DÉMISSION DU GRAND RABBIN – Faux diplôme et plagiats obligent, le Grand Rabbin de France a démissionné.

Il n’est pas le seul,d’autres responsables et leaders juifs sont ou ont été atteints du même syndrome: celui d’être toujours le premier de la classe. Pire, le mensonge est devenu la gouvernance de la communauté.
Le premier de la classe:

« Il ne faut jamais épouser le premier de la classe.Ses échecs lui seront insurmontables. Il ne pourra jamais les dépasser ». Ces mots, je les ai entendus de la bouche de Gilles Bernheim, alors qu’il donnait son cours le jeudi soir, dans la salle « Jérusalem », au-dessus de la synagogue de la Victoire, dont il était alors rabbin. Il a même ajouté ce soir-là:

« Non seulement ses échecs lui seront insupportables, mais les vôtres seront encore plus inacceptables, pour lui. Cela lui renverra une image de vous détestable, qu’il ne pourra pas assumer ». Il a répété plusieurs fois: « On n’épouse pas le premier de la classe, il vous fera une vie invivable ». Quelque part avec son mensonge, Gilles Bernheim, dépassait-il pas l’inacceptable pour lui, tout en restant vivable?

Personne ne la jamais entendu piquer une crise d’hystérie. Personne ne la jamais pris à piquer dans la caisse. Riez pas, ces abstinences sont déjà un comportement exemplaire. Être le premier de la classe, on nous l’a très souvent imposé dans le monde ashkénaze. Nous devions être des exemples. C’était la clef de notre acceptation sur le sol français ou dans l’entité française. Quand je suis entrée en 6ème au lycée Hector Berlioz à Vincennes, il y avait au début des années 70, un très petit nombre d’élèves juifs. J’étais la seule de ma classe. La directrice m’a convoquée, devant ma mère, et m’a dit:

« Je viens d’un lycée du 15ème, là -bas toutes les petites Israélites étaient premières de classe, faites de même, Mademoiselle ». Ma mère, enseignante, en a rajouté une louche: « Je n’arrête pas de lui dire. Moi j’ai été première toute ma scolarité (ce qui est vrai). Elle n’arrive pas à comprendre qu’elle doit être la première! »

J’ai été libérée de ce fardeau, arrivée en 4ème au lycée Hélène Boucher. Il y avait plus de 30% d’élèves juives. On ne pouvait pas toutes être la première de la classe. Mais il régnait chez nos parents une obsession de notre brillante réussite scolaire. C’est là que le mensonge s’installe. Quand le succès attendu n’est pas au rendez-vous, tout se met à déraper. J’ai entendu l’un des copains qui venait de rater l’examen d’entrée à sciences po, clamer: « C’est sans importance. Je suis prof à la prep’ de l’ENA. »

Je lis encore aujourd’hui sur les CV officiels de certains de faux diplômes ou faux qualificatifs. Et Bernheim? Je vais vous surprendre. J’ai toujours su qu’il n’était pas agrégé. Comment? Il se racontait à Strasbourg deux versions:

L’une qu’une épreuve se déroulait le samedi (shabbat, jour où un juif religieux ne peut pas écrire) et que Gilles Bernheim avait opté pour la note 0 et avait eu pour seul choix d’avoir 18 dans toutes les autres matières.
Autre version: L’épreuve du samedi, qui aurait été l’épreuve de « la leçon », aurait été réalisée, sans enfreindre les interdits religieux.
Dans les deux cas, c’était impossible. Mon père était universitaire, prof de philo et a toujours dit: « Ces deux histoires sont incohérentes ». Gilles Bernheim, n’a pas l’agreg. Et alors? Mais rien du tout! La fonction rabbinique ne demande pas d’être agrégé! Gilles Bernheim est devenu Rabbin. Il n’a jamais usurpé le titre d’agrégé pour enseigner. Ses cours étaient dispensés dans le cadre de ses fonctions rabbiniques. Il n’a jamais enseigné à l’université ou au lycée. À ma connaissance, il n’a même jamais enseigné en lycée juif. Alors? Il s’est fait plaisir….

La question est: Devenu Grand Rabbin de France, ne devait-il pas rétablir la vérité?

C’est là que le bât blesse. Quand on accède à une fonction de référence publique, quand on devient la parole officielle des juifs de France (Dans notre société française laïque, la parole officielle des juifs de France, est celle du Grand Rabbin, selon la volonté de Napoléon), alors on doit être sans reproche…Comme nos ministres…À ce moment, Bernheim a fauté.

Mais son employeur le Consistoire et donc son président Monsieur Mergui a manqué de professionnalisme élémentaire: demander la preuve des.diplômes. Peut-être a-t-il dû fournir son diplôme de l’école rabbinique qui lui ouvre droit à l’exercice de rabbin. Mais son agrégation qui au consistoire s’en est soucié? Dans ce cas, la faute est à celui qui a manqué de vigilance…Le Président du Consistoire et ses collaborateurs.
Ou alors tout le monde convient que ce diplôme n’a pas à être comptabilisé et l’on se contente d’une belle déclaration commune: « Le Grand Rabbin a été empêché le jour du concours de l’agrégation, il en a toutes les qualités. Nous lui gardons notre confiance pour l’exercice du rabbinat ».

On gomme le titre dans toutes les biographies, on convoque le Grand Rabbin, on lui passe le savon de sa vie. On l’oblige à être un peu plus humble et la vie continue…

Le mensonge comme gouvernance communautaire:

Si l’agrégation ne fait pas le rabbin, l’écriture des pensées du rabbin articule et soude la vie de la communauté juive. Les écrits rabbiniques sont le socle du monde juif. Toute la vie religieuse juive s’articule autour des écrits des « maîtres » du judaïsme. On passe des nuits à confronter tel écrit à tel autre. On vient de passer la fête de Pessah où les juifs racontent la sortie d’Egypte. Des passages entiers du récit consistent à transmettre les interprétations et analyses des « Rabbis » des temps passés. Si les idées discutées n’étaient pas les leurs mais celles du prêtre égyptien de la ville ou du roi grec de leur époque, de quelle retransmission serions-nous dépositaire? Où seraient les fils qui relient nos générations à travers l’histoire?

Par le plagiat, Gilles Bernheim a endossé la veste d’un intellectuel sans scrupule. À ce moment, il a trahi le message fondamental du judaïsme: l’exemplarité. Être le « Peuple Élu », ce n’est pas être supérieur. C’est avoir été choisi pour porter à l’humanité, l’exemple du comportement humain. Il a adossé sa pensée au mur du mensonge.

Comment en est-il arrivé là?

Depuis de nombreuses années, le mensonge va galopant chez les élites de la communauté juive. Tout a démarré avec ces intellectuels médiatiques qui provoquent l’admiration jusqu’à Jérusalem. Combien de fois ai-je entendu, chez les dirigeants du parti travailliste israélien: « Pour être quelqu’un en France, il faut être un intellectuel de Saint Germain des Prés ». Les dirigeants israéliens sont persuadés que la reconnaissance et la réussite françaises passent par le Flore ou les Deux magots. Shimon Pérès, le président israélien en est intimement convaincu, le service du porte-parole des affaires étrangères israéliennes aussi. L’ancienne militante de la section du parti travailliste israélien, en France, que je suis, les a suffisamment entendu nous dire: « Faites nous venir un intellectuel qui parle dans les médias. En France, c’est eux qui comptent. On ne veut personne d’autre ».

Ce mirage, venu d’on ne sait où, a fait fleurir un nombre de dirigeants communautaires aux CV rêveurs mais qui n’étaient qu’illusion. Tel administrateur du consistoire de Paris affirmait être le directeur du département d’études juives de Strasbourg, dont il n’était en fait qu’un chargé de cours…Telle autre affirmait être attachée de presse d’un ministre, journaliste à ses heures, la madame était en fait assistante d’un officieux cabinet au temps où certains membres de cabinet pouvaient être à la discrétion du ministre (ce type d’emploi n’existe plus). Son mensonge lui assurait une assise confortable dans les instances juives. Quant aux intellectuels des tribunes, des grands rassemblements et des plateaux télés, certains ont assis leur réputation sur le mensonge du siècle.

Il y a quelques années, un certain Monsieur Rosenberg, aujourd’hui décédé, a envoyé à de nombreuses rédactions son histoire du Ghetto de Varsovie, lui qui y a vécu et combattu. Ce témoignage mettait en cause la réalité, d’un autre grand témoignage, qu’on aime écouter sur les plateaux télés. Seul Libé s’en est fait l’écho. J’étais alors, au Point, la pigiste de Christian Makarian. Aujourd’hui il est Directeur délégué de la rédaction à l’Express, le journal qui a fait « tomber » Bernheim. J’en avais parlé avec Christian et sa réponse avait été: « Annie-Paule, j’ai lu, j’ai transmis à Jeambar, qui m’a répondu: « Vous mettez ça dans un grand carton, et vous oubliez ».

Le Grand Rabbin de France, ne peut pas ignorer tous ces « dénis ». Il est difficile parfois de voir les couronnes de fleurs sur la tête des imposteurs sans envie surtout à l’heure où pour exister, pour être reconnu,il est impératif « d’Être un intellectuel dont les médias parlent ». Bernheim a fait « pêché d’orgueil », mais il est loin d’être le premier et pas le seul. Pourquoi est-il le seul à tomber?

Annie-Paule Derczansky

Publication: 23/04/2013 06h00

huffingtonpost.fr Article original

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Jacob.ouanounou1

Bonjour,

Je vous remercie infiniment d’avoir écrit cela, parce que cette affaire mettra en réalité beaucoup de temps pour cicatriser.

Gilles Bernheim est assurément l’un des hommes les plus fiables de nos institutions. La preuve ? Il a eu la candeur de croire qu’on peut « sortir » sur un sujet comme le mariage pour n’importe qui sans avoir essuyé ses pieds, pensant que ses adversaires allaient avoir la hauteur d’un débat sur les arguments (débat argumenté qui n’a pas eu lieu, autrement que par des noms d’oiseaux).

J’irai pour ma part un peu plus loin que vous : Gilles Bernheim est victime des lacunes de la communauté. Je pense que nous avons fabriqué le Gilles Bernheim que nous repoussons aujourd’hui. Je m’explique : nous avons le talent, nous autres juifs, de nous faire représenter par des gens grossiers, grossiers dans le sens où ils manquent de raffinement dans leurs manières d’être et de faire. Pour répondre à cette multiplication d’opportunistes carriéristes creux dans notre représentation communautaire, une frange de la population (je pense à la communauté de la Victoire) a dû, consciemment ou inconsciemment, chercher à « dénicher » ou à « fabriquer » un homme raffiné, érudit, cultivé, à l’éventail large avec une bonne ouverture d’esprit. Gilles Bernheim répondait à ces critères. Il a accepté le rôle, c’était une aubaine. Il avait été agrégatif (candidat préparationnaire à l’agrégation). Pratiquement personne ne sait ce que c’est, et pratiquement personne ne sait qu’un agrégatif avale une dose stratosphérique de connaissances académiques. Alors on a pris un raccourci : Bernheim était agrégé.

Quelqu’un a dit : à qui profite le crime ? Certainement pas à Bernheim ! Je pense que Bernheim a endossé cet habit pour satisfaire la communauté de la Victoire, qui cherchait (je pense) quelqu’un de potable à mettre au Consistoire. Je pense qu’il a continué à endosser cet habit par la suite pour ne pas gêner ses supporters qui l’avaient présenté comme agrégé.

Mais cette agrégation n’a aucune importance : comme vous l’avez très bien dit, il n’est pas nécessaire d’être agrégé pour être rabbin. D’ailleurs, même pour ceux qui l’ont fait tomber elle n’a aucune importance. Et les plagiats non plus. Bernheim n’est pas tombé parce qu’il n’était pas agrégé. Bernheim n’est pas tombé parce qu’il avait plagié. Bernheim est tombé parce qu’il a fait une sortie sur le mariage homosexuel. Point. Et cela nous informe sur le caractère sanguinaire et impitoyable du débat politique actuel en France.

Au passage, parmi les articles que j’avais trouvés pertinents, en plus du vôtre, je voudrais citer celui du Nouvel Obs, dans lequel le journaliste avait fait remarquer que, dans le lynchage médiatique qu’a subi Bernheim, lynchage auquel le Ministre de l’Intérieur (autorité de tutelle !) a contribué, on n’a pas laissé la Communauté Juive exprimer ses choix. Car après tout, nous aurions pu décider en toute connaissance de cause, que Gilles Bernheim restait celui que nous souhaitions avoir comme représentant.

En ce sens, je suis ravi que le Ministère de l’Intérieur n’ait pas d’interlocuteur rabbinique aujourd’hui : puisque vous ne voulez pas de notre rabbin, débrouillez-vous ! Et j’espère qu’on prendra tout notre temps pour en nommer un autre.

Enfin, pour clore, j’espère que la communauté en tirera une leçon. Tous les juifs que j’ai rencontré ont regretté que Bernheim ne soit pas un vrai agrégé. C’est donc exactement ça qu’il nous faut pour nous représenter : un agrégé (ou autre), érudit, ouvert, raffiné, subtile, cultivé. Un vrai. Il doit bien y en avoir !

DANIELLE

Henlev bonsoir,

Mais à qui profite le crime ?

henlev

« est-ce vraiment utile, pour qui, pour quoi ? »
Oui c’est utile, surtout pour nous-même.
Et c’est d’autant plus utile que du temps a passé permettant un jugement serein.

DANIELLE

Tout d’abord j’ai apprécié votre texte remarquable qui dit une vérité, mais pas toute la vérité.

Je ne comprends pas pourquoi ce sujet revient sur la sellette, est-ce vraiment utile, pour qui, pour quoi ?

Vous semblez surprise que les Israéliens réclament des personnalités intellectuelles, mais le monde fonctionne ainsi, d’ailleurs vous le dites bien que durant votre jeunesse on vous demandait d’être la première
parce que juive, mais même non-juive rassurez-vous.

Je pense que les raisons sont ailleurs, vous avez des contacts étroits avec la presse et certains journalistes alors vous devez en savoir plus, mais motus et bouche cousue ………..!