilisant, pour certaines d’entre elles, tefilins (phylactères en cuir), talit (châle de prière) et kippa, des pratiques contraires à celles admises pour les femmes par les juifs ultra-orthodoxes qui contrôlent le mur.

« Tsss, tsss…vous êtes des bêtes, la preuve la police vous a mises dans un enclos », lance une femme ultra-orthodoxe, vêtue d’une longue jupe noire et la tête couverte, à l’adresse du groupe séparé du reste de la section des femmes par une barrière et un cordon policier.

Chaque mois, les « femmes du mur » se rendent pour la prière traditionnelle de rosh hodesh (début du mois dans le calendrier hébraïque) au mur occidental, ultime vestige du second Temple juif détruit par les Romains en 70 de l’ère chrétienne, placé sous l’autorité du rabbinat ultra-orthodoxe.

Ces derniers temps, l’hostilité des hahedim (« craignant Dieu », ultra-orthodoxes) à leur égard a redoublé à mesure qu’elles s’assuraient le soutien de la justice et d’un nombre croissant de personnalités politiques.

L’organisation de femmes, créée en 1988, a récemment obtenu l’appui de la justice israélienne qui leur a reconnu le droit de prier comme elles l’entendent, réinterprétant en leur faveur une décision de la Cour Suprême israélienne de 2003.

Une mère et sa fille prient enlacées. Une jeune femme serre le bébé de quelques mois qu’elle porte drapé sur sa poitrine. Une autre disparaît presque dans le châle de prières à fleurs brodées rouges dans lequel elle s’enveloppe comme pour se protéger des invectives des femmes ultra-orthodoxes.

Alors que les prières de ces derniers mois avaient été marquées par des arrestations parmi les « femmes du mur » et des incidents, parfois violents, avec les fidèles orthodoxes, début juin près de 300 femmes ont pu pour la première fois prier et chanter dans un calme relatif, sous escorte policière.

« Le fait pour une femme de prier avec un talit, des tefilins ou une kippa n’est pas interdit par la halaha (la loi juive). Il s’agit même de pratiques qui étaient en vigueur au XIIIe et XIVe siècle », souligne la députée (Yesh Atid, centre droit) Aliza Lavie, présidente de la commission parlementaire sur le statut des femmes. « Les femmes du mur remettent en cause les normes imposées par les ultra-orthodoxes, qui ne sont que leur interprétation du judaïsme », ajoute cette juive pratiquante.

Une tension croissante

La polémique grandissante autour des revendications des « femmes du mur », loin de se limiter à une controverse entre différents courants du judaïsme, est un des signes de la tension croissante entre le monde ultra-orthodoxe et le reste de la société israélienne, religieuse ou non.

L’influence politique des ultra-orthodoxes, et leur monopole sur les affaires religieuses et une partie de la vie civile, sont en effet de plus en plus contestés en Israël.

Pour la première fois depuis plusieurs décennies, le nouveau gouvernement israélien, mis en place au printemps, ne compte pas de partis ultra-orthodoxes qui servaient depuis des années de pivot dans les coalitions.

La ministre de la Justice Tzipi Livni a publiquement exprimé son soutien aux “femmes du mur” en déclarant notamment, le mois dernier, qu’il “était temps – au niveau constitutionnel, social et culturel – d’appliquer une politique tolérante et pluraliste dans l’Etat d’Israël”.

« Je suis optimiste, les choses sont en train de changer au niveau politique », estime Valérie Stessin, une femme rabbin du mouvement conservateur, membre des « femmes du mur ».

En avril, juste avant le précédent de la justice israélienne en faveur des « femmes du mur », cette mère de deux enfants, ordonnée rabbin en 1993, a été arrêtée par la police avec quatre autres femmes pour avoir prié avec un talit.

Elle connaissait les risques, mais, dit-elle, « je ne supportais plus l’idée de vivre dans un pays qui se veut démocratique avec un monopole ultra-orthodoxe sur un site qui est soi-disant à tout le monde ».

« Femmes du mur » vs « femmes pour le mur »

Reste que contrairement aux Etats-Unis, d’où son originaires nombre de femmes de l’organisation, le judaïsme libéral – conservateur et réformé – reste très minoritaire en Israël. Seulement 7,1% des Juifs israéliens se définissent comme réformés ou conservateurs, contre 26,5% qui disent appartenir au judaïsme orthodoxe, selon le centre de recherches Israel Democracy Institute (IDI).

En réaction aux « femmes du mur », des femmes orthodoxes ont créé l’organisation « femmes pour le mur » qui accusent leurs coreligionnaires de provocation.

« Je respecte le désir de ces femmes de prier comme elles le souhaitent, mais pourquoi quelques centaines d’entre elles imposeraient leurs pratiques à des milliers de gens qui viennent quotidiennement prier au mur et sont attachés aux rites orthodoxes », lance Leah Aharoni, cofondatrice de l’organisation.

« Ces pratiques marchent très bien aux Etats-Unis mais pas ici, en Israël. Contrairement à ce que sous-entendent les femmes du mur, nous ne sommes pas soumises ou opprimées, nous sommes seulement attachées à nos traditions », ajoute-t-elle.

« Le phénomène des ‘femmes du mur’ n’est pas très populaire en Israël », reconnaît la députée de Yesh Atid Aliza Lavie. Et d’ajouter : « Mais le mur est un symbole pour l’ensemble des Juifs pas seulement pour les orthodoxes. Il faut trouver un moyen de diviser l’espace public pour que cela convienne à tout le monde ».

AFP/ RTBF.be Article original

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meller1

je suis d accord avec toi Dany de Carmiel

Rail

Le fait pour une femme de prier avec un talit, des tefilins ou une kippa n’est pas interdit par la halaha (la loi juive). Il s’agit même de pratiques qui étaient en vigueur au XIIIe et XIVe siècle »,

c’est un pays démocratique , et bien sur la juive libérale que je suis est pour . comme je suis pour les femmes rabbins .