CYCLISME — Une fondation le révèle: pendant la Seconde Guerre mondiale, le champion toscan a permis à 800 Juifs de fuir l’Italie grâce à des documents cachés dans son vélo.Sa rivalité avec Fausto Coppi anime encore les conversations des anciens au Café du Commerce. Même disparu depuis bientôt 12 ans, Gino Bartali reste ancré dans les mémoires. Dans celles des amoureux de la petite reine mais aussi de celles de nombreux Juifs qui ont réussi à rallier les Etats-Unis et la Suisse grâce à l’engagement de ce géant de la route. Sa carte de visite s’est assurément retrouvée tronquée par la faute d’une Seconde Guerre mondiale arrivée durant ses années de gloire. N’avait-il pas déjà savouré trois succès dans des grands tours (Tour d’Italie 1936 et 1937, Tour de France 1938) sans parler de ses victoires dans les classiques comme le Tour de Lombardie et Milan-San Remo avant d’être stoppé, à 25 ans, par le dramatique conflit?

Gino Bartali lors du Tour de France 1948 -Image: Keystone
En quête de témoins

Les enfants, parents et amis de personnes concernées par les actes de Gino Bartali peuvent apporter leur témoignage à la Fondation Bartali par mail: lg.press@libero.it

La paix et le calme revenus, «il Ginettaccio» a retrouvé son vélo et son talent pour en remporter encore deux (Giro 1946 et Grande Boucle 1948). Mais c’est aussi sa rivalité pour le moins légendaire avec son compatriote Fausto Coppi qui s’est chargée de diviser les tifosi. Non seulement pour des raisons sportives mais aussi en raison de leurs positions politiques différentes.

Des entraînements «humanitaires»

Gino Bartali n’avait pas attendu son grand rival pour se construire un joli palmarès. Après sa première participation au Giro en 1935, il survole celui de l’année suivante grâce aux numéros effectués dans les cols des Dolomites empruntés pour la première fois. En 1937, après une broncho-pneumonie où il risque de mourir, le grimpeur toscan trouve encore la force de doubler la mise. Une belle série semble lancée, mais le pouvoir en place en Italie ne lui en laisse pas l’occasion. Le parti fasciste l’oblige à renoncer au Giro 1938 pour participer et gagner le Tour de France.

Le conflit mondial lui permet de se mettre en évidence d’une autre manière. Celle qui révèle la vraie personnalité d’un champion. Quelque 800 Juifs, dont certains ont trouvé refuge à l’époque entre Genève et Lausanne, lui doivent beaucoup. Membre du réseau clandestin Desalem, le Toscan est passé à l’acte dès le 8 septembre 1943. A l’insu de sa famille, dont son épouse, Adriana, le grimpeur a enfourché son Legnagno rouge et vert plus de quarante fois afin de monter au couvent de San Quirico, près d’Assise. Sous la selle et dans les tubes vides de son guidon, Gino Bartali cachait les photos et documents de Juifs à contrefaire pour leur permettre de fuir. Sur les 200 km menant de Florence à l’établissement tenu par des sœurs, les contrôles étaient fréquents.

Grace à son aura et sa réputation, ses missions ont toujours connu la réussite, les Allemands lui demandant de signer des autographes ou de répondre à des questions sur le cyclisme. Dès son arrivée, «il Ginetaccio» remettait les précieux papiers dans les mains de la mère supérieure pour les transmettre à une imprimerie clandestine. Munis de nouveaux papiers, les Juifs pouvaient rejoindre les Abruzzes avant de s’exiler aux Etats-Unis ou de chercher leur salut en Suisse. Historien de la Shoah de Gênes, Maccio est même parvenu à en localiser sur les bords du lac Léman entre Genève et Lausanne. Avant de jouer au bon porteur, Gino Bartali s’était aussi entraîné entre Florence et Gênes au rôle de convoyeur de fonds. Dans la ville portuaire, le champion recevait de l’argent venant de comptes ouverts en Suisse par des Juifs du monde entier pour les ramener en Toscane.

Place de Juste à Jérusalem

Très discret sur cette période cachée de sa vie, Gino Bartali s’en est allé sans faire de déclarations tapageuses à ce sujet. Préférant répéter que son action allait de pair avec sa passion. «Je ne suis pas un héros. Les héros, ce sont les autres. Ceux qui ont souffert physiquement et psychiquement. Je me suis limité à réaliser ce que je savais faire le mieux: pédaler sur mon vélo.» Une attitude qui devrait lui permettre d’obtenir grâce au travail de sa fondation une place de Justes au Yad Vashem, à Jérusalem.

(Le Matin)

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LAUGAT Renaud

Chapeau MONSIEUR Bartali pour ce que vous aviez fait en sauvant 800 Juifs des »camps de la mort »d’Auschwitz.On vous appelait < Gino le Pieux > et vous avez démontré votre grande humanité en agissant ainsi.
J’étais ébloui par vos exploits durant les Tours de France 1938 et 10 ans après en 1948,que vous aviez remporté magnifiquement! Puis avec Fausto Coppi « Le campionissimo », vous ne vous êtes pas avoué inférieur, lui qui en 1949 et 1952 a remporté également les Tours de France et sans compter vos tours d’Italie (Le Giro). Vous 2, vous étiez les idoles des « Tiffosis » du peuple Italien. Reposez en paix.
L.R

Marka22

Déjà à l’époque, j’avais de l’admiration pour Gino Bartali, pour ses envolées
en montagne. Et maintenant que j’apprends que ce sportif hors du commun a sauvé tant de juifs, c’est avec émotion que je pense à lui. Que Dieu le garde
auprès de lui.

david

Ce texte sur Bartali est repris par « le matin » à cette adresse : http://www.lematin.ch/sports/cyclisme/Bartali-a-sauve-800-juifs/story/28211604

A moins que ça ne soit l’inverse ?

KM

CHAPEAU et Sincères Hommages BARTALI !