L'ancien Premier ministre portugais Antonio Guterres, le 25 novembre 2015 à Tokyo / AFP/Archives

La visite du Secrétaire général de l’ONU au Proche Orient,

un numéro (risqué) d’équilibriste©

 

par Maurice-Ruben HAYOUN

Il est des hommes qui ne font ni bien ni mal, qui veulent donner l’impression d’agir mais qui ne trompent personne : leur volonté manifeste de se tenir à équidistance des extrêmes les condamne à l’inaction. Partout où ils vont, ils répètent ce qu’ils ont dit ailleurs ou la veille au soir. Ce qui change, c’est simplement l’orientation de leurs propos, qu’ils accommodent selon le sens souhaité par leurs auditeurs.

Résultat de recherche d'images pour "guterres"Vous l’avez aussitôt reconnu, je parle précisément de l’actuel secrétaire général de l’ONU, l’ancien premier ministre du Portugal, António Guterres, qui, en Israël, comme à Gaza ou à Ramallah, a tenté de ménager la chèvre et le choux.

Le résultat est évidemment qu’il n’a satisfait dans aucun des deux cas. Comment voulez vous que l’ONU soit prise au sérieux ? Cette organisation qui ne parvient pas à se faire respecter et dont même les effectifs armés (tant au Liban qu’au Mali, par exemple) soit ne servent à rien, soit se font tranquillement massacrer, n’est pas prête de  sortir de l’ornière.

Au Liban leur mandat est de désarmer le Hezbollah, d’empêcher ses livraisons d’armes depuis la Syrie et l’Iran. Or, ses soldats n’ont pas saisi une seule roquette alors que cette milice en stocke des dizaines de milliers… Et l’Onu ne dit rien.

Voyons de plus près la teneur des discours prononcés par ce brave homme, à la bonne volonté touchante et qui n’a cessé de dire, la main droite posée sur le cœur, qu’il ferait tout ce qui est en son pouvoir pour venir en aide, pour changer et améliorer les choses, qu’il est
très touché, très ému, etc.. etc.. Même Mahmoud Abbas ne s’est pas embarrassé de cela puisqu’il a préféré aller prendre l’air chez son ami Erdogan dont il  sait qu’il n’attendra rien de plus, mais il a choisi de s’abstenir de recevoir et de rencontrer le chef de l’ONU.

Abbas a de grandes lueurs de lucidité et sait qu’il a tout à attendre de l’Amérique et rien, absolument rien, de l’ONU. Il a d’ailleurs renoncé à exercer des pressions afin d’obtenir une reconnaissance internationale à l’ONU, les Américains lui ayant expliqué que cela sonnerait le glas de leur aide multiforme et qu’ils opposeraient leur veto. Bref, que cette tentative ne présenterait que des désavantages.

Mais revenons à ce bon secrétaire général de l’ONU. Il a cru judicieux de rendre un hommage appuyé à la sagesse et à l’ingéniosité du peuple juif à travers les âges. Il est vrai que dans cette région du monde il est difficile de trouver autant de Prix Nobel ailleurs qu’en Israël.

Il a aussi salué la nation start-up, d’où partent des découvertes et des inventions qui bouleversent nos habitudes et nos comportements dans le monde entier. Les recherches en matière agricole, mais aussi médicale et technologique en général, sont inégalées dans cette région du monde…

Pensez à Waze que tous les taxis du monde entier utilisent et qui est une invention d’un jeune soldat de Tsahal.


S’il avait eu un peu de courage politique, ce diplomate, que l’on dit chevronné, aurait pu dire aux voisins d’Israël de se mettre à son école, d’apprendre la démocratie, de combattre le sous-développement, la maladie, l’ignorance et le fanatisme.


S’il avait eu un peu de courage politique, ce diplomate, que l’on dit chevronné, aurait pu dire aux voisins d’Israël de se mettre à son école, d’apprendre la démocratie, de combattre le sous-développement, la maladie, l’ignorance et le fanatisme.

Non, selon qu’il se trouvait de ce côté-ci ou de ce côté-là de la frontière, il a adapté son discours à la nature de ses auditeurs. Et il n’a pas hésité à se rendre à Gaza alors qu’elle est dominée par le Hamas, que l’ONU a classé parmi les organisations terroristes… Il s’est tout de même abstenu d’en rencontrer les leaders.

Aucun être humain normalement constitué ne rejette la paix, aucun homme ne préfère la guerre à l’harmonie et à la quiétude. Mais disons les choses : Gaza souffre-t-elle vraiment de pénuries ? Nous avons vu des dizaines de camions chargés à ras bord de biens de consommation aller décharger leurs cargaisons dans cette enclave. Il suffit de voir les reportages pour en être convaincus. Assurément, s’il n’y avait pas de risque d’introduire des armes offensives dans cette enclave, il n y aurait aucun problème.

Et c’est sur ce point que le secrétaire général de l’ONU aurait dû insister : combattre la haine, promouvoir une meilleure approche du problème, et proposer un plan de paix ou, au moins, de non belligérance. A l’ONU, il pourrait aussi rendre les Etats arabes voisins plus sensibles aux réalités israéliennes, alors même qu’une nouvelle alliance se dessine au Proche Orient entre les sunnites (Arabie Saoudite en tête) et Israël, sous la conduite des USA.

Jamais cet homme n’a tenté d’expliquer aux uns et aux autres quel était leur intérêt bien compris. Cela me rappelle quelque chose qui remonte à quelques années. Après des troubles particulièrement graves en Corse, en l’occurrence l’assassinat du préfet Erignac, le
gouvernement français avait nommé un nouveau représentant de la république sur l’île. On demanda à Charles Pasqua son avis sur cette nomination : était-elle à même de changer les données du problème ? Que fallait-il en attendre ? Avec sa lucidité habituelle, Pasqua a répondu ceci : cet homme ne fera ni de bien ni de mal à la Corse.

C’est exactement la même chose pour ce secrétaire général de l’ONU, dont le numéro d’équilibriste n’aura même pas amusé la galerie. Il suffit de voir la manière dont B. Netanyahou lui a répondu quand il a parlé des deux états :

« Il y a plus grave et plus urgent, Monsieur le Secrétaire Général… »

Le professeur Maurice-Ruben Hayoun, né en 1951 à Agadir, est un philosophe, spécialisé dans la philosophie juive, la philosophie allemande et judéo-allemande de Moïse Mendelssohn à Gershom Scholem, un exégète et un historien français. il est également Professeur à  l’université de Genève. Son dernier ouvrage : Franz Rosenzweig (Agora, universpoche, 2015)

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